Pour ce qui concerne La Lanterne Noire des camarades ont émis le souhait que la revue parvienne à rendre compte des problèmes pratiques que nous rencontrons tous dans notre « militantisme ». Des problèmes parfois simples, mais que nous ne pouvons résoudre simplement au coup par coup, sans un minimum de théorisation, c’est-à-dire d’explicitation du rapport avec les finalités que nous poursuivons :
- une action doit-elle être signée ? Comment utiliser un sigle ? Quels problèmes cela pose-t-il ? (répression, avant-gardisme, anonymat) ;
- comment articuler les rapports entre les groupes sans construire l’organisation, mais aussi en battant en brèche l’individualisme, le spontanéisme, ou du moins une forme de théorisation de l’isolement, trop souvent répandue. (Des éléments de réponse sont donnés dans ce numéro.) ;
- quel type de pratique, d’organisation, de stratégie, permet à la fois une ouverture sur l’extérieur, une « décontraction militante » face à ce qui n’est pas soi, tout en étant ferme sur certains principes et cohérent sur les rapports entre buts et moyens ;
- le problème des journaux. Beaucoup de camarades regrettent que nous (le mouvement anar) n’ayons pas un grand journal national, quotidien ou hebdomadaire, face à ceux des trotskystes ou des maos. Mais ce grand journal ne risque-t-il pas d’être bureaucratique, confectionné par des spécialistes, et diffusé par une base passive, exactement comme chez ceux que nous dénonçons. par ailleurs ? Ne vaut-il pas mieux multiplier les journaux locaux, réguliers ou ponctuels, en utilisant des techniques efficaces mais « décentralisatrices » comme l’offset, la sérigraphie, ou d’autres choses encore ;
- les manifestations telles qu’elles se déroulent généralement dans cette période sont-elles adaptées aux exigences de démocratie qui sont les nôtres ?
Ces problèmes seront donc abordés dans La Lanterne avec d’autant plus de profit si ce n’est pas seulement nous (le groupe éditeur) qui faisons part de nos réflexions.
Nous devons cependant signaler que nombre de ces problèmes ont déjà été abordés dans Informations Rassemblées à Lyon, et qu’il serait bon d’en tenir compte pour ne pas toujours repartir au début.
Par ailleurs, un certain nombre de groupes ont décidé de publier un bulletin de liaison ouvert à tous les groupes et individus anarchistes, quelle que soit leur appartenance spécifique à telle ou telle groupement, fédération ou organisation. Nous reproduisons la circulaire envoyée à tout le Mouvement :
[([|CIRCULAIRE|]
Cet été, au camping libertaire international de Saint-Mitre-les-Remparts, des camarades (de différents groupes, de Belgique, de Lyon, de Toulouse, d’Avignon et de Paris) ont décidé de mettre sur pieds un bulletin de liaison selon les principes et les modalités suivantes :
1. Le bulletin est ouvert à tous les groupes ou individus anarchistes quelle que soif par ailleurs leur appartenance ou non à une organisation, fédération, liaison, coordination…
2. Le bulletin n’est ni le point de départ d’une nouvelle organisation, ni celui d’un nouveau journal qui se substituerait à ceux déjà existants.
En conséquence, il ne contiendra aucun texte de fond, de propagande, de polémique
ou d’analyse, qui eux trouvent leur place dans l’éventail de la presse libertaire existante. Son contenu sera celui d’une stricte information issue directement des groupes et des individus.
Informations sur :
- les activités des groupes qui souhaitent en donner ;
- les propositions d’actions, de travail, d’édition, de réflexion… que peuvent émettre groupes et individus ;
- la répression quand elle se produit ;
- les brochures ou les livres qui se publient.
C’est-à-dire des textes très courts (relativement).
C’est à partir de la lecture du bulletin que les intéressés (ceux qui participent à cette « liaison minimum » et donc le reçoivent) prendront contact entre eux directement (le groupe éditeur du bulletin ne se charge en rien de ce type de travail).
Jusqu’au mois de février 1976, des camarades de la « Lanterne Noire » et de « Jargon Libre » se chargeront de publier ce bulletin qui ne sortira que s’il y a matière ! Puis, de février à juillet, la rotation se fera, puisque les camarades de Toulouse (I 34) prendront le relais. Le point sera fait sur cette expérience au prochain camping qui aura lieu en Belgique selon toute vraisemblance.
Nous espérons que cette tentative favorisera la communication, l’information et les possibilités de rapport à la base entre les groupes anarchistes, sans porter atteinte ni à leur autonomie ni à la légitimité de tout regroupement spécifique, tout en évitant que s’installe dans le mouvement plus de cloisonnement qu’il n’en existe déjà.
Cette circulaire est envoyée à tous les groupes et individus dont nous possédons l’adresse, et nous nous excusons des oublis inévitables mais involontaires.
Mis à part les copains qui, présents au camping, ont participé à cette décision, les groupes et individus intéressés à recevoir le bulletin (et à l’alimenter si possible) devront le faire savoir en écrivant à :
Libraire « Jargon Libre », 6, rue de la Reine-Blanche, 75013 Paris.
En précisant le nombre d’exemplaires souhaités quand il s’agit d’un groupe (limitez ce nombre au strict nécessaire pour éviter trop de dépenses et de travail).
Le bulletin est gratuit pour l’instant.)]