La Presse Anarchiste

Grèves aux universités

Ce texte a été com­po­sé par un cama­rade à par­tir d’ex­traits de dif­fé­rents textes, motions, tracts, recueillis au cours de ces der­nières semaines. Tous les élé­ments de ce texte ne sont donc pas homo­gènes et peuvent s’op­po­ser ou se compléter.

1. La lutte des étu­diants s’est déclen­chée contre la réforme du 2e cycle, réforme dont les signi­fi­ca­tions sont claires, après celles du 1er et 3e :

Sous cou­vert d’une pré­ten­due « reva­lo­ri­sa­tion » (en réa­li­té impos­sible) des diplômes, dont la « valeur » dépend bien plus du mar­ché que de la formation

— elle orga­nise en fait une déva­lo­ri­sa­tion (par ex. de la licence) de ces diplômes pour la pro­duc­tion de cadres moyens sans emploi demain comme aujourd’­hui, ou davan­tage, mais qui pèse­ront sur tout le mar­ché du tra­vail, en espé­rant que cela inci­te­ra l’en­semble des tra­vailleurs à se conten­ter de ce qui leur est offert…

– elle vise aus­si une remise en ordre de l’ins­ti­tu­tion uni­ver­si­taire (et sco­laire), de sa dis­tri­bu­tion, de son fonc­tion­ne­ment ; cette remise en ordre est un objec­tif constant depuis des années, et elle n’est pas non plus réa­li­sable com­plè­te­ment, à cause des fonc­tions contra­dic­toires et toutes néces­saires au sys­tème que rem­plit l’u­ni­ver­si­té : elle frap­pe­ra néan­moins en pre­mier lieu toutes les dis­ci­plines et acti­vi­tés non direc­te­ment uti­li­sables, ou bien celles où des voix (d’é­tu­diants, bien plus que d’en­sei­gnants !) dis­cor­dantes se font entendre, dans le concert giscardien/​programme commun.

Et d’autres signi­fi­ca­tions encore, tout autant contra­dic­toires, puisque le pou­voir navigue à vue, et joue sur tous les registres à la fois : tech­no­crate, huma­niste, répres­sif, etc.

2. Cette lutte étu­diante fait appa­raître, une fois de plus, des illu­sions qu’il importe de dis­si­per chez ceux qui les nour­rissent, et de dénon­cer chez ceux qui en vivent et qui les entretiennent :

— les illu­sions « de gauche », où se mani­feste la col­lu­sion des man­da­rins, pré­si­dents d’u­ni­ver­si­té, syn­di­ca­listes et appren­tis poli­ti­ciens, comme des étu­diants arri­vistes : croire qu’une autre ges­tion de l’u­ni­ver­si­té, plus ration­nelle, plus « adap­tée », voire un autre gou­ver­ne­ment, pour­rait davan­tage résoudre le pro­blème de l’emploi des cadres ou celui des fonc­tions inco­hé­rentes de l’u­ni­ver­si­té — alors qu’il est clair que ni l’a­bro­ga­tion de la réforme du 2e cycle, ni un chan­ge­ment de pou­voir ne peuvent répondre à la ques­tion de l’emploi, du chô­mage, de la for­ma­tion, ou de la crise de l’u­ni­ver­si­té, dans une socié­té qui reste ce qu’elle est ;

– les illu­sions gau­chistes, toutes proches des pre­mières, celles des grou­pus­cules hal­lu­ci­no­gènes qui gam­bergent sur un autre « mai 68 » réus­si cette fois-ci, et qui psal­mo­dient : étu­diants tous unis, étu­diants-ensei­gnants, même com­bat, le pou­voir aux tra­vailleurs, etc.

Or la réa­li­té que masquent ces ren­gaines et ces voci­fé­ra­tions, c’est que :

— le mou­ve­ment étu­diant n’a pas et ne peut pas avoir de pers­pec­tives comme tel. Les étu­diants ne sont pas une force sociale ; ils ne pèsent que néga­ti­ve­ment sur le fonc­tion­ne­ment actuel du sys­tème, et sont donc constam­ment uti­li­sables par d’autres qu’eux-mêmes dans les jeux poli­tiques ; ils sont en outre divi­sés, parce qu’une par­tie d’entre eux conti­nue néces­sai­re­ment à miser sur les diplômes, la pro­mo­tion sociale, les pri­vi­lèges des cadres supérieurs.

La liaison avec les travailleurs

— Quant aux « tra­vailleurs », ils sont par rap­port aux étu­diants, dans un autre monde, et le mou­ve­ment étu­diant, dans son état actuel, n’a rien à leur appor­ter — qu’une sym­pa­thie ver­bale et sus­pec­tée. Ces deux mondes se côtoient sans même se voir : pen­dant que les étu­diants tiennent A.G. sur A.G., dans les mêmes bâti­ments, l’ad­mi­nis­tra­tion tourne, les secré­taires tapent, et le soir venu, les « frères immi­grés » ramassent les déchets et les mégots dans les amphis. Face à cela, que peut signi­fier la venue dans les assem­blées de quelques ouvriers en grève dans l’en­tre­prise voi­sine, qui pro­noncent trois mots, se font ova­tion­ner, et puis s’en vont ? Les orga­ni­sa­tions gau­chistes ont seule­ment mis en scène la liai­son avec les tra­vailleurs, exac­te­ment sur le même mode que les orga­ni­sa­tions réfor­mistes qui la figurent dans les appa­reils syn­di­caux. La liai­son des étu­diants et des tra­vailleurs dépend des tra­vailleurs, non des étu­diants tant que les tra­vailleurs ne sont pas enga­gés dans une lutte qui secoue toute la socié­té, ce ne peut être qu’une parole creuse, un mot d’ordre manipulateur.

Par contre, ce que peuvent faire les étu­diants qui se situent dans une pers­pec­tive révo­lu­tion­naire c’est :

— don­ner l’exempte de la luci­di­té sur leur propre fai­blesse et leurs propres enne­mis (car ceux-ci se retrouvent aus­si ailleurs). Ce sont :

  • le pou­voir et ses antennes admi­nis­tra­tives (y com­pris les Conseils) qui, depuis long­temps déjà, orga­nisent la sélec­tion dans l’U­ni­ver­si­té et y ont intro­duit au moins l’es­prit du patro­nat (com­pé­tence, pri­vi­lège, pouvoir) ;
  • les cadres supé­rieurs du Supé­rieur, man­da­rins et appren­tis-man­da­rins pour qui le « fonc­tion­ne­ment nor­mal › de l’U­ni­ver­si­té est pré­fé­rable à tout, puis­qu’il ali­mente leur confort maté­riel, idéo­lo­gique, et leur médiocre pouvoir ;
  • les futurs cadres et ges­tion­naires de la socié­té tech­no­cra­tique capi­ta­liste (pri­vée ou d’État) ;
  • les futurs par­te­naires, les zom­bies poli­tiques et syn­di­caux « de gauche » : qui veulent bien d’un mou­ve­ment modé­ré et sans objec­tifs, donc uti­li­sable dans leur stra­té­gie, mais s’op­posent à toute lutte contre la hié­rar­chie parce qu’ils se pré­parent à en occu­per les sommets ;
  • les grou­pus­cules et cliques qui s’a­mé­nagent, à coups de gueule et à coups de poings, une place sur la scène poli­tique : ils espèrent ramas­ser un jour des miettes du pou­voir d’É­tat, et le miment dès main­te­nant, jus­qu’au gro­tesque, dans tous leurs comportements ;
  • et aus­si : les formes d’ac­tion et d’or­ga­ni­sa­tion (A.G., manifs, comi­tés, etc.) où la base des étu­diants, ensei­gnants et autres n’ont aucune part active et auto­nome, et contemplent ou exé­cutent les déci­sions et négo­cia­tions menées en leur nom.
    – Remettre en question :
  • leur place dans la société ;
  • la divi­sion du tra­vail (en ayant pour objec­tif non pas le rem­pla­ce­ment d’une réforme par une autre, mais bien la sup­pres­sion de l’u­ni­ver­si­té comme lieu de sélec­tion sociale. Pour cela l’axe anti-exa­men est fondamental.

Le Mouvement, ses A.G., ses manifs, ses coordinations

L’in­té­rêt, pour nous, du mou­ve­ment des étu­diants et des ensei­gnants contre la réforme du 2e cycle n’est pas là où ses porte-paroles auto­dé­si­gnés veulent le can­ton­ner à tout prix.

Il n’est pas dans les prises de posi­tions, si fermes soient-elles, des orga­ni­sa­tions quelles qu’elles soient ; il n’est pas non plus dans la coor­di­na­tion de grou­pus­cules qui, après s’être empa­ré des comi­tés de grève, pro­mène les étu­diants d’A.G. en A.G., de manifs en manifs, à leur pro­fit exclu­sif, ne lais­sant la parole qu’à leurs propres membres, tout en pré­ten­dant don­ner des leçons de démo­cra­tie directe.

L’in­té­rêt se trouve dans l’ac­tion des frac­tions étu­diantes, ensei­gnantes, et des autres tra­vailleurs, qui refusent à la fois une réforme qui sys­té­ma­tise la sélec­tion des pri­vi­lé­giés de la socié­té sous cou­vert de qua­li­fi­ca­tion et de for­ma­tion pro­fes­sion­nelle, et les appa­reils de toutes sortes et de toutes dimen­sions qui repro­duisent en eux-mêmes la hié­rar­chie et autour d’eux la répres­sion régnante. Par exemple à grands coups de manœuvres ou de ser­vice d’ordre (« mixtes » ou non !).

Ce mou­ve­ment diri­gé contre la hié­rar­chie sociale (et uni­ver­si­taire) a, comme tous les autres mou­ve­ments sociaux, le choix entre recon­naître et se débar­ras­ser de tous ceux qui veulent le réduire ou l’u­ti­li­ser (ce qui revient au même) ou dis­pa­raître pour plus ou moins longtemps.

Très vite les mani­fes­ta­tions n’ont plus été l’ex­pres­sion de la volon­té des étu­diants de résis­ter au pou­voir, de prendre le contrôle de leur lutte. Elles sont deve­nues une masse de manœuvre entre les mains des appren­tis par­le­men­taires de la coor­di­na­tion pour les rendre cré­dibles en vue de la négo­cia­tion qu’ils sou­haitent [[S’il est une leçon à tirer de mai 68 et des années sui­vantes, c’est bien que la négo­cia­tion, même arti­cu­lée sur une exten­sion contrô­lée des luttes, est tou­jours la mise en place des dis­po­si­tifs de détour­ne­ment et de neu­tra­li­sa­tion de l’ac­tion déclen­chée spon­ta­né­ment (comme c’est le cas aujourd’­hui, comme ce fut le cas à Lip et ailleurs), au pro­fit des repré­sen­tants auto-pro­cla­més, et dont les appels répé­tés à la mobi­li­sa­tion (telle qu’ils l’en­tendent. et entendent l’a­voir en mains) ne peut don­ner qu’une envie, c’est de chan­ger d’air ou d’al­ler se cou­cher. La négo­cia­tion, le « dia­logue », ce n’est que la ren­contre des mani­pu­la­tions com­plé­men­taires de la gauche, des gau­chistes et du pou­voir.]]. Ce sont les copies conformes des Bas­tilles-Répu­bliques cégétistes.

Pour les orga­ni­sa­teurs, les mani­fes­ta­tions sont le Mou­ve­ment pour la bonne rai­son que c’est là que leur pou­voir, leur soif d’ordre doit pou­voir s’ex­pri­mer tota­le­ment. Cela explique l’hys­té­rie « orga­ni­sa­tion­nelle » qui s’est déchaî­née contre tout ce qui pou­vait nuire aux « organisateurs-parlementaires-négociateurs » :

— raton­nades des S.O. contre les cas­seurs, les « anars », etc. ;

– pro­pa­gande calom­nieuse du jour­nal Rouge contre les majo­ri­tés qui veulent se regrou­per lors des coor­di­na­tions nationales.

Il est grand temps de remettre les manifs en question.

À quoi sert une manif traîne-savates où 50 000 per­sonnes s’en vont au casse-pipe ?

Face à cela, nous pro­po­sons des manifs écla­tées ou une dizaines de petites manifs de 5 000 per­sonnes qui s’en vont au même moment dans une dizaine de coins dif­fé­rents tout en dis­tri­buant des tracts de contre-infor­ma­tion. Ces manifs ont l’a­van­tage sur les grosses d’être plus manœu­vrables, plus offen­sives, de dis­per­ser les forces des flics et de per­mettre à plus de monde d’être infor­més (ou contre-infor­més). Cela per­met en outre aux mani­fes­tants de s’au­to-orga­ni­ser et de ne plus délé­guer leurs pou­voirs aux S.O.

On nous dit des récentes manifs qu’elles furent très fortes parce qu’elles avaient réuni énor­mé­ment de monde. Bien sûr, plus un Mou­ve­ment réunit de gens dans la rue, plus il est fort. Mais, tout en réunis­sant plein de monde, les récentes manifs fuyaient au bout de quelques gre­nades et c’est nor­mal. Com­ment, en effet, résis­ter aux flics quand l’on est cer­né dans de petites rues par 5 000 C.R.S. ? Une manif tota­le­ment forte doit aus­si pou­voir résis­ter aux charges de flics. Ce ne peut être qu’une manif écla­tée. Ces manifs pren­draient en outre un sens poli­tique tout dif­fé­rent. Loin de res­sem­bler aux manifs style C.G.T., elles mon­tre­raient en fait toute la déter­mi­na­tion du Mou­ve­ment Étudiant.

Quant aux S.O., ceux-ci se per­mettent de faire leur police et, au lieu de défendre la manif contre cer­taines agres­sions, chargent des « incon­trô­lés », non pour les dis­per­ser mais pour les matra­quer et en tor­tu­rer cer­tains. Les S.O. des orgas se pren­draient-ils pour les sbires de Bigeard ?

Alors, quand aurons-nous enfin des manifs auto­dé­fen­dues et capables de résis­ter aux flics ?

Quand les orgas et leurs S.O. arrê­te­ront de gueu­ler contre les incon­trô­lés qui ne sont que des mecs qui souffrent du sys­tème actuel et de la répres­sion un peu plus forte chaque jour, tant de la part des flics que des S.O. ?

non aux S.O. Flics,

non au casse-pipe.
 »

(Tract liber­taire)

Ces réac­tions com­mencent d’ailleurs à se faire sen­tir de façon beau­coup plus large [[Nous ren­voyons aus­si à toutes les lettres de lec­teurs que « Libé­ra­tion » n’a pas ces­sé de publier pen­dant toute la durée du Mou­ve­ment.]]. À la der­nière coor­di­na­tion (Lyon) la motion n° 1, dont voi­ci quelques extraits, a recueilli 28 voix sur 200, soit envi­ron 14 % des mandats !

Motion langues

Cette coor­di­na­tion, une fois de plus, n’of­fri­ra pas aux étu­diants les pers­pec­tives qu’ils réclament. Une fois encore les débats de poli­ti­cards ini­tiés, les com­pro­mis minables ont pré­va­lu et ceci à un moment par­ti­cu­liè­re­ment cri­tique pour le mouvement.

Les facs tiennent bon, la plu­part sont encore en grève mal­gré la cam­pagne d’in­tox de la presse. Pour­tant le décou­ra­ge­ment se fait jour à cause du manque de pers­pec­tives. Mais le gou­ver­ne­ment aus­si tient bon, encou­ra­gé par le refus des direc­tions syn­di­cales ensei­gnantes de par­ti­ci­per à la grève générale.

Cer­tains veulent enter­rer la grève. L’U.N.E.F., bien sûr, mais aus­si à mots cou­verts les orga­ni­sa­tions qui ont main­te­nant le culot de par­ler de lutte à longue haleine et de restruc­tu­ra­tion du mou­ve­ment alors qu’elles l’ont mené à la défaite les années pré­cé­dentes et qu’elles n’ont aucune pro­po­si­tion main­te­nant pour sor­tir de l’impasse.

Nous, notre posi­tion est la suivante :

Il faut exer­cer dans les semaines qui viennent une pres­sion maxi­mum contre le pouvoir.

  1. En uti­li­sant l’arme des exa­mens : non pas­sage en cas de non satis­fac­tion des reven­di­ca­tions. Remise en cause des exa­mens, arme de divi­sion des étu­diants, de répres­sion de nos grèves et de repro­duc­tion des hiérarchies.
  2. Les moyens d’ac­tion doivent être prin­ci­pa­le­ment déci­dés en fonc­tion des dif­fé­rentes situa­tions par les coor­di­na­tions régio­nales et les A.G. de facs. Il est néces­saire de décen­tra­li­ser le pro­ces­sus de déci­sion dans le cadre des nou­velles formes de lutte et de grève à adop­ter, sur­tout à un moment où les coor­di­na­tions natio­nales s’empêtrent dans l’im­puis­sance. Les faits ont mon­tré que les actions déci­dées à la base sur les régions sont les plus efficaces.
  3. Des manifs écla­tées dans les villes. Dans nos facs, iso­lés, nous ne gênons pas le pou­voir. Or, faire pres­sion sur le pou­voir c’est être gênant. Par exemple : enrayer la machine admi­nis­tra­tive uni­ver­si­taire, har­ce­ler les organes d’in­for­ma­tion qui dif­fusent des cam­pagnes men­son­gères, para­ly­ser la cir­cu­la­tion, occu­per des points signi­fi­ca­tifs, à com­men­cer par cer­taines facs. Il faut dur­cir l’ac­tion dans le cadre d’une semaine d’ac­tion offen­sive sur ces propositions.
  4. Liai­son concrète avec les tra­vailleurs. Au niveau cen­tral nous pro­po­sons une mani­fes­ta­tion aux côtés des tra­vailleurs des entre­prises en liqui­da­tion (Lip, Câbles de Lyon, etc.), des chô­meurs (comi­tés de chô­meurs), des immi­grés (Sona­co­tra) contre la poli­tique de licen­cie­ments, contre la répres­sion. Nous pro­po­sons aus­si une caisse de soli­da­ri­té et l’en­voi de délé­ga­tions étu­diantes aux comi­tés de grève.
  5. Dans la grève géné­rale de l’en­sei­gne­ment supé­rieur, le sou­tien des lycées et des C.E.T. est prio­ri­taire. Il faut opé­rer rapi­de­ment la jonc­tion avec les lycéens et les C.E.T., de même coor­don­ner notre action avec les ensei­gnants qui par­ti­cipent à la grève et nous sou­tiennent sur la ques­tion des examens. 
  6. Soli­da­ri­té active et auto­dé­fense face aux forces répressives.

Nous appe­lons les étu­diants qui posent les pro­blèmes en ces termes à des réunions régio­nales à la fin de cette semaine.

— À une réunion natio­nale pour coor­don­ner nos initiatives.

Quelques perspectives

Quel que soit l’a­ve­nir immé­diat du Mou­ve­ment, ce qui compte avant tout et ce qui lais­se­ra des traces c’est que les déci­sions (toutes, même celles qui sont contra­dic­toires) soient celles des étu­diants et des ensei­gnants et non le résul­tat des tran­sac­tions entre bureau­cra­ties poli­tiques, uni­ver­si­taires, syn­di­cales ou groupusculaires.

Notons que la poli­tique de la L.C.R. ou du M.A.S. (nou­veau syn­di­cat C.F.D.T.) est la même que celle du S.N.E.S.U.P. ou de l’U.N.E.F., avec 15 jours de retard, c’est-à-dire négo­cia­tions, ren­contres avec Alice !

Com­ment ?

— En s’ins­tal­lant dans les facs, en refu­sant de s’é­pui­ser dans des A.G. et des manifs pas­sives, en pre­nant la parole, en fai­sant taire ce qui parlent à la place des autres.

– En affir­mant bien haut que nous ne sommes pas en grève seule­ment pour une his­toire de réforme, mais aus­si (et peut-être sur­tout) parce qu’on s’emmerde dans la fac, que les pers­pec­tives en dehors ne sont guère roses non plus, parce que nous vou­lons détruire autant que faire ce peut ces sacro-saints « rap­ports péda­go­giques », « for­ma­tion pro­fes­sion­nelle », etc.

– En refu­sant le pes­si­misme qui veut faire croire que le Mou­ve­ment est en train de se cas­ser la gueule, alors que per­sonne, il y a quelques mois, n’au­rait envi­sa­gé une grève si longue !

– En dénon­çant ceux qui bien­tôt nous expli­que­ront « qu’il faut savoir ter­mi­ner une grève » au nom du réa­lisme, de la rai­son, du calme, des élec­tions, du ren­for­ce­ment du Mou­ve­ment, de la construc­tion de l’or­ga­ni­sa­tion, du sérieux face à l’o­pi­nion publique, de notre ave­nir pro­fes­sion­nel, etc.

– En élar­gis­sant au maxi­mum le mou­ve­ment contre les exa­mens, contre tous ceux qui veulent qu’ils aient lieu d’une manière ou d’une autre, qui refusent de dire bien haut que les exa­mens ne sont que des simu­lacres pour jus­ti­fier l’exis­tence de la hié­rar­chie, de l’é­cole, de la divi­sion du travail.

Motion sur les examens

Ce n’est pas la négo­cia­tion (U.N.E.F. — S.N.E.S.U.P.) qui oblige à poser le pro­blème des exa­mens ; au contraire, c’est le désir de l’é­vi­ter à tout prix, en cas­sant d’a­bord la grève, qui a pré­ci­pi­té ces négociations.

Ce que les négo­cia­teurs veulent à tout prix évi­ter, c’est qu’une crise géné­rale de l’u­ni­ver­si­té ne s’ouvre, dans son fonc­tion­ne­ment concret, quo­ti­dien et répressif.

Nous sommes soli­daires et par­tie pre­nante du mou­ve­ment étu­diant et ensei­gnant dans la mesure où il se dirige clai­re­ment contre la hié­rar­chie sociale et universitaire.

Les exa­mens étant la pièce maî­tresse de cet édi­fice, nous pen­sons qu’il ne sau­rait y avoir qu’une seule solu­tion : vali­da­tion de tous les étu­diants sans condi­tion.

Nous ne sau­rions nous prê­ter à des simu­lacres d’exa­mens du genre : « semaine d’exa­mens dans les­quels seraient pas­sées les épreuves dans les meilleures condi­tions », « copie col­lec­tive », « pro­lon­ga­tion ou dépla­ce­ment de l’an­née uni­ver­si­taire », dans la mesure où les exa­mens sont tou­jours un simu­lacre des­ti­né à jus­ti­fier « objec­ti­ve­ment » la sélec­tion, la hié­rar­chie, etc., et qu’il n’au­rait alors rien de changé.

Nous ne pen­sons pas que le mou­ve­ment doive envi­sa­ger des posi­tions de replis (comme celles pré­ci­tées) mais qu’il doive au contraire envi­sa­ger sa radi­ca­li­sa­tion et son exten­sion (en par­ti­cu­lier par la remise en cause du rap­port pédagogique).

Remettre en ques­tion les exa­mens en est le pre­mier pas.

Motion pré­sen­tée à Paris IX — Dau­phine, à l’As­sem­blée Géné­rale des ensei­gnants en vue de la Coor­di­na­tion Natio­nale Enseignante. 

La Presse Anarchiste