La Presse Anarchiste

Quelques extraits du « code de la famille »

Comme nous l’an­non­çons d’autre part, nous croyons inté­res­sant pour la docu­men­ta­tion de nos lec­teurs de repro­duire soit inté­gra­le­ment, soit dans leur sub­stance, quelques-uns des articles consti­tuant « le Code de la Famille », tel qu’il a été éta­bli par le décret-loi du 29 juillet 1939.

[|* * * *|]

De l’a­vor­te­ment

Art. 82. ― Qui­conque par ali­ments, breu­vages, médi­ca­ments, manœuvres, vio­lences et par tout autre moyen, aura pro­cu­ré ou ten­té de pro­cu­rer l’a­vor­te­ment d’une femme enceinte ou sup­po­sée enceinte, qu’elle y ait consen­ti ou non, sera puni d’un empri­son­ne­ment d’un an à cinq ans et d’une amende de cinq cents à dix mille francs.

L’emprisonnement sera de cinq à dix ans et l’a­mende de cinq mille francs à vingt mille francs s’il est éta­bli que le cou­pable s’est livré habi­tuel­le­ment aux actes visés au para­graphe précédent.

Sera punie d’un empri­son­ne­ment de six mois à deux ans et d’une amende de cent francs à deux mille francs la femme qui se sera pro­cu­ré l’a­vor­te­ment à elle-même ou aura ten­té de se le pro­cu­rer, ou qui aura consen­ti à faire usage des moyens à elle indi­qués ou admi­nis­trés à cet effet…

Cet article s’ap­plique éga­le­ment aux « méde­cins, offi­ciers de san­té sages-femmes, chi­rur­giens-den­tistes, phar­ma­ciens, étu­diants en méde­cine, étu­diants ou employés en phar­ma­cie, ban­da­gistes, her­bo­ristes, mar­chands d’ins­tru­ments de chi­rur­gie, infir­miers, infir­mières, mas­seurs, mas­seuses qui auront indi­qué, favo­ri­sé ou pra­ti­qué les moyens de se pro­cu­rer l’a­vor­te­ment ». Les peines pré­vues sont aggra­vées par l’in­ter­dic­tion pen­dant cinq ans au moins d’exer­cer leur pro­fes­sion ou l’in­ca­pa­ci­té absolue.

La. loi du 26 mars 1891 qui accor­dait le sur­sis n’est pas appli­cable aux condam­na­tions encou­rues en consé­quence de l’ar­ticle 82 ci-des­sus. Les cir­cons­tances atté­nuantes cessent d’être accordées.

Enfin, deux nou­velles condam­na­tions à deux ans au moins d’emprisonnement ou une nou­velle condam­na­tion à trois ans au moins dans l’es­pace de dix ans (durée de la pre­mière condam­na­tion non com­prise) com­portent la relégation

[|.….….….….….….….….….….….….…|]

art. 87 ― Lorsque la sau­ve­garde de la vie de la mère gra­ve­ment mena­cée exige soit une inter­ven­tion chi­rur­gi­cale, soit l’emploi d’une thé­ra­peu­tique sus­cep­tible d’en­traî­ner l’in­ter­rup­tion de la gros­sesse, le méde­cin trai­tant ou le chi­rur­gien devront obli­ga­toi­re­ment prendre l’a­vis de deux méde­cins consul­tants, dont l’un pris sur la liste des experts près le tri­bu­nal civil, qui, après exa­men et dis­cus­sion, attes­te­ront par écrit que la vie de la mère ne peut être sau­ve­gar­dée qu’au moyen d’une telle inter­ven­tion thé­ra­peu­tique. Un des exem­plaires de la consul­ta­tion sera remis à la malade, les deux autres conser­vés par les deux méde­cins consultants.

[|.….….….….….….….….….….….….…..|]

Art. 90. ― Un second para­graphe ajou­té a l’ar­ticle 378 du Code Pénal le trans­forme ain­si (article rela­tif au secret professionnel) :

Les méde­cins, chi­rur­giens et autres offi­ciers de san­té, ain­si que les phar­ma­ciens, les sages-femmes et toutes autres per­sonnes dépo­si­taires, par état ou pro­fes­sion, des secrets qu’on leur confie sans êtres tenues de dénon­cer les avor­te­ments jugés par eux cri­mi­nels dont ils ont eu connais­sance à l’oc­ca­sion de l’exer­cice de leur pro­fes­sion n’en­courent pas, s’ils les dénoncent, les peines rela­tives à la vio­la­tion du secret pro­fes­sion­nel ; cités en jus­tice pour une affaire d’a­vor­te­ment, ils demeurent libres de four­nir leur témoi­gnage à la jus­tice sans s’ex­po­ser à aucune peine.

[|.….….….….….….….….….….….….……|]

Art. 91. — Il est inter­dit à toutes per­sonnes, d’ex­po­ser, d’of­frir, de faire offrir, de vendre [[Sauf, bien enten­du, sous pres­crip­tion médi­cale.]], de mettre. en vente, de faire dis­tri­buer, de quelque manière que ce soit, les remèdes et sub­stances, sondes intra-uté­rines et autres objets ana­logues sus­cep­tibles de pro­vo­quer ou favo­ri­ser l’a­vor­te­ment, dont la liste sera éta­blie par un règle­ment d’ad­mi­nis­tra­tion publique.

Il est inter­dit aux fabri­cants et négo­ciants en appa­reils gyné­co­lo­giques de vendre les­dits appa­reils à des per­sonnes n’ap­par­te­nant pas et corps médi­cal ou ne fai­sant pas elles-mêmes pro­fes­sion, comme com­mer­çants paten­tés, de vendre des appa­reils chirurgicaux.

Les infrac­tions aux inter­dic­tions ci-des­sus sont punies de 3 mois à 2 ans de pri­son et d’une amende de 500 à 2.000 francs.

L’art. 94 pres­crit que l’ins­pec­teur dépar­te­men­tal d’hy­giène ou son adjoint et les com­mis­saires de police peuvent péné­trer à toute heure de jour et de nuit dans une cli­nique ou mai­son d’ac­cou­che­ment (publique ou pri­vée), pro­cé­der à toutes inves­ti­ga­tions, consta­ta­tions et enquêtes. — Le défaut d’au­to­ri­sa­tion ou l’i­nob­ser­va­tion des condi­tions d’au­to­ri­sa­tion est puni d’une amende de 1.000 à 5.000 francs ; en cas de réci­dive, empri­son­ne­ment de 6 jours à 2 ans, amende mini­mum de 2.000 francs et fer­me­ture obligatoire.

Natu­rel­le­ment, si on relève à l’en­contre de ces cli­niques ou mai­sons d’ac­cou­che­ment la per­pé­tra­tion de mesures abor­tives, enlè­ve­ment, sup­pres­sion, sub­sti­tu­tion ou sup­po­si­tion d’en­fant manœuvres anti­con­cep­tion­nelles, les res­pon­sables sont pas­sibles des peines que com­portent ces actes.

L’ou­trage aux bonnes mœurs

Art. 119 — Sera puni d’un empri­son­ne­ment d’un mois à deux ans et d’une amende de 100 francs à 5.000 francs qui conque aura :

Fabri­qué ou déte­nu, en vue d’en faire com­merce, dis­tri­bu­tion, loca­tion, affi­chage ou exposition ;

Impor­té ou fait impor­ter, expor­té ou fait expor­ter, trans­por­té ou fait trans­por­ter sciem­ment aux mêmes fins ;

Affi­ché, expo­sé ou pro­je­té aux regards du public ;

Ven­du, loué, mis en vente ou en loca­tion, même non publiquement ;

Offert, même à titre gra­tuit, même non publi­que­ment, sous quelque forme que ce soit, direc­te­ment ou par un moyen détourné ;

Dis­tri­bué ou remis, en vue de leur dis­tri­bu­tion par un moyen quelconque :

Tous impri­més, tous écrits, des­sins, affiches, gra­vures. pein­tures, pho­to­gra­phies, films ou cli­chés, matrices ou repro­duc­tions pho­no­gra­phiques, emblèmes, tous objets ou images contraires aux bonnes mœurs.

Art. 120. — Sera puni des mêmes peines :

Qui­conque aura fait entendre publi­que­ment des chants, cris ou dis­cours contraires aux bonnes mœurs ;

Qui­conque aura publi­que­ment atti­ré l’at­ten­tion sur une occa­sion de débauche ou aura publié une annonce ou une cor­res­pon­dance de ce genre, quelles qu’en soient les termes.

Art. 122. — Les peines seront por­tées au double si le délit a été com­mis envers un mineur.

L’art. 121 pré­voit qu’a défaut des gérants ou édi­teurs, l’au­teur, ou à son défaut les impri­meurs, dis­tri­bu­teurs et affi­cheurs seront pour­sui­vie comme auteurs prin­ci­paux. Lorsque l’au­teur n’est pas pour­sui­vi comme auteur prin­ci­pal, il sera pour­sui­vi comme complice.

De même seront pour­sui­vis comme com­plices ceux qui, par dons, pro­messes, menaces, abus d’au­to­ri­té ou de pou­voir, machi­na­tions ou arti­fices cou­pables, auront pro­vo­qué à la per­pé­tra­tion des faits incri­mi­nés ou don­né des ins­truc­tions dans ce sens. Idem ceux qui auront, avec connais­sance, aidé ou assis­té l’au­teur ou les auteurs de l’ac­tion dans les faits, qui l’au­ront pré­pa­rée ou faci­li­tée ou dans ceux qui l’au­ront consom­mée (art. 60 du Code Pénal). Les impor­ta­teurs, expor­ta­teurs ou tran­si­taires qui ont par­ti­ci­pé sciem­ment aux faits énon­cés par l’art. 119 ci-des­sus pour­ront être pour­sui­vis comme auteurs principaux.

L’art. 123 pré­voit qu’en cas de réci­dive, c’est-à-dire au cas de nou­velle condam­na­tion dans les cinq ans qui sui­vront celle encou­rue par appli­ca­tion des art. 119 à 122, la peine d’emprisonnement pour­ra être dou­blée et l’a­mende rele­vée jus­qu’à 50.000 fr.

L’art. 125 pres­crit que la pour­suite aura lieu devant le tri­bu­nal cor­rec­tion­nel, puis il ajoute :

« Tou­te­fois lorsque l’in­frac­tion aura été com­mise par la voie du livre, la pour­suite ne pour­ra être exer­cée qu’a­près avis d’une com­mis­sion spé­ciale dont la com­po­si­tion et le fonc­tion­ne­ment seront fixés par décret.

Les asso­cia­tions recon­nues d’u­ti­li­té publique et dont les sta­tuts pré­voient la défense de la mora­li­té publique pour­ront, si elles ont été agréées à cet effet par arrê­té du garde des Sceaux, ministre de la Jus­tice, et du ministre de l’In­té­rieur, exer­cer pour les infrac­tions pré­vues ci-des­sus les droits recon­nus à la par­tie civile par les articles 63, 64, 66, 67, 68 et 182 du Code d’Ins­truc­tion criminelle. »

C’est le fameux droit de cita­tion directe, dont il a été si sou­vent parlé.

[|* * * *|]

L’art. 126 donne aux offi­ciers de police judi­ciaire le pou­voir, avant toute pour­suite, de sai­sir les écrits, impri­més (autres que les livres), des­sins, gra­vures, dont un ou plu­sieurs exem­plaires auront été expo­sés aux regards du public et qui, par leur carac­tère contraire aux bonnes mœurs, pré­sen­te­raient un dan­ger immé­diat pour la mora­li­té publique. Ils pour­ront de même sai­sir, arra­cher, lacé­rer ou recou­vrir les affiches de même nature.

Même pou­voir de sai­sir à la fron­tière, avant toute pour­suite, les objets importés.

La Presse Anarchiste