La Presse Anarchiste

À nos amis !

C’est donc par un appel à l’aide que je ter­mi­ne­rai, une fois encore le bul­le­tin compte ren­du de l’«Avenir Social » pour l’an­née 1907.

Et c’est un appel sérieux et pressant.

J’ai reçu, depuis deux ans, des quan­ti­tés de lettres amies, ou se sont mani­fes­tés encou­ra­ge­ments, sym­pa­thies, estime et bien­veillance. C’est donc que nous avons de nom­breux amis. C’est donc que notre ten­ta­tive inté­resse, qu’on en suit l’é­vo­lu­tion, qu’on en désire la réussite.

C’est pour­quoi je n’hé­site pas à dire : aidez-nous ! Les encou­ra­ge­ments, les témoi­gnages de sym­pa­thie nous ont tou­chés pro­fon­dé­ment. Mais ce n’est pas suf­fi­sant ; il faut qu’on nous aide maté­riel­le­ment. Il nous faut, à l’heure actuelle, de l’argent, beau­coup d’argent, j’ai dit, il y a un ins­tant pour­quoi, et il nous le faut dès à pré­sent, il faut qu’on fasse dili­gence pour nous aider.

Or, ce n’est pas aux adver­saires, ni aux indif­fé­rents, que nous pou­vons nous adres­ser, mais à nos amis, à tous ceux qui nous ont écrit ces lettres de sym­pa­thie, et adres­sé ces témoi­gnages d’es­time, qui nous ont encou­ra­gés a conti­nuer l’œuvre entre­prise en nous criant : nous sommes avec vous.

On me par­lait, ces jours der­niers, d’une com­mune ou la cure rap­porte annuel­le­ment soixante mille francs au curé, et l’on me fai­sait cette remarque qu’en somme, mal­gré la sépa­ra­tion, les prêtres n’é­taient pas à plaindre car ils étaient « sou­te­nus par ceux qui étaient de leur par­ti ». Pour­quoi donc n’y pas pour sou­te­nir les œuvres laïques et indé­pen­dantes, la même entente en esprit de soli­da­ri­té que savent en mon­trer entre eux les reli­gieux de toutes teintes. Ils nous ont cepen­dant don­né une preuve de la force de l’association.

Ne nous attar­dons point en de mes­quines consi­dé­ra­tions d’é­ti­quettes ou de par­ti. C’est à tous ceux qu’a­niment les sen­ti­ments de jus­tice et de bon­té, à ceux qui veulent, pour l’en­fant pauvre, aus­si bien que pour les autres, une édu­ca­tion saine et ration­nelle, c’est à tous ceux là que je m’a­dresse pour réa­li­ser l’œuvre d’as­sai­nis­se­ment moral et de bien­fai­sante humanité.

L’«Avenir Social » peut vivre, gran­dir et se déve­lop­per. Il faut qu’il vive. Il faut qu’on m’aide à le faire vivre !

On s’a­bonne bien à une revue, pour­quoi ne devien­drait-on pas l’a­bon­né d’une œuvre humaine et juste ? On achète bien des billets de lote­rie sans trop savoir à quoi ser­vi­ra l’argent ver­sé au mar­chand de tabac du coin, pour­quoi ne nous consa­cre­rait-on pas de temps à autre, le prix de quelque billet de hasard ? Nos enfants, à nous, ne sont ni des tuber­cu­leux, ni des aveugles, ni des para­ly­tiques, ce sont des enfants sains de corps, et ils n’en sont que plus inté­res­sants, car si nous savons les rendre sains d’es­prit, il pour­ront deve­nir des indi­vi­dus conscients et forts, l’es­poir du pen­seur devant la veu­le­rie et la médio­cri­té des géné­ra­tions actuelles que des siècles de reli­gions, de ser­vi­tude pas­sive et de lourde auto­ri­té ont défor­mées et ren­dues inertes et sans volonté.

L’«Avenir Social », il est dans nos enfants, dans cette petite géné­ra­tion qui nous pousse tout dou­ce­ment vers la nuit, et c’est folie de le cher­cher ailleurs, dans un Code nou­veau ou un autre mode d’organisation.

L’or­ga­ni­sa­tion de « l’A­ve­nir », nos enfants sau­ront bien la trou­ver, si nous leur avons for­mé un cer­veau sain, un juge­ment droit, et un rai­son­ne­ment juste.

Made­leine Vernet 

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