C’est ainsi que se présente la revue chinoise de Hong-Kong faite par des exilés de Chine et d’ex gardes rouges. Les numéros en notre possession (6, depuis mai 76) montrent une tendance qu’on peut qualifier de libertaire, qui offre un vaste matériel sur les discussions et les manifestations en Chine communiste. Au contraire de bien des publications d’émigrés, la situation locale est évoquée ainsi que la répression en Indonésie. En avril 77, le groupe a publié un livre d’analyse The Revolution is dead ; Long live the Revolution (readings on the Great Proletarian Cultural Revolution from an ultra left perspective) (La Révolution est morte ; Vive la Révolution. Textes sur la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne d’un point de vue gauchiste). Trois démarches apparaissent : marxiste-léniniste, plus ou moins libertaire (Raya Dunayevekaya, situe Cayo Brebdel) et gauchiste. Cette dernière partie présente le fameux texte « Où va la Chine ? », dont le titre en soi est une claque aux visions triomphalistes de Mao et du parti, et d’autres documents comme de Li-I-Che, auteur de Chinois si vous saviez…
Ce livre publie aussi « Pensées sur la Révolution Chinoise » de deux anarchistes, Lee Ya See et Wu Che (Minus 8, V‑76).
« 1. Dès le début, le parti communiste chinois était un organisme bourgeois. Le parti était fait selon une structure hiérarchique. C’était un État en miniature. Il assimilait toutes les formes, les techniques et la mentalité de la bureaucratie [[Voir la tradition séculaire chinoise de la bureaucratie, introduite en Occident par les jésuites espagnols : concours, notation de 0 à 20, mandarinat, etc.]]. Les membres devaient respecter l’obéissance et apprendre à vénérer l’autorité. L’autorité du parti, à son tour, enseignait les habitudes du commandement de l’autoritarisme, de la manipulation et de l’égotisme. En même tempe, le parti était le disciple rachitique du komintern à Moscou. »
« 2. La nouvelle classe bureaucratique capitaliste en Chine n’est pas issue du développement de nouveaux modes de production. Au contraire, la bureaucratie a donné naissance à nouveau mode de production. La bureaucratie chinoise n’est pas née de l’industrialisation du pays, mais c’est l’industrialisation qui est née de l’accession de la bureaucratie au pouvoir. »
« 3. Mao a commencé la Grande Révolution Culturelle en 1966. C’était une lutte pour le pouvoir entre les deux factions de la classe bureaucratique capitaliste et c’était aussi une tentative pour mouler la pensée du peuple chinois selon (la volonté) de la caste de Mao. La réponse immédiate et tumultueuse des masses à l’appel de Mao à la rébellion mit en évidence le mécontentement extrême contre les « partisans du capitalisme » et le système en vigueur depuis 1949. Les masses y mirent fin en s’opposant non seulement « aux partisans du capitalisme » mais aussi à la bureaucratie. »
« 14. Une pseudo-révolution était devenue une révolution réelle. » « 90 % des cadres supérieurs (du parti) furent écartés. À Hunan, Chang P’inghua, Chang Po-sen, Hua Kuo-feng et compagnie virent leur pouvoir réduit à zéro. […] » (citation d’« où va la Chine »)
« 22. La manifestation spontanée de 100 000 personnes sur la place de Tien An Man [[Allusion aux incidents du 5 avril 1976 entre le peuple et l’armée, à cause de l’interdiction des couronnes mortuaire en l’honneur de Tchou-EnLai.]] (et d’autres, semble-t-il, à Chengchow et Kumming) montrent que les masses donnent une réponse à la question « Où va la Chine ? » ; qu’elles haïssent intensément le système existant et la classe dirigeante ; qu’elles veulent contrôler leur propre destin ; qu’elles désirent la fin de « la société féodale de Chin Shih Huang ». Pour la première fois depuis la Révolution Culturelle, les masses se sont manifestées largement. Est-ce que les masses appuyaient la « voie capitaliste » ? Non ! Les masses ont donné leur verdict pendant la Révolution Culturelle. Quand les masses ont rendu hommage à Tchou-En-Lai, c’était pour manifester leur protestation contre le tour actuel de la politique. Cela était nécessaire cause de la nature extrêmement répressive du système de direction actuelle. »
« 23. Face à l’action spontanée des masses, la bureaucratie a agi rapidement. En proposant un compromis qui évinçait Teng Hsia-ping (mais en le gardant comme membre du parti), la fraction maoïste radicale s’est unie aux « partisans du capitalisme » pour dominer les masses. Méprisant les violations de la constitution de l’État, la classe dirigeante montre publiquement qu’elle peut se servir de n’importe quel prétexte pour conserver le pouvoir. Les bureaucrates, Mao, les partisans du capitalisme et compagnie, tremblent devant l’action spontanée des masses. »
« 24. La révolution socialiste est une voie longue et tortueuse, mais la fin de l’ère barbare de Mao Tse-tung est en vue. »
(Fin des « Pensées ». Les textes sont en anglais…)