La Presse Anarchiste

Chine : Minus 7

« Nous sommes main­te­nant en 1977 et dans sept ans ce sera 1984 [[Allu­sion à 1984, roman d’Or­well qui décrit un monde domi­né par un par­ti unique.]]. Comme Minus 8, Minus 7 est publié par le Syn­di­cat de la Presse Alter­na­tive (Asie-Paci­fique), qui est l’or­gane coor­di­na­teur de la presse clan­des­tine (under­ground) et alter­na­tive dans la région paci­fique et asiatique. » 

C’est ain­si que se pré­sente la revue chi­noise de Hong-Kong faite par des exi­lés de Chine et d’ex gardes rouges. Les numé­ros en notre pos­ses­sion (6, depuis mai 76) montrent une ten­dance qu’on peut qua­li­fier de liber­taire, qui offre un vaste maté­riel sur les dis­cus­sions et les mani­fes­ta­tions en Chine com­mu­niste. Au contraire de bien des publi­ca­tions d’é­mi­grés, la situa­tion locale est évo­quée ain­si que la répres­sion en Indo­né­sie. En avril 77, le groupe a publié un livre d’a­na­lyse The Revo­lu­tion is dead ; Long live the Revo­lu­tion (rea­dings on the Great Pro­le­ta­rian Cultu­ral Revo­lu­tion from an ultra left pers­pec­tive) (La Révo­lu­tion est morte ; Vive la Révo­lu­tion. Textes sur la Grande Révo­lu­tion Cultu­relle Pro­lé­ta­rienne d’un point de vue gau­chiste). Trois démarches appa­raissent : mar­xiste-léni­niste, plus ou moins liber­taire (Raya Dunaye­ve­kaya, situe Cayo Breb­del) et gau­chiste. Cette der­nière par­tie pré­sente le fameux texte « Où va la Chine ? », dont le titre en soi est une claque aux visions triom­pha­listes de Mao et du par­ti, et d’autres docu­ments comme de Li-I-Che, auteur de Chi­nois si vous saviez…

Ce livre publie aus­si « Pen­sées sur la Révo­lu­tion Chi­noise » de deux anar­chistes, Lee Ya See et Wu Che (Minus 8, V‑76).

« 1. Dès le début, le par­ti com­mu­niste chi­nois était un orga­nisme bour­geois. Le par­ti était fait selon une struc­ture hié­rar­chique. C’é­tait un État en minia­ture. Il assi­mi­lait toutes les formes, les tech­niques et la men­ta­li­té de la bureau­cra­tie [[Voir la tra­di­tion sécu­laire chi­noise de la bureau­cra­tie, intro­duite en Occi­dent par les jésuites espa­gnols : concours, nota­tion de 0 à 20, man­da­ri­nat, etc.]]. Les membres devaient res­pec­ter l’o­béis­sance et apprendre à véné­rer l’au­to­ri­té. L’au­to­ri­té du par­ti, à son tour, ensei­gnait les habi­tudes du com­man­de­ment de l’au­to­ri­ta­risme, de la mani­pu­la­tion et de l’é­go­tisme. En même tempe, le par­ti était le dis­ciple rachi­tique du komin­tern à Moscou. » 

« 2. La nou­velle classe bureau­cra­tique capi­ta­liste en Chine n’est pas issue du déve­lop­pe­ment de nou­veaux modes de pro­duc­tion. Au contraire, la bureau­cra­tie a don­né nais­sance à nou­veau mode de pro­duc­tion. La bureau­cra­tie chi­noise n’est pas née de l’in­dus­tria­li­sa­tion du pays, mais c’est l’in­dus­tria­li­sa­tion qui est née de l’ac­ces­sion de la bureau­cra­tie au pouvoir. » 

« 3. Mao a com­men­cé la Grande Révo­lu­tion Cultu­relle en 1966. C’é­tait une lutte pour le pou­voir entre les deux fac­tions de la classe bureau­cra­tique capi­ta­liste et c’é­tait aus­si une ten­ta­tive pour mou­ler la pen­sée du peuple chi­nois selon (la volon­té) de la caste de Mao. La réponse immé­diate et tumul­tueuse des masses à l’ap­pel de Mao à la rébel­lion mit en évi­dence le mécon­ten­te­ment extrême contre les « par­ti­sans du capi­ta­lisme » et le sys­tème en vigueur depuis 1949. Les masses y mirent fin en s’op­po­sant non seule­ment « aux par­ti­sans du capi­ta­lisme » mais aus­si à la bureaucratie. »

« 14. Une pseu­do-révo­lu­tion était deve­nue une révo­lu­tion réelle. » « 90 % des cadres supé­rieurs (du par­ti) furent écar­tés. À Hunan, Chang P’ing­hua, Chang Po-sen, Hua Kuo-feng et com­pa­gnie virent leur pou­voir réduit à zéro. […] » (cita­tion d’« où va la Chine »)

« 22. La mani­fes­ta­tion spon­ta­née de 100 000 per­sonnes sur la place de Tien An Man [[Allu­sion aux inci­dents du 5 avril 1976 entre le peuple et l’ar­mée, à cause de l’in­ter­dic­tion des cou­ronnes mor­tuaire en l’hon­neur de Tchou-EnLai.]] (et d’autres, semble-t-il, à Cheng­chow et Kum­ming) montrent que les masses donnent une réponse à la ques­tion « Où va la Chine ? » ; qu’elles haïssent inten­sé­ment le sys­tème exis­tant et la classe diri­geante ; qu’elles veulent contrô­ler leur propre des­tin ; qu’elles dési­rent la fin de « la socié­té féo­dale de Chin Shih Huang ». Pour la pre­mière fois depuis la Révo­lu­tion Cultu­relle, les masses se sont mani­fes­tées lar­ge­ment. Est-ce que les masses appuyaient la « voie capi­ta­liste » ? Non ! Les masses ont don­né leur ver­dict pen­dant la Révo­lu­tion Cultu­relle. Quand les masses ont ren­du hom­mage à Tchou-En-Lai, c’é­tait pour mani­fes­ter leur pro­tes­ta­tion contre le tour actuel de la poli­tique. Cela était néces­saire cause de la nature extrê­me­ment répres­sive du sys­tème de direc­tion actuelle. »

« 23. Face à l’ac­tion spon­ta­née des masses, la bureau­cra­tie a agi rapi­de­ment. En pro­po­sant un com­pro­mis qui évin­çait Teng Hsia-ping (mais en le gar­dant comme membre du par­ti), la frac­tion maoïste radi­cale s’est unie aux « par­ti­sans du capi­ta­lisme » pour domi­ner les masses. Mépri­sant les vio­la­tions de la consti­tu­tion de l’É­tat, la classe diri­geante montre publi­que­ment qu’elle peut se ser­vir de n’im­porte quel pré­texte pour conser­ver le pou­voir. Les bureau­crates, Mao, les par­ti­sans du capi­ta­lisme et com­pa­gnie, tremblent devant l’ac­tion spon­ta­née des masses. » 

« 24. La révo­lu­tion socia­liste est une voie longue et tor­tueuse, mais la fin de l’ère bar­bare de Mao Tse-tung est en vue. »

(Fin des « Pen­sées ». Les textes sont en anglais…) 

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