La Presse Anarchiste

Informations syndicalistes libertaires

    Après dis­cus­sion sys­té­ma­tique au sein de la Fédé­ra­tion des mineurs et ouvriers métal­lur­gistes, de la Com­mis­sion Admi­nis­tra­tive et du Comi­té Cen­tral (orga­nisme des délé­gués régio­naux) du mou­ve­ment syn­di­ca­liste liber­taire sué­dois, la Fédé­ra­tion ci-des­sus citée et la SAC, ensemble, ont adres­sé un mémoire au gou­ver­ne­ment sué­dois. Il s’a­git des mines de fer à Kiru­na, au Nord du pays, contrô­lées par la socié­té LKAB. Jus­qu’à main­te­nant, la moi­tié des actions de cette com­pa­gnie étaient aux mains de l’É­tat sué­dois, tan­dis que le reste appar­te­nait à une com­pa­gnie minière pri­vée, la TGO. Le par­le­ment sué­dois (le riks­dag) vient de prendre une déci­sion sur l’é­ven­tuel rachat par l’É­tat des actions pos­sé­dées par la TGO, c’est-à-dire la natio­na­li­sa­tion des mines du Nord. Après avoir publié, dans nos infor­ma­tions, plu­sieurs articles de Dag­stid­nin­gen Arbe­ta­ren sur ce pro­blème, nous tenons à infor­mer nos lec­teurs aus­si sur la posi­tion offi­cielle de l’or­ga­ni­sa­tion qui trouve son expres­sion dans le docu­ment suivant : 

Au Gouvernement

    Si les orga­ni­sa­tions sous­si­gnées ont bien com­pris, la déci­sion prise par le riks­da­gen le 25 mai 1955 sur la ques­tion du mine­rai est de carac­tère condi­tion­nel : elle peut conduire au rachat par l’É­tat ou à une nou­velle conven­tion entre l’É­tat et la TGO à pro­pos d’une col­la­bo­ra­tion conti­nuée dans l’ex­ploi­ta­tion des mines du Nord. L’in­ten­tion de la réso­lu­tion prise est en tout cas qu’elle doit ser­vir pour défendre cer­tains inté­rêts bien défi­nis. Dans ce cas il devient néces­saire pour l’É­tat de consi­dé­rer deux formes dif­fé­rentes d’ad­mi­nis­tra­tion d’en­tre­prise, et de choi­sir une de celles-ci : une admi­nis­tra­tion entière par l’É­tat ou une influence accrue de l’É­tat au sein d’une admi­nis­tra­tion com­mune avec la TGO. Mais puis­qu’il est néces­saire d’exa­mi­ner en tout cas les formes admi­nis­tra­tives, un chan­ge­ment étant inévi­table dans les cir­cons­tances don­nées, il serait pos­sible d’exa­mi­ner, peut-être aus­si d’autres alter­na­tives que celles que nous venons de citer. Il est notre inten­tion de pré­sen­ter, dans ce mémoire, quelques autres alter­na­tives dans la ques­tion des formes admi­nis­tra­tives pour les entre­prises minières du Nord. 

    La déci­sion sur le rachat dépen­dra cer­tai­ne­ment de l’at­ti­tude de la TGO. Si celle-ci n’ac­cepte pas les demandes mini­mums de l’É­tat quant à son influence et sa codé­ter­mi­na­tion dans l’en­tre­prise de la LKAB il n’y aura aucune sor­tie ― le rachat des actions de la TGO sera la consé­quence inévi­table. Mais si l’on sup­pose une conven­tion sur la col­la­bo­ra­tion conti­nuée entre l’É­tat et la TGO ― une pos­si­bi­li­té qui ne semble pas tout-à-fait exclue ― il se pro­duit une nou­velle situa­tion : l’É­tat qui a aug­men­té son pou­voir pour défendre cer­tains inté­rêts sociaux et ouvriers, donne à la com­pa­gnie une influence très grande dans l’en­tre­prise, tan­dis que les ouvriers et les employés de celle-ci res­tent com­plè­te­ment en marge. 

    Mais cet état de choses n’est pas démo­cra­tique, et il est à peine oppor­tun en pen­sant aux inté­rêts qui doivent être défen­dus dans ce cas. Mais puisque toute forme de coges­tion ouvrière cer­tai­ne­ment influen­ce­rait la posi­tion de la TGO de façon que celle-ci se reti­re­rait et accep­te­rait le rachat de ses actions, il ne vaut pas la peine de dis­cu­ter cette ques­tion. Au cas d’une nou­velle conven­tion sur une col­la­bo­ra­tion future entre l’É­tat et la TGO, les ouvriers et les employés de la LKAB devront reprendre eux-mêmes la ques­tion d’une autre forme de démo­cra­tie au sein de l’entreprise. 

    Mais au cas où l’É­tat pro­cède au rachat des actions de la TGO ― ce qui est pro­bable ― il se trou­ve­ra devant la néces­si­té d’or­ga­ni­ser une nou­velle admi­nis­tra­tion propre ou de cher­cher d’autres inté­res­sés ou col­la­bo­ra­teurs que la TGO, et pour ce cas nous vou­lons pré­sen­ter cer­tains points de vue ou for­mu­ler quelques demandes. 

    Quelques-uns des motifs prin­ci­paux qui ont contri­bué à la pro­po­si­tion du gou­ver­ne­ment et à la déci­sion du riks­dag de rache­ter les actions de la TGO, peuvent être résu­més de la façon sui­vante : 1. On était de l’o­pi­nion que des matières pre­mières de cette impor­tance doivent être contrô­lées par la com­mu­nau­té. Cette idée a déjà une vieille tra­di­tion, et il est pro­bable que la pos­si­bi­li­té d’une exploi­ta­tion future de l’éner­gie ato­mique lui a don­né une nou­velle actua­li­té. 2. Puisque le mine­rai dis­po­nible dimi­nue­ra à l’a­ve­nir, on vou­drait créer des condi­tions de sûre­té sociale pour les mineurs du Nord et toute la popu­la­tion de la région minière. 

    La pos­si­bi­li­té d’aug­men­ter les reve­nus de l’É­tat par l’ex­ploi­ta­tion des mines a aus­si joué son rôle pour cette déci­sion. La com­mis­sion d’en­quête a dési­gné le plan de rachat comme « une bonne affaire du point de vue éco­no­mique ». Mais puisque le rachat mon­te­rait à plus d’un mil­liard de cou­ronnes et en vue du fait que le Gou­ver­ne­ment paraît être prêt à lais­ser la TGO gar­der sa posi­tion éco­no­mique dans l’en­tre­prise de la LKAB, sous cer­taines condi­tions, on peut à peine sup­po­ser que le motif d’un pro­fit éco­no­mique direct pour l’É­tat ait été un des motifs prin­ci­paux pour la déci­sion en faveur du rachat. 

    Après ce rap­port concen­tré sur les faits essen­tiels qui ont joué leur rôle pour la déci­sion du rachat et l’or­ga­ni­sa­tion d’une admi­nis­tra­tion miniers de l’É­tat, il nous semble néces­saire de citer aus­si cer­taines par­ties de la cri­tique qui a été pré­sen­tée comme contre la pro­po­si­tion et la déci­sion prise, dans une série de décla­ra­tions deman­dées par l’É­tat à dif­fé­rentes orga­ni­sa­tions inté­res­sées ou d’autre façon. La TGO elle-même a renon­cé à se pro­non­cer direc­te­ment en faveur ou contre le rachat, d’une façon offi­cielle. Mais en réa­li­té la TGO, tous les pro­prié­taires d’ac­tions direc­te­ment inté­res­sés, et tous les autres qui défendent le prin­cipe de la pro­prié­té pri­vée et de l’en­tre­prise libre, ont com­bat­tu éner­gi­que­ment l’i­dée du rachat par l’É­tat. Cette cri­tique doit peut-être être consi­dé­rée d’un point de vue spé­cial parce qu’elle émane d’élé­ments pri­vés direc­te­ment inté­res­sés à l’en­tre­prise dont les actions doivent être rache­tées, ou d’une doc­trine poli­tique qui a démon­tré beau­coup de fois qu’elle tend à s’op­po­ser aux inté­rêts de la com­mu­nau­té, au moins au sens que ces inté­rêts sont inter­pré­tés par des grands groupes de citoyens. Mais dans la mesure que la cri­tique, aus­si de ce côté, ait expri­mé l’i­dée que la crois­sance du pou­voir de l’É­tat pour­rait deve­nir dan­ge­reux pour les inté­rêts popu­laires il serait convé­nient de lui prê­ter attention. 

    Dans un cer­tain degré, les hési­ta­tions expri­mées par les caté­go­ries que nous venons de citer sont iden­tiques à celles qui ont été pro­non­cées par les mineurs et d’autres per­sonnes qui ne par­tagent pas les inté­rêts éco­no­miques de la com­pa­gnie et qui n’ont pas de rai­sons de prin­cipe pour défendre la forme de l’en­tre­prise privée. 

    La décla­ra­tion du syn­di­cat des mineurs est la plus inté­res­sante et la plus impor­tante à ce sujet. Le comi­té direc­teur presque una­nime de cette orga­ni­sa­tion, appuyé par les mili­tants actifs et diri­geants dans toutes les sec­tions, ont mani­fes­té que la consti­tu­tion d’une admi­nis­tra­tion minière par l’É­tat ne peut pas favo­ri­ser les inté­rêts des ouvriers. 

    En par­tant de cette décla­ra­tion du syn­di­cat des mineurs, on peut consta­ter que la consti­tu­tion d’une admi­nis­tra­tion d’É­tat pour les mines sera vue avec des sen­ti­ments scep­tiques et des doutes de la part des mineurs eux-mêmes. Des conver­sa­tions que nous avons menées avec beau­coup de mineurs, nous ont confir­més dans cette opi­nion. Nous pou­vons ajou­ter que la ten­dance syn­di­ca­liste liber­taire rela­ti­ve­ment forte chez les mineurs, s’i­den­ti­fie avec le syn­di­cat des mineurs dans la ques­tion du refus d’une admi­nis­tra­tion des mines par l’État. 

    Toute la cri­tique contre le pro­jet de rachat que nous venons de citer peut être résu­mée en disant que les ouvriers mineurs plus direc­te­ment inté­res­sés, pour des rai­sons com­pré­hen­sibles et pra­tiques, main­tiennent une atti­tude néga­tive quant à l’ad­mi­nis­tra­tion des mines par l’É­tat, et que des hési­ta­tions assez géné­rales se mani­festent chez le public dans tous le pays qui craint que le contrôle de l’É­tat sur des res­sources pro­duc­tives tel­le­ment impor­tantes peut résul­ter dans une menace contre cer­taines valeurs de liber­té de grande trans­cen­dance sociale. 

    Mais pour arri­ver à une inter­pré­ta­tion aus­si objec­tive que pos­sible de la situa­tion réelle il faut com­prendre que la méfiance contre l’in­ter­ven­tion de l’É­tat non seule­ment chez les mineurs mais aus­si dans le reste de la popu­la­tion en tant que ces per­sonnes ne pos­sèdent pas d’in­té­rêts pri­vés dans la TGO ou sont des par­ti­sans de cette forme d’en­tre­prise par prin­cipe, se dirige contre l’ad­mi­nis­tra­tion des mines par l’É­tat dans un degré beau­coup plus haut que contre la déci­sion que l’É­tat doit deve­nir le pro­prié­taire des gise­ments de mine­rai.

    En réa­li­té il s’a­git donc de deux ques­tions, le droit de la pro­prié­té et la forme d’en­tre­prise, qui ont été trai­tés comme un seul pro­blème jus­qu’à main­te­nant. On a consi­dé­ré comme natu­rel que la pos­ses­sion des mines par l’É­tat résul­te­rait aus­si une admi­nis­tra­tion de celles-ci par l’É­tat. Mais il serait juste de faire une dis­tinc­tion claire pour créer la pos­si­bi­li­té de faire un choix non seule­ment entre une col­la­bo­ra­tion conti­nuée avec la TGO et le rachat par l’É­tat com­bi­né avec une admi­nis­tra­tion de l’É­tat par lui-même, mais aus­si entre l’al­ter­na­tive men­tion­née d’une part et une autre solu­tion où le mine­rai serait pos­sé­dé par l’É­tat mais l’ad­mi­nis­tra­tion de l’ex­ploi­ta­tion serait plus libre que l’ad­mi­nis­tra­tion de l’É­tat et plus démo­cra­tique que celle de la LKAB d’autre part. Si l’on pro­cé­dait de cette façon en orga­ni­sant une admi­nis­tra­tion coopé­ra­tive contrô­lée par les ouvriers et les employés, le rachat serait cer­tai­ne­ment salué avec sym­pa­thie et satis­fac­tion de la part de beau­coup de citoyens qui les consi­dèrent aujourd’­hui avec grande hésitation. 

    C’est en pen­sant à cette situa­tion des choses que nous vou­lons pré­sen­ter quelques consi­dé­ra­tions et demandes qui n’ont pas été tenues compte dans la dis­cus­sion de cette affaire, jus­qu’à maintenant. 

    S’il était pos­sible de faire abs­trac­tion des risques sérieux qui selon notre opi­nion doivent être accep­tés avec l’or­ga­ni­sa­tion d’une admi­nis­tra­tion des mines par l’É­tat, on pour­rait recon­naître que cette forme d’ad­mi­nis­tra­tion aurait pu satis­faire les néces­si­tés qui étaient déci­sives pour la déci­sion sur le rachat des actions de la TGO. Nous ne vou­lons pas dis­cu­ter cette ques­tion mais nous consta­tons que ces inté­rêts peuvent être pro­té­gés d’une façon beau­coup plus effi­cace et sans tout risque en consti­tuant une admi­nis­tra­tion auto­nome sur les bases de la coopé­ra­tion des pro­duc­teurs après la prise de pos­ses­sion des mines par l’É­tat.

    L’i­dée de cette forme d’ex­ploi­ta­tion peut seule­ment être ébau­chée d’une façon très géné­rale, dans ce mémoire, pour faci­li­ter une appré­cia­tion des lignes géné­rales du pro­blème. Sup­po­sons que les mines du Nord entrent en pos­ses­sion de l’É­tat et qu’elles soient arren­tées après, sur une base com­mer­ciale, à une entre­prise coopé­ra­tive qui serait for­mée par tous les ouvriers et employés qui tra­vaillent aux mines. Dans la direc­tion de cette entre­prise qui serait sur­tout élue par les membres de la coopé­ra­tive, c’est-à-dire par les ouvriers et employés asso­ciés, il serait aus­si pos­sible de don­ner une cer­taine repré­sen­ta­tion à l’É­tat et aux com­munes direc­te­ment inté­res­sées, mais sous des condi­tions qui ne don­ne­raient pas la majo­ri­té au sein de la direc­tion à ces deux repré­sen­ta­tions. Nous sup­po­sons aus­si que cette entre­prise coopé­ra­tive accep­te­rait sans chan­ge­ment l’ap­pa­reil admi­nis­tra­tif local et tout le per­son­nel. Nous admet­tons aus­si que la nou­velle entre­prise main­tien­drait en géné­ral les rela­tions actuelles entre les ouvriers et les employés dans la dis­tri­bu­tion des reve­nus, au moins quant au paie­ment des salaires cou­rants. Cer­tai­ne­ment on ne pour­rait pas admettre des salaires exces­si­ve­ment hauts pour quelques direc­teurs ou autres chefs au sein de l’en­tre­prise, mais on ne pro­cé­de­rait pas non plus à l’introduction d’un sys­tème de salaire égal pour tous qui impli­que­rait une rup­ture avec les habi­tudes et les idées aujourd’­hui géné­ra­le­ment acceptées. 

    Cepen­dant, l’in­fluence des asso­ciés sur l’ac­ti­vi­té de l’en­tre­prise serait assu­rée à base du prin­cipe coopé­ra­tif expri­mé dans la for­mule : un homme ― une voix. 

    La dif­fé­rence la plus impor­tante entre l’ac­tuel état des choses et celui qui serait créé au sein de l’en­tre­prise coopé­ra­tive, consis­te­rait dans le fait que les ouvriers et employés des mines se char­ge­raient des fonc­tions qui sont exer­cées aujourd’­hui par les action­naires de la LKAB : c’est-à-dire ils nom­me­raient la direc­tion et déter­mi­ne­raient sur le béné­fice de celle-ci. Le pro­blème du béné­fice serait de grand inté­rêt, puisque l’ex­ploi­ta­tion des mines du Nord, non sans motif, est consi­dé­rée comme une affaire assez bonne. Nous vou­lons seule­ment décla­rer qu’il sera très natu­rel de prendre en consi­dé­ra­tion les inté­rêts de la com­mu­nau­té, en géné­ral. Il n’est pas néces­saire de par­ler des impôts dic­tés par l’É­tat qui seront les mêmes pour tout le monde. L’É­tat pour­rait aus­si satis­faire ses exi­gences éco­no­miques au moyen des condi­tions d’ar­ren­te­ment qui pour­raient être fixées pour des périodes rela­ti­ve­ment courtes. Dans ces cir­cons­tances, le droit des asso­ciés de déter­mi­ner sur les béné­fices d’une entre­prise coopé­ra­tive popu­laire de cette impor­tance se limi­te­rait au fait que le niveau de reve­nus des ouvriers et employés dépen­drait de leur pres­ta­tion com­mune. Dans le cas d’une évo­lu­tion favo­rable il serait aus­si pos­sible que la science et les acti­vi­tés cultu­relles popu­laires reçoivent des sub­ven­tions plus géné­reuses que d’ha­bi­tude de la part des entre­prises pri­vées. Notre plan ne vise donc point à créer « un groupe de capi­ta­listes » au sein de la classe ouvrière. 

    Le prin­cipe que la com­mu­nau­té comme telle doit contrô­ler des richesses natu­relles comme les mines du Nord, est plei­ne­ment satis­fait par un pro­jet comme celui que nous venons d’é­bau­cher ; notre plan se base sur le fait que l’É­tat doit pos­sé­der entiè­re­ment les gise­ments de mine­rai et qu’il conserve la pos­si­bi­li­té de deman­der des garan­ties pour ses inté­rêts éco­no­miques dans l’ex­ploi­ta­tion de ces richesses. 

    Quant à l’autre motif prin­ci­pal pour l’in­ter­ven­tion de l’É­tat, c’est-à-dire de créer des garan­ties pour les inté­rêts sociaux actuels et futurs des mineurs et du reste de la popu­la­tion inté­res­sée dans le sens de leur sûre­té sociale, il est évident qu’au­cune autre forme d’en­tre­prise que celle où les mineurs eux-mêmes en col­la­bo­ra­tion avec l’É­tat et les com­munes déter­minent sur la ges­tion des affaires, peut garan­tir une satis­fac­tion plus grande de ces nécessités. 

    Nous croyons avoir prou­vé que les buts prin­ci­paux que l’on tend à réa­li­ser par la consti­tu­tion d’une admi­nis­tra­tion des mines par l’É­tat et exploi­ta­tion coopé­ra­tive, les deux formes basées sur la pos­ses­sion des gise­ments de mine­rai par l’É­tat, ont la même valeur s’il s’a­git de satis­faire les néces­si­tés que nous venons d’es­quisse mais il faut encore exa­mi­ner si la forme d’ex­ploi­ta­tion coopé­ra­tive ne peut offrir des avan­tages éco­no­miques supé­rieurs parce qu’elle éli­mine une par­tie des risques qui carac­té­risent en géné­ral l’ex­ploi­ta­tion par l’État. 

    Quant aux résul­tats éco­no­miques, nous osons affir­mer que l’ex­ploi­ta­tion coopé­ra­tive au com­men­ce­ment de la nou­velle acti­vi­té, et nous sup­po­sons que la coopé­ra­tive qui engage les ouvriers et les employés d’une façon très intime et qui conserve en par­tie le motif du pro­fit comme moteur d’ac­ti­vi­té et de pro­duc­ti­vi­té, sera la forme la plus effi­cace, du point de vue éco­no­mique, aus­si quand il s’a­git d’as­su­rer à l’É­tat lui-même un cer­tain reve­nu de cette exploitation. 

    Un pro­blème spé­cial consiste dans la mise en fonds de l’ad­mi­nis­tra­tion coopé­ra­tive au com­men­ce­ment de la nou­velle acti­vi­té, et nous sup­po­sons que l’É­tat dans cette situa­tion, pour­rait sans risque aider l’en­tre­prise coopé­ra­tive par moyen d’un emprunt cor­res­pon­dant. Il serait oppor­tun de faire sous­crire les ouvriers et employés des obli­ga­tions. Cette méthode crée­rait des rap­ports plus intimes entre les mineurs et l’en­tre­prise, mais dans une forme qui assu­re­rait aus­si le droit de chaque indi­vi­du de se reti­rer de celle-ci. 

    Mais ce n’est pas la supé­rio­ri­té éco­no­mique de l’en­tre­prise coopé­ra­tive que nous consi­dé­rons comme l’a­van­tage le plus impor­tant de cette forme d’ad­mi­nis­tra­tion. Nous pen­sons sur­tout que cette solu­tion pour­rait évi­ter les désa­van­tages de l’ad­mi­nis­tra­tion par l’É­tat ― qui consistent dans la créa­tion d’une bureau­cra­tie dans chaque cas concret et dans un sens plus géné­ral dans l’é­lar­gis­se­ment du pou­voir abso­lu de l’É­tat comme tel. En outre, nous pen­sons aus­si aux avan­tages que l’on désigne, géné­ra­le­ment, comme satis­fac­tion per­son­nelle dans le tra­vail et liber­té de l’in­di­vi­du ― il s’a­git du pro­blème le plus impor­tant pour la socié­té moderne dont la solu­tion pour­rait être faci­li­tée dans une large mesure. 

    Nous savons très bien et nous vou­lons le consta­ter for­mel­le­ment, que la plu­part des ouvriers et employés seuls ont l’in­ten­tion de faire leur tra­vail, de reti­rer leurs salaires et qu’ils ne veulent pas avoir autre chose à faire avec l’en­tre­prise. Mais nous savons aus­si qu’une entre­prise effi­cace dans son acti­vi­té quo­ti­dienne doit tra­vailler plus ou moins de la même façon que la LKAB le fait aujourd’­hui. La direc­tion doit avoir ses droits et com­pé­tences et les spé­cia­listes doivent exer­cer une fonc­tion d’o­rien­ta­tion dans chaque entre­prise qui veut être effi­cace. Mais la pos­si­bi­li­té de pou­voir élire la direc­tion de l’en­tre­prise de la même façon que les membres d’une orga­ni­sa­tion nomment leur comi­té et les citoyens d’un pays démo­cra­tique ont le droit d’é­lire leur gou­ver­ne­ment, serait un grand avan­tage pour les habi­tants du dis­trict minier du Nord. Les asso­ciés actifs de l’en­tre­prise trou­ve­raient une pos­si­bi­li­té d’a­gir et toute l’é­vo­lu­tion de l’en­tre­prise rece­vrait un carac­tère plus social et plus satis­fai­sant d’un point de vue populaire. 

    La créa­tion d’une admi­nis­tra­tion coopé­ra­tive pour les mines du Nord pour­rait deve­nir un point de départ pour une nou­velle évo­lu­tion éco­no­mique qui pour­rait réduire les ten­sions sociales actuelles et devrait ouvrir la porte à la démo­cra­tie au sein de l’é­co­no­mie natio­nale en don­nant aux grandes masses popu­laires une pos­si­bi­li­té de for­mer elles-mêmes en toute liber­té les bases de leur existence. 

    En nous réfé­rant à notre expo­sé, nous invi­tons le Gou­ver­ne­ment de faire exa­mi­ner, au cas d’un rachat des actions de la TGO dans la LKAB, la ques­tion de la consti­tu­tion d’une admi­nis­tra­tion coopé­ra­tive minière d’ac­cord avec les lignes géné­rales ci-des­sus ébau­chées. L’exa­men du pro­jet devrait être fini et une déci­sion devrait être prise avant le rachat sup­po­sé vers la fin de 1957. 

Grän­ges­berg et Stock­holm, le 29 août 1955. 

Fédé­ra­tion des mineurs et ouvriers métal­lur­gistes au sein de la SAC 

Sve­riges Arbe­tares Centralorganisation 

§ § §

    Ce mémoire fut remis au ministre des finances, M. Sköld, par une com­mis­sion dont les membres étaient Edvin Johans­son et Anton Johans­son comme repré­sen­tants de la Fédé­ra­tion des mineurs et ouvriers métal­lur­gistes de la SAC, Axel Lind­berg, secré­taire géné­ral de la SAC et Evert Arvid­son, direc­teur de Dag­stid­nin­gen Arbe­ta­ren. Selon la décla­ra­tion du ministre, le mémoire sera mis à la dis­po­si­tion de la com­mis­sion d’é­tude qui s’oc­cupe de la ques­tion des mines. Plus tard, le mémoire fut encore envoyé à tous les dépu­tés du Riks­dag le par­le­ment sué­dois. Le docu­ment fut aus­si impri­mé dans une grande édi­tion et dif­fu­sé dans tout le pays par les soins des fédé­ra­tions locales de la SAC.

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