La Presse Anarchiste

Débat

Per­tur­ba­tions et plus encore confu­sion, au point que les réponses appor­tées par ces articles ne semblent pas d’une aveu­glante clarté.

Pour­tant une fois admise une posi­tion de base anti-État et anti-délé­ga­tion, on ne peut consi­dé­rer le RÉSULTAT d’une élec­tion que comme pure­ment anecdotique.

Ce qui est impor­tant, c’est la situa­tion élec­to­rale. Elle s’im­pose à nous comme la pluie, nous pou­vons l’i­gno­rer ou ten­ter d’en tirer par­ti mais non la nier.

Le pre­mier débat devrait donc por­ter sur ce point : le phé­no­mène est-il, oui ou non, exploi­table. On peut esti­mer que non. Parce que les élec­tions sont, en effet, une for­mi­dable machine de dépo­li­ti­sa­tion. Parce que ce serait entrer dans le sys­tème ou encore par crainte des confu­sions voir des com­pro­mis­sions. Il faut cepen­dant recon­naître que pen­dant la cam­pagne, le public dans son ensemble est sen­si­bi­li­sé aux ques­tions poli­tiques, que l’en­semble du per­son­nel poli­tique est contraint de mon­ter en ligne aug­men­tant ain­si sa vul­né­ra­bi­li­té. Enfin il est indis­cu­table que ce peut être l’oc­ca­sion d’un cer­tain « détour­ne­ment des mass-média du capi­tal ». Contes­ter cela en citant Kri­vine c’est condam­ner La Lan­terne Noire en citant Minute.

Il semble donc qu’il soit pos­sible de tirer autre chose des élec­tions que notre per­tur­ba­tion. Le pro­blème qui se pose alors, notre atti­tude envers tel ou tel can­di­dat est d’ordre pure­ment tac­tique. Peu nous chaut que notre action risque de favo­ri­ser dans l’im­mé­diat la « droite » ou la « gauche », le résul­tat élec­to­ral importe peu. La ques­tion est de choi­sir une atti­tude qui favo­rise notre tra­vail réel, c’est-à-dire la dif­fu­sion de nos idées.

Ce tra­vail de dif­fu­sion a mal­heu­reu­se­ment ten­dance à se faire en cir­cuit qua­si fer­mé. On parle tou­jours de « démas­quer », « démys­ti­fier », ce qui implique en fait comme cible les mili­tants et sym­pa­thi­sants des autres groupes et orga­ni­sa­tions, peut-être 5 % de la popu­la­tion. Celle-ci est beau­coup plus alié­née que mys­ti­fiée. Notons au pas­sage que cette atti­tude est par­fai­te­ment logique chez cer­tains. Pour eux il faut « ani­mer les masses » et sur­tout pas de masses animées.

Cette ten­dance n’é­pargne pas les liber­taires, il semble que Gil­berte, par exemple, se pas­sionne pour les décla­ra­tions de Cohn-Ben­dit. Kri­vine, Seguy, voire Levy Leblond, alors qu’il vau­drait sans doute mieux pen­ser aux moyens de semer le doute et la réflexion dans l’es­prit de gens qui ont sur­tout enten­du par­ler de Pou­li­dor. Le plus iro­nique c’est que si on peut en quelques mois fabri­quer un hon­nête sta­li­nien à par­tir d’un Dupont cou­rant, quinze années ne seront pas de trop pour le rame­ner à une pen­sée plus saine.

Dans ces condi­tions on ne voit pas trop d’in­té­rêt à atta­quer sys­té­ma­ti­que­ment la « gauche » sur­tout qu’elle n’est pas au pou­voir. Et ce d’au­tant plus que :

  • Il est géné­ra­le­ment plus facile de « faire pas­ser » un thème positif.
  • Il faut par­ler aux gens de ce qui les touche, il n’est pas évident que même la masse des élec­teurs com­mu­nistes se pas­sionnent pour Marchais.
  • Toute attaque entraîne riposte. Est-il vrai­ment effi­cace de polé­mi­quer à lon­gueur d’an­née avec les mêmes ennemis ?

En guise de conclu­sion, ne serait-il pas rai­son­nable de pen­ser d’a­bord au conte­nu de notre mes­sage, ensuite de nous pré­oc­cu­per de ses des­ti­na­taires afin de défi­nir forme et moyens plu­tôt que de nous ame­ner à ten­ter d’é­ta­blir un clas­se­ment par ordre de noci­vi­té crois­sante entre les dif­fé­rentes sous-espèces d’autoritaires ?

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