La Presse Anarchiste

La science et l’anarchisme

(Suite)

L’homme a‑t-il vécu dans la période ter­tiaire ? Nous ne pos­sé­dons pas assez de preuves cer­taines pour l’affirmer. Mais ce que nous pou­vons assu­rer c’est que dès le début de la période qua­ter­naire, l’existence de l’homme est indis­cu­ta­ble­ment démontrée.

La pré­sence d’ossements humains et de dif­fé­rents silex tra­vaillés, taillés, est une preuve irré­fu­table de cette existence.

Il n’y a pas même un siècle que les décou­vertes de ces osse­ments ont été faites. C’est pour­quoi beau­coup d’individus ignorent encore leur loin­taine ori­gine et la misé­rable exis­tence de leurs pre­miers ancêtres, les pre­miers hommes.

L’homme qua­ter­naire a été contem­po­rain du mam­mouth et de l’ours des cavernes.

On trouve ses osse­ments avec les ves­tiges de ces ani­maux. Ceci est une preuve indis­cu­table, et on trouve avec ses osse­ments des silex qui n’ont pu être gros­siè­re­ment taillés que par l’homme qui avait déjà un cer­veau plus déve­lop­pé, qui conce­vait, ima­gi­nait, inven­tait, et une main qui exé­cu­tait mal­adroi­te­ment, mais qui exé­cu­tait quand même la concep­tion sim­pliste du cerveau.

C’est en 1836 que Bou­cher de Perthes ayant trou­vé des silex taillés mêlés à des osse­ments de mam­mouths, près d’Abbeville, attri­bua la taille de ces silex au tra­vail de l’homme.

On trouve sur­tout ces ves­tiges de l’époque pré­his­to­rique, dans des cavernes à large ouver­ture qui se trouvent aujourd’hui à un niveau bien supé­rieur aux eaux actuelles, mais qui à l’époque étaient à peine plus éle­vées que les eaux et qui ont été com­blées en par­tie à ce moment par le limon, les cailloux appor­tés par les inon­da­tions fréquentes.

On trouve dans ce limon, au milieu des cailloux, les osse­ments de nos loin­tains ancêtres, mêlés à ceux des Mammouths.

Ces cavernes ont dû être de véri­tables char­niers. Y existent simul­ta­né­ment des osse­ments de gros car­nas­siers qui les habi­taient et d’herbivores qu’ils rap­por­taient de leurs chasses comme pâture.

L’homme ensuite, en chas­sa les car­nas­siers grâce à ses armes en silex, et se ser­vit de ces cavernes comme abri.

On trouve aus­si, par­mi ces osse­ments, cer­tains d’entre eux qui conte­naient de la moelle fen­dus en long, pour en extraire cette moelle.

Bien mieux, on trouve des os cal­ci­nés. L’homme de cette espèce connais­sait donc le feu. Sans doute l’avait-il trou­vé en aper­ce­vant les étin­celles qui se pro­dui­saient en frap­pant deux mor­ceaux de silex l’un contre l’autre.

De plus dans ces cavernes, l’Homme a lais­sé d’autres traces de son pas­sage. On trouve, des­si­nées dans la pierre, taillées avec le silex les gra­vures des ani­maux de son époque, images de Mam­mouths, d’Ours des Cavernes, de Rennes…

L’homme du début du qua­ter­naire a déjà des aspi­ra­tions artis­tiques. Il veut fixer ce qu’il voit, il pense à ses des­cen­dants. Comme il ne connaît sans doute ni le lan­gage, ni l’écriture il marque, son his­toire par la repré­sen­ta­tion même de ce qu’il voit et de ce qu’il est.

Car dans cer­taines cavernes on trouve la repro­duc­tion, les por­traits des hommes de l’époque.

Beau­coup de cavernes ont été étu­diées : celle de la Made­leine dans la val­lée de la Vézère, celle de Gre­nelle, celle de Cro-Magnon (Dor­dogne). Dans ces trois cavernes, et dans beau­coup d’autres en Europe, on a trou­vé des crânes iden­tiques d’hommes. On a dési­gné cette race sous le nom de race de Cro-Magnon où fut trou­vé le pre­mier crâne bien conservé.

Cette race de Cro-Magnon a vécu pen­dant l’âge du Mam­mouth, puis l’âge du Renne et jusqu’à l’âge de la pierre polie.

Dans d’autres cavernes, à Canns­tadt, à Néan­der­thal, à Denise (Haute-Loire), à Spy près de Namur on a trou­vé d’autres crânes plus anciens que ceux de Cro-Magnon, c’est la race de Cannstadt…

Cette race est de petite taille, la tête est volu­mi­neuse, les membres anté­rieurs courts, les mains fortes, les pieds grands. Le front est bas et fuyant, la calotte crâ­nienne est apla­tie, la cavi­té crâ­nienne est réduite, l’orbite de l’œil est cir­cu­laire, les arcades sour­ci­lières énormes, la mâchoire infé­rieure est ren­trée. Cette race a dis­pa­ru avec le Mam­mouth. C’est la plus ancienne race dont on ait trou­vé des vestiges.

La race de Cro-Magnon est plus récente, elle a exis­té pen­dant l’âge du Renne et jusqu’à la pierre polie. La cavi­té crâ­nienne est plus grande, le front plus éle­vé, les arcades sour­ci­lières moins, grosses, les orbites des yeux plus larges que hautes, la mâchoire infé­rieure est pro­émi­nente, les bras sont plus longs, les mains sont plus fines et les pieds plus petits.

On appelle temps pré­his­to­riques, les temps qui pré­cèdent ceux où l’histoire a été écrite ou rapportée.

On peut les par­ta­ger en plu­sieurs périodes, soit que l’on consi­dère la faune :

1re période ou âge de l’elephas antiquus. 

2e période ou âge du Mammouth. 

3e période ou âge du Renne. 

soit que l’on consi­dère le tra­vail humain, l’industrie humaine :

1° âge de la pierre taillée. 

2° âge de la pierre polie. 

3° âge du bronze. 

4° âge du fer.

Ceci pour nos régions ; (l’humanité a pro­gres­sé par régions).

Ain­si aujourd’hui il y a encore cer­taines peu­plades sau­vages des îles voi­sines de l’Australie qui se servent de la pierre taillée.

En Poly­né­sie, et Néo-Calé­do­nie, les indi­gènes se servent de la pierre polie.

Il en était de même autre­fois. Lorsque dans nos contrées on en était encore au silex, la civi­li­sa­tion égyp­tienne et les civi­li­sa­tions orien­tales jetaient le plus vif éclat.

Entre la pierre taillée et la pierre polie, il y eut aus­si des tran­si­tions ; entre les autres âges éga­le­ment. La clas­si­fi­ca­tion indi­quée est donc toute rela­tive (du reste, la théo­rie de la rela­ti­vi­té de tous les phé­no­mènes, trouve tous les jours plus de par­ti­sans), mais elle per­met de suivre faci­le­ment la marche de l’humanité dans ses pre­miers efforts de pro­grès, de révolte contre la nature, de libération.

Âge de la pierre taillée ou paléolithique

Tour se défendre des grands car­nas­siers, ou pour chas­ser, l’homme se ser­vait, à cette époque, de mor­ceaux de silex qu’il taillait gros­siè­re­ment en frap­pant deux mor­ceaux l’un sur l’autre, il se confec­tion­nait ain­si des haches gros­sières et des couteaux.

Sans doute, en frap­pant le silex, des étin­celles jaillirent, et l’homme pré­his­to­rique a ain­si trou­vé le secret du feu.

Pen­dant la période qua­ter­naire, l’homme pré­his­to­rique évo­lue, il pro­gresse. Ceci est mis en évi­dence par les dif­fé­rentes couches du ter­rain qua­ter­naire. On peut suivre, de cette façon, la marche de l’industrie humaine.

Pen­dant la phase chellëenne, — ain­si appe­lée parce que c’est à Chelles (Seine et Marne), puis ensuite à Saint-Acheul près d’.\miens, qu’ont été trou­vés les silex taillés gros­siè­re­ment — ils sont arron­dis d’un côté et poin­tus de l’autre. L’homme vivait misé­rable et nu sur le bord des rivières. C’est l’époque de l’Eléphas antiquus.

Pen­dant la phase mous­té­rienne, — ain­si appe­lée parce que c’est dans la grotte de Mous­tiers (Dor­dogne), qu’on a trou­vé les outils de cette époque, — un pro­grès s’est réa­li­sé. On ren­contre des scies, des pointes, des racloirs. Le cli­mat, à ce moment, est d’une rigueur extrême, l’homme pour se mettre à l’abri du froid, doit s’emparer de force des cavernes occu­pées par les car­nas­siers. Il les tue, mange leur chair et se vêtit de leurs dépouilles. C’est l’époque du Mammouth.

Pen­dant la phase solu­tréenne — ain­si appe­lée parce que c’est à Solu­tré (Saône-et-Loire) qu’on été recueillis les outils de ce temps-là, — la taille du silex est déjà très per­fec­tion­née. On trouve des flèches à cran, des hame­çons. C’est l’époque du Renne.

Pen­dant la phase mag­da­lé­nienne, — ain­si appe­lée parce que c’est dans la caverne de la Made­leine (Dor­dogne), qu’on en a trou­vé les preuves, — l’homme sculpte, fait de la gra­vure sur les os, l’ivoire et la corne des ani­maux. Il confec­tionne des cuillers, des aiguilles, des harpons.

Il des­sine sut les os et les bois du Renne, sur l’ivoire des ani­maux qui vivent près de lui : Mam­mouth, Ours des Cavernes, Rennes.

La caverne de Mas d’Azil dans les Pyré­nées, sui­vant la pro­fon­deur des couches, montre que le pro­grès artis­tique com­men­çait à cette époque.

On trouve ain­si 5 couches distinctes :

Dans la couche la plus pro­fonde : gra­vures simples et à harpons.

Dans la couche plus éle­vée : gra­vures simples sans harpons.

Dans la couche supé­rieure : gra­vures à tours découpés.

Dans la couche plus rap­pro­chée du sol ; sculp­tures en bas-relief.

Enfin dans la der­nière couche : sculp­tures en ronde-bosse.

Selon les régions, tan­tôt ce sont les gra­vures d’animaux, tan­tôt ce sont celles des hommes qui prédominent.

Âge de la pierre polie ou néolithique

Cet âge marque un pro­grès sen­sible sur le pré­cé­dent, tout en étant rat­ta­ché à lui par encore beau­coup d’œuvres.

L’homme, en effet, polit la pierre, et est arri­vé à faire ses ins­tru­ments. On trouve des haches en pierre avec rem­pla­ce­ment du manche.

Les habi­ta­tions sur pilo­tis font leur appa­ri­tion. Il cultive un peu la terre, il y fait pous­ser du lin, du blé, de l’orge, du seigle.

Il com­mence à domes­ti­quer cer­taines espèces ani­males : l’âne, le chien, le bœuf.

Il construit des pote­ries, des vases. À cette époque com­mence l’ensevelissement des morts. Aupa­ra­vant, les morts étaient lais­sés sans sépul­ture. Depuis ce moment-là, on les enterre et on place sur l’endroit où ils se trouvent de grosses pierres, les dol­mens et les menhirs.

Ces pierres sont nom­breuses en Bre­tagne et en Angleterre.

[/​Léon Rou­get./​]

(À suivre.)

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