La Presse Anarchiste

Dans la région

Lau­sanne. – Non contente de faire tra­vailler son per­son­nel au rabais, l’ad­mi­nis­tra­tion des Tram­ways Lau­san­nois, met­tant à pro­fit la sus­pen­sion de la « loi sur la durée du tra­vail dans les entre­prises de trans­ports », exploite ses employés dans toutes les règles de l’art.

Les jours de repos fixés en temps ordi­naire à un par semaine, sont dimi­nués aux employés régu­liers, pen­dant que les rem­pla­çants, payés à la jour­née, chôment.

Les amendes pour les plus infimes oublis, les « par­ti­ci­pa­tions aux frais » chaque fois qu’il y a ava­rie légère au maté­riel par la faute de l’employé (rien n’est plus facile à prou­ver), les « mises à pied » avec perte du salaire pour les fautes plus graves, pleuvent sur le per­son­nel comme la misère, ces temps-ci, sur les pauvres gens. Et le taux des rete­nues n’a pas sui­vi celui des salaires, alors que ceux-ci sont de 10 à 25 fr. infé­rieurs à ce qui nous était payé avant la guerre, le prix des amendes a aug­men­té. Nous n’a­vions pas d’a­mendes supé­rieures à 2 fr., nous en avons vu ces jours de 3 fr. ; on nous a même trou­vé de nou­veaux pré­textes à « sanctions ».

Les employés des T.L. auront-ils la patience d’at­tendre le retour à des « jours meilleurs » pour faire com­prendre à tous les petits poten­tats qui les grugent et les mènent à la prus­sienne que nous ne sommes pas en Rus­sie et que leurs « subor­don­nés » sont des hommes ?

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Chaux-de-Fonds. – Aujourd’­hui, 3 octobre, grande mani­fes­ta­tion contre la guerre, orga­ni­sée par le par­ti socia­liste. Pas mal de monde. Dans le cor­tège il y avait envi­ron une cen­taine de sol­dats en uni­forme ; on les a fêtés, comme de juste. Je me suis infli­gé un dis­cours de Pet­ta­vel, le pas­teur, et un de Gra­ber, le conseiller. natio­nal. Ils ont tous les deux les sym­pa­thies de la classe ouvrière d’ici.

Ce qui m’a plu, c’est qu’on n’a pas insul­té l’un ou l’autre des groupes bel­li­gé­rants ; on s’est éle­vé contre la guerre elle-même. Seule­ment on est res­té sur un ter­rain trop sen­ti­men­tal. Per­sonne n’a osé abor­der la ques­tion, c’est-à-dire que le salut ne peut être que dans l’in­ter­ven­tion des masses popu­laires, dans la révo­lu­tion. Car enfin, les rai­sons morales et sen­ti­men­tales contre la guerre ont exis­té depuis tous les temps, et ça n’a guère empê­ché que la guerre éclate, et ça n’empêchera pas davan­tage la pro­chaine guerre qui se trouve peut-être en germe dans celle-ci.

C’est curieux que l’on n’in­siste pas sur une des prin­ci­pales causes qui ont ren­du la guerre pos­sible : l’in­di­vi­dua­lisme for­ce­né des grands, et des petits aus­si, qui a empê­ché ceux-ci de s’en­tendre pour la lutte.

Pet­ta­vel a accu­sé le maté­ria­lisme. Il n’a pas éclair­ci la signi­fi­ca­tion de ce mot. Il y en a qui l’in­ter­prètent dans le sens manque d’i­déa­lisme et d’autres qui lui donnent son vrai sens, anti­chré­tien et rationaliste.

C’est égal, on a beau sou­hai­ter une entente quel­conque, c’est bou­gre­ment pénible de s’a­co­qui­ner avec des per­son­nages aus­si peu nets. Que veulent-ils exac­te­ment ? On ne sait. Et alors pour­quoi cau­ser ? C’est dom­mage qu’ils sachent si bien le fran­çais et pos­sèdent comme ça l’o­reille du peuple. Des mots, au fond. On n’a pas vibré, c’est vrai, tout s’est pas­sé comme à un prêche quel­conque. Des momies qui par­laient à d’autres momies. Pet­ta­vel est un sire déplai­sant à prio­ri, car il a fait des « bons mots » du com­men­ce­ment à la fin.

Je me demande si le sujet doit se prê­ter comme ça à des jon­gle­ries ora­toires. Bref, pas d’i­dées et pas de pas­sion. Renou­veau ? Rien du tout. Pié­ti­ne­ment sur place.

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