Depuis longtemps, depuis toujours peut-être, il existe sur terre un terrible fléau : la guerre.
Que de flots de sang versés, que de forces perdues pour satisfaire l’orgueil et la vanité de quelques individus, ou étouffer dans l’œuf le germe des révolutions libératrices.
Un monarque veut-il agrandir son territoire ? Rien de plus simple ; il provoque, et par mille incidents de frontière ou autre, et plusieurs peuples vont s’entre-tuer. Une fois ces peuples se sont pillés et entr’égorgés il se fait donner rançon par l’ennemi vaincu.
Le peuple commence-t-il à sentir sa misère, fait-il mine de se révolter, vite la guerre sauveuse de bourgeois !…
Et tout cela se fait au nom de la patrie dont nous, les producteurs de toutes les richesses, ne possédons pas un pouce.
À quoi sert d’être patriote ? Ais-je une propriété, un champ ou des obligations à garder et à défendre ? Non, rien de tout cela.
Ma patrie est le pays où je mange, où je suis heureux. Que peut me faire d’être Prussien, Italien, Français, Belge, Anglais ou Turc ?
Ne sommes-nous pas tous enfants de la terre et par conséquent frères ?
Parce que tel homme sera né au-delà du Rhin ou des Alpes, il faudra que je le méprise ?
Est-ce que le banquier français est patriote ? Lui qui envoie son argent à l’étranger parce qu’il aura plus de bénéfices ?
Est-ce que l’industriel qui fait venir des produits ou des ouvriers d’Allemagne est patriote ?
Sont-ils patriotes les gouvernants qui ne respectent pas la patrie des peuples faibles, et que, pour écouler le trop plein des produits européens, envoient piller et assassiner les Tonkinois, les Dahomiens, les Tunisiens, sans que ceux-ci ne leur aient fait aucun mal ?
Non ! Non !
À bas la guerre, la Patrie ! Vive l’humanité. L’univers, notre patrie à tous !
Vive l’union et la fraternité des peuples.
[/H.
Paris, 19/3/92/]