La Presse Anarchiste

À propos de la révolution algérienne

Il
existe des pro­blèmes essen­tiels dont on ne peut par­ler aussi
sou­vent que l’on vou­drait, car il est vain de pré­tendre les
résoudre uni­que­ment par la plume (cela est tel­le­ment facile)
alors que des actes autre­ment concrets seraient la seule
contri­bu­tion logique à leur réso­lu­tion ; tel est le cas
du pro­blème algé­rien. Là-des­sus, nous aurions pu
écrire, aus­si, de belles pages ver­tueuses, indi­quant à
la Résis­tance algé­rienne ce qu’elle avait à
faire pour évi­ter ceci ou cela, don­nant des directives
pré­cises pour l’é­ta­blis­se­ment d’une société
liber­taire après la liqui­da­tion du colo­nia­lisme français,
etc. Nous aurions eu ain­si l’im­pres­sion de « faire quelque
chose » alors que les Algé­riens pensent, eux, que les
seules atti­tudes valables sont, soit de col­la­bo­rer étroitement
avec leurs résis­tants en France, soit de prendre un fusil et
d’al­ler rejoindre les maquis d’Al­gé­rie, en réservant
les cri­tiques pour après la guerre.

Comme
nous n’a­dop­tons tou­te­fois pas ces atti­tudes, en rai­son des
diver­gences qui nous séparent effec­ti­ve­ment, en tant
qu’a­nar­chistes, de cer­tains aspects de la Résis­tance nationale
algé­rienne, nous avons donc assez peu trai­té de la
ques­tion d’Al­gé­rie dans nos cahiers. voir « N. et R.»N.
numé­ro 7 – 8, consa­cré au natio­na­lisme, nous limi­tant à
quelques études d’ordre éco­no­mique et géographique.

Ce
qui ne ligni­fie pas pour autant que nous soyons d’ac­cord avec
cer­taines ten­dances au sein du mou­ve­ment anar­chiste, où, sous
pré­texte des diver­gences d’ordre idéo­lo­gique dont nous
par­lions plus haut (concep­tion, esprit et objec­tifs de la lutte
natio­nale, rôle de l’É­tat dans la nation algérienne,
entre autres) on se com­plaît dans une atti­tude équivoque
de « balance » ren­voyant dos à dos les deux parties
et abou­tis­sant à un sou­tien objec­tif de la « présence
fran­çaise » en Algé­rie. Si nous fai­sons peu, ou
rien, pour la réso­lu­tion du conflit, nous ne pou­vons néanmoins
accep­ter, et actuel­le­ment moins qu’à tout autre moment, de
telles posi­tions. Tout en refu­sant le natio­na­lisme comme
l’im­pé­ria­lisme, on ne peut confondre sciem­ment l’ex­ploi­teur et
l’ex­ploi­té, l’op­pes­seur et l’op­pri­mé. Pour nous, les
ANARCHISTES NE PEUVENT QU’ÊTRE PARTISANS CONVAINCUS DE LA
DESTRUCTION DU COLONIALISME FRANÇAIS EN ALGÉRIE. Sans
récla­mer de « fusil d’hon­neur » et sans être
par­ti­sans de la bou­che­rie pour cela, nous ne pou­vons être
mora­le­ment qu’a­vec le peuple algé­rien com­bat­tant, avant son
indé­pen­dance pour SA VIE pure­ment et simplement.

Si
nous en sommes briè­ve­ment, reve­nus à par­ler de ce
pro­blème, c’est que nous pen­sons qu’à l’heure où
la folie mili­ta­riste et le racisme anti-«bicot » sont en
plein déchaî­ne­ment, même une simple posi­tion de
prin­cipe peut et doit être réaf­fir­mée. Ne
serait-ce que pour nous délimiter.

Les
Groupes Anar­chistes d’Ac­tion Révolutionnaire

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