Espagne
Dans toute la péninsule ibérique, la classe ouvrière, en conséquence des grèves et de « lock out », souffre horriblement de la faim. À cette misère vient se joindre une répression féroce, qui pousse le peuple à des actes de désespoir ; c’est ce qui constitue le terrorisme, suivant l’expression de la grande presse. Les attentats, contre les droits des gens commis par l’autorité gouvernementale, et ceux contre les représentants de la classe possédante ne se comptent plus. Pourtant, des hommes politiques, inspirés par de bons sentiments, font des efforts pour amener le gouvernement à une politique de détente et de réconciliation sociale. L’Espagne, affirment-ils, grâce à l’intransigeance patronale, marche à grands pas vers la ruine ; les patrons de la Catalogne, avec leur « lock out », ont ruiné la plus industrielle des provinces de la péninsule. Mais le gouvernement n’est pas libre de ses actions ; il est entièrement contrôlé par les « Juntas Militares de Defensa » — une camarilla militariste associée avec tous les éléments jésuites et réactionnaires, et qui rend impossible l’évolution de la vieille Espagne vers la démocratie moderne.
À Barcelone, les cours de justice viennent de prononcer quatre nouvelles sentences capitales contre de syndicalistes accusés d’avoir pris part au meurtre de deux gendarmes ; deux autres camarades, inculpés comme complices, ont été condamnés à la réclusion perpétuelle, et enfin trois autres ont été acquittés.
Une délégation parlementaire a rendu visite aux détenus syndicalistes à la prison de Barcelone, et leur a promis qu’ils seraient bientôt rendus à la liberté, et que le gouverneur actuel, qui s’est rendu si célèbre par son administration tyrannique, allait être relevé de ses fonctions. D’un autre côté, on affirme que le nouveau président du Conseil, señor Dato, serait opposé à ce que le comte de Salvatierra — le gouverneur en question — quitte le gouvernement de la province de Barcelone. Il affirme qu’il veut avant tout faire respecter l’autorité du gouvernement.
Très remarquable, la grève des médecins de la Mutualité Ouvrière, à Madrid. Cette association est affiliée à la Maison du Peuple. Les médecins de cette capitale, réunis en une assemblée extraordinaire, ont décidé de se solidariser avec leurs collègues de la Mutualité Ouvrière. À signaler, dans, cette même ville, une grève importante des boulangers, durant laquelle les syndicalistes ont fait preuve d’une énergie vraiment révolutionnaire.
Solidaridad Obrera, l’organe officiel de la Union Nacional de los Trabajadores, note avec plaisir ce geste de solidarité de la C.G.T. de France, protestant auprès du gouvernement espagnol contre le régime despotique adopté par son administration envers les syndicats ouvriers qui osent se dresser conte la coalition féodale des patrons. Cette protestation est suivie d’une menace de boycottage de toutes les marchandises venant ou à destination d’Espagne, dans le cas où il ne serait pas fait droit à cette protestation.
Australie
Le parti travailliste australien est sur le point de se réunir en un grand congrès. Parmi les questions qui figurent à son ordre du jour sont les suivantes : suspension de l’émigration jusqu’à ce que les anciens soldats soient définitivement établis ; vote obligatoire pour toutes les élections publiques ; suppression du travail le samedi et le dimanche !
On y discutera aussi différentes propositions concernant l’arbitrage obligatoire opposé à l’action directe. La puissante Fédération des Mineurs se déclare contre le fameux arbitrage, qui a déjà été expérimenté à ses dépens.
Indes britanniques
Dans le gouvernement de Bombay, douze mille cheminots se sont déclarés en grève ; ils réclament une augmentation de salaire.
Dans les centres du textile, une fédération ouvrière a été constituée ; elle demande, entre autres choses : la journée de dix heures, la suppression du travail de nuit pour les femmes et les enfants, la création d’inspectrices du travail pour tout ce qui concerne la femme et l’enfant, et enfin la reconnaissance des syndicats par les patrons.
Japon
Désormais, l’Empire du Mikado aura sa Ligue des Nations. Une section vient d’y être fondée, sous la présidence du baron Shibusawa, un capitaliste aux tendances philanthropiques. Le baron Sakatani et le docteur Soyeda, également deux philanthropes aux idées libérales, ont été nommés vice-présidents.
Portugal
La réaction « démocratique » semble dominer dans toute la République portugaise ; on n’y voit plus de manifestations bolcheviques, le gouvernement, par ses mesures draconiennes, les a rendu impossibles. Cependant, on signale quand même une grève générale des tramways à Lisbonne ; les grévistes, en plus d’une augmentation de salaires, demandent double paie pour le travail du dimanche.