La Presse Anarchiste

Action directe au « Trappeur » Sillans

Le 17 sep­tembre, 150 ouvriers du « Trap­peur » se mettent en grève et occupent l’usine.

Cet éta­blis­se­ment spé­cia­li­sé dans la chaus­sure de ski ver­sait les salaires les moins bas de la région en échange d’un tra­vail « aux pièces » par­ti­cu­liè­re­ment inten­sif. Le groupe André l’a absor­bé. Pour aug­men­ter la pro­duc­ti­vi­té ou dimi­nuer les salaires, les patrons ont impo­sé une nou­velle grille de salaire. Ce nou­veau sys­tème de rému­né­ra­tion a d’a­bord été appli­qué à l’a­te­lier des piqueuses.

Celles-ci ont rapi­de­ment consta­té que pour un même tra­vail elles gagnaient 25 % de moins. Elles ont refu­sé de rendre les tickets, donc de se sou­mettre au contrôle.

La direc­tion a alors déci­dé de les payer sui­vant le mini­mum de leur catégorie.

Les piqueuses ont ripos­té en tra­vaillant à l’ac­ti­vi­té minimum.

La direc­tion ne fait aucune pro­po­si­tion nou­velle à la com­mis­sion de conci­lia­tion et essaie de sanc­tion­ner le secré­taire du syn­di­cat C.G.T. Les ouvriers décident la grève et occupent l’usine.

Le soir même, les ouvriers de l’u­sine voi­sine (ski Dyna­mic) débrayent et viennent mani­fes­ter devant le Trappeur.

Quelques jours après, les ouvriers votent la pour­suite du mou­ve­ment. Le comi­té inter­syn­di­cal (C.G.T., C.F.D.T., S.N.I.), comi­té de base inter­can­to­nal, lance un appel à la soli­da­ri­té. L’ap­pel à la soli­da­ri­té finan­cière est tou­jours valable : Alain COTTE – C.C.P. LYON 4662 – 36.

Dans une décla­ra­tion au « Monde » du 24 sep­tembre, la direc­tion essaie de jus­ti­fier son offen­sive. Elle invoque les néces­saires muta­tions tech­niques, l’ur­gence de sub­sti­tuer à la fabri­ca­tion de type clas­sique la fabri­ca­tion de la chaus­sure mou­lée, encore bien embryon­naire et bien aléa­toire à Sillans :

« Nous cher­chons donc à don­ner à ce per­son­nel de fabri­ca­tion clas­sique une pro­duc­ti­vi­té supé­rieure pour lui per­mettre de se recon­ver­tir dans les autres branches de notre fabri­ca­tion traditionnelle ».

Dans un tract, les ouvriers ont répondu :

« Alors pour­quoi se cre­ver au bou­lot et perdre son salaire si, par-des­sus le mar­ché, on se retrouve à la porte en guise de remerciement ? »

Aux cégé­tistes ortho­doxes qui reprochent aux délé­gués de ne pas avoir « orien­té cor­rec­te­ment » les ouvriers vers… des grèves tour­nantes, les délé­gués répondent :

« Nous appor­tons à la base le maxi­mum d’in­for­ma­tions et c’est elle qui décide ».

Et ils ajoutent :

« Eux et nous n’a­vons pas la même concep­tion de la démocratie ».

Le 24 sep­tembre, les ouvriers dis­cutent de nou­velles pro­po­si­tions patro­nales : amé­lio­ra­tion sub­stan­tielle de la grille des salaires et cer­taines garan­ties en ce qui concerne l’emploi.

Par 90 voix contre 36, les « pro­duc­tifs » décident la reprise du travail.

L’ac­tion directe a été payante. Mais devant l’in­ca­pa­ci­té des cen­trales C.G.T. mais aus­si C.F.D.T. à faire res­pec­ter l’ar­ticle 6 (avan­tages acquis de la conven­tion col­lec­tive natio­nale), et rela­ti­ve­ment iso­lés mal­gré les efforts du comi­té inter­syn­di­cal de base, les ouvriers ont dû accep­ter un compromis.

La lutte contre les cadences continue.

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