La Presse Anarchiste

Guerre à la guerre

Les massacres Russes en Mandchourie. — Une tuerie en terre africaine. — Lourde note à payer. ― Une opinion du deuxième siècle.

Ça conti­nue toujours. 

D’a­près le Times, qui le dit tenir de cal­culs cer­tains « le nombre des hommes, femmes et enfants mas­sa­crés en Mand­chou­rie, pen­dant les mois de juillet et d’août, serait d’au moins dix mille, sans comp­ter les cinq mille vic­times de Bla­go­vest­schenk, aux­quelles les Russes ont fait subir un trai­te­ment affreu­se­ment cruel. Même à Vla­di­vos­tok, un grand nombre de Chi­nois inno­cents, soup­çon­nés de boxe­risme, ont été fusillés ou pen­dus à cette époque. » 

Si bien que le pays est désert et que les agents russes font tous les efforts pour encou­ra­ger l’é­mi­gra­tion en Mand­chou­rie. Je me demande de quelle façon ils peuvent encou­ra­ger une. émi­gra­tion quel­conque. Si c’est autre­ment qu’à coups de knout ?

― O ―

Pour ne pas lais­ser aux autres peuples la gloire de ces bou­che­ries, il est juste de recon­naître qu’il s’en com­met tout autant sous les plis du dra­peau tri­co­lore. Oyez plu­tôt le récit, fait à sa famille, par un des sol­dats qui ont coopé­ré à la prise d’Im-Rhar :

« … Le tir des obus à la méli­nite conti­nuant, la kas­bah fut en par­tie démo­lie ; l’in­fan­te­rie s’é­lan­ça à l’as­saut, et l’on put se rendre compte de la puis­sance des­truc­tive de nos canons. Ce n’é­tait que cadavres, gens sans tête, sans bras, sans jambes ou éven­trés. Hommes, femmes, enfants, che­vaux, cha­meaux gisaient pêle-mêle, morts ou n’en valant mieux. Il n’y a eu, sur douze cents habi­tants, que cent soixante-deux pri­son­niers et les autres sont morts… »

Vous avez bien lu : 162 sur­vi­vants sur 1.200 assié­gés ! Et cette ignoble tue­rie s’est faite gra­tui­te­ment, pour le plai­sir, puisque nous n’a­vons eu que neuf hommes, tués ou blessés !

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Nos paci­fiques voi­sins d’outre-Manche trouvent que la cam­pagne sud-afri­caine coûte plus cher qu’ils ne l’a­vaient cru. Trois mil­liards et demi, s’il vous plaît. Des impôts sur le sucre, le thé, la houille, etc. Une aug­men­ta­tion de l’im­pôt sur le reve­nu. Brr ! C’est ché­rot, comme on dit à l’a­te­lier. Le pire c’est que, comme tou­jours, ce sont les mal­heu­reux et les exploi­tés qui en pâtissent le plus.

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Et les chré­tiens res­tent tou­jours muets. Tant de liens les rat­tachent au sabre, eux qui se réclament d’un Dieu d’a­mour et de paix. Une agi­ta­tion pla­to­nique ébranle à peine la cen­tième par­tie de la masse. Quel contraste avec la façon éner­gique dont Ter­tul­lien, un des Pères de l’É­glise, s’ex­pri­mait à ce sujet : 

« Vous me deman­dez si un chré­tien, peut deve­nir sol­dat ou si un dis­ciple sol­dat ou un offi­cier subal­terne, qui ne sont pas tenus de prendre part aux sacri­fices et aux exé­cu­tions capi­tales peuvent être admis à la pro­fes­sion de foi. Je réponds qu’il ne peut y avoir d’u­nion entre le ser­vice des hommes et le ser­vice de Dieu, entre l’é­ten­dard du Christ et l’é­ten­dard du Diable, entre le camp de lumière et le camp des ténèbres… Com­ment un sol­dat com­bat­tra-t-il sans glaive ? Or, le Sei­gneur le lui a enle­vé. En désar­mant Pierre, il a désar­mé tous les sol­dats. » (De l’I­do­lâ­trie, XIX).

Paroles com­bien justes et pro­fondes, que nos chré­tiens dégé­né­rés oublient aujourd’hui. 

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