La Presse Anarchiste

Chronique internationale

Comme nous l’avons déjà fait dans un numé­ro anté­rieur avec le texte de cama­rades aux USA (extrait du bul­le­tin inté­rieur de la « Liber­ta­rian League », NR n° 20), nous publions aujourd’hui un « texte de tra­vail », éma­nant d’une orga­ni­sa­tion anar­chiste à l’étranger. Il s’agit ici d’un édi­to­rial tiré du bul­le­tin « The Echo », de la FA japo­naise, des­ti­né aux rela­tions exté­rieures. Il est paru en sep­tembre 1962 et tra­duit de l’anglais. Nous espé­rons pré­sen­ter, à chaque fois que cela sera pos­sible, les études de mili­tants d’autres régions, à titre de docu­ments, afin de nous faire une idée plus com­plète du tra­vail anar­chiste dans le monde.

Positions des anarchistes et commentaires

Nous devons prendre un nouveau départ – réexamen de la FAJ.

La Fédé­ra­tion Anar­chiste Japo­naise est en grande dif­fi­cul­té. La stag­na­tion du mou­ve­ment pen­dant les dix der­nières années a cau­sé, par­mi ses membres, de l’impatience et de l’épuisement. Je ne peux décrire que briè­ve­ment les causes de cette stag­na­tion. On peut dire que le défaut d’organisation, l’imprécision d’une théo­rie cen­trale de l’anarchisme, l’inaction des indi­vi­dus et d’autres condi­tions variées, se trouvent mélan­gés. Mais je pense que l’imprécision de la théo­rie cen­trale ne réside pas tant dans le défaut de l’anarchisme en soi que dans l’inaction de cha­cun. La Fédé­ra­tion a été débor­dée par l’atmosphère de manque de confiance et de vigueur, quoique quelques cama­rades fassent d’ardents efforts pour res­ti­tuer celles-ci. Il est inutile de faire davan­tage d’efforts pour appe­ler à coopé­rer, ceux qui ont per­du la pas­sion pour l’anarchisme. Cepen­dant, nous qui croyons très fer­me­ment à l’anarchisme, nous devons prendre un nou­veau départ.

L’anarchisme est très exac­te­ment iso­lé et déser­té au Japon. En consé­quence de quoi, cer­tains membres ont même dit : « L’anarchisme est une pen­sée dépas­sée et a rem­pli sa mis­sion his­to­rique. Nous devons réexa­mi­ner l’anarchisme en tant que socia­lisme libre ». J’aimerais leur deman­der : « Quand l’anarchisme s’est-il déchar­gé de sa mis­sion his­to­rique ? » et « quelle est la mis­sion his­to­rique de l’anarchisme ? ». Il est vrai que la pen­sée anar­chiste n’est pas adap­tée à notre époque. Mais cela ne signi­fie point la néga­tion de l’anarchisme lui-même. Nous devons nier l’attitude de simple néga­tion et de des­truc­tion, et ten­ter de créer une image construc­tive. Nous devons étu­dier com­ment adap­ter les prin­cipes de l’anarchisme à l’époque pré­sente. Nous pour­rions chan­ger le nom de l’anarchisme si nous n’en étions pas satis­faits. Car l’anarchisme est un socia­lisme libre par nature. Nous ne pou­vons cepen­dant modi­fier la véri­té. En domi­nant la véri­té uni­ver­selle, la règle de la nature et le véri­table carac­tère de la créa­ture humaine, nous arri­vons inévi­ta­ble­ment à l’anarchisme en tant que prin­cipe phi­lo­so­phique, science sociale et théo­rie révolutionnaire.

La FAJ n’a pas qu’une orga­ni­sa­tion syn­di­cale comme moyen de ral­lie­ment. Ayant tra­vaillé dure­ment en vue d’organiser des syn­di­cats, nous n’avons pu en orga­ni­ser seule­ment un. Nous ne serons pas capables de l’organiser avec notre pou­voir faible et limi­té qui va en s’affaiblissant. Les grandes dis­cus­sions sans rap­port avec les condi­tions réelles sont creuses. Étant pres­sés de mettre une théo­rie en action, nous ne pen­sions plus aux ques­tions fon­da­men­tales ; autre­ment dit, une révo­lu­tion doit com­men­cer dans le cœur des hommes. On peut dire sans se trom­per que la révo­lu­tion de notre esprit est quelque chose d’incomplet. Quelques-uns d’entre nous n’ont pen­sé qu’à une révo­lu­tion sociale, parce que beau­coup rêvent d’une révo­lu­tion. Ils ont pu éclai­rer l’anarchisme au moyen de ten­ta­tive sur le plan de la révo­lu­tion sociale. Nous devrions avoir étu­dié beau­coup plus l’anarchisme et expo­ser la véri­té. Car la véri­té implique tou­jours la révolution.

Nous avons négli­gé ce fait dans les mou­ve­ments pas­sés. Nous, qui n’avons pas de syn­di­cat ouvrier dans la pra­tique, nous devrions trou­ver un nou­veau che­min hors des sen­tiers bat­tus et avan­cer fermement.

La véri­té a les fac­teurs les plus anciens et les plus modernes parce qu’elle est uni­ver­selle. En uti­li­sant le fac­teur pri­mi­tif de l’anarchisme, nous devons com­men­cer par faire appel à la sen­si­bi­li­té des hommes et réveiller leurs ins­tincts. Alors, leur rai­son, éblouie par l’habitude, et leur intel­li­gence, anky­lo­sée par une mora­li­té pour­rie, se réveille­ront vers le droit che­min. L’appel à un mou­ve­ment pra­tique qui serait idéo­lo­gique et abs­trait, est une théo­rie tout à fait vide, vu la limi­ta­tion de nos forces. S’il en va ain­si, la pen­sée anar­chique man­que­ra de plus en plus d’adéquation à l’époque pré­sente. C’est une méthode effi­cace que de don­ner une grande impor­tance à la pro­pa­ga­tion de la pen­sée et de la culture. Autre­ment dit, nous devons prendre un nou­veau départ, départ depuis le commencement.

Aux cama­rades d’outremer : nous sou­hai­tons rece­voir leurs sug­ges­tions sur nos futurs mouvements. 

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