(Sur l’air du Clairon, de Déroulède)
L’air est pur, la route est large.Les clairons sonnent la charge,Qu’on donne un chef, en tremblant.Les soldats font triste mine,Car là-haut sur la collineL’on ne tire pas à blanc.Pourtant, il faut être brave.La discipline est si grave,Et l’on avance par bonds,Car des ventres. la mitrailleFait s’échapper les entraillesEt les cervelles des fronts.Face à face l’on arrive.Sous la fusillade vive.La raison n’est plus à soi.Moins conscient que la bête,L’un sur l’autre l’on se jette,Sans même savoir pourquoi.Mais puisque la route est large,Pourquoi faut-il cette charge ?Quels exécrables vautours !Faut-il croire que quand même,Sur un mot, pour un emblème,Il faut se battre toujours !C’est pour eux que le sang coule,Que cette stupide fouleSe précipite à la mort.Demain, leurs bandes affoléesViendront voir où la mêléeÀ rapporté le plus d’or.Et c’est ainsi, que sur l’herbe,Devant l’infini superbe,Où tout doit suivre son cours,L’on voit des lèvres ardentes,Frangées de baves sanglantesEt demandant du secours.Quand donc ces masses, pousséesPar la haine intéresséeÀ tuer pour conquérir,Pourront-ils un jour de fêteCélébrer cette conquête :Vouloir vivre et non mourir.