La Presse Anarchiste

Bakounine et la science

[(Comme nous l’annoncions dans notre no 5, nous nous fai­sons un plai­sir de publier ici, tiré de l’ouvrage de Gas­ton Leval sur Bakou­nine, le cha­pitre dans lequel notre cama­rade pense avoir démon­tré que l’on se trompe lorsque, comme par exemple, au moins appa­rem­ment, Brup­ba­cher, on voit dans Bakou­nine un enne­mi de la pen­sée ration­nelle et de la science. – Les lec­teurs de « Témoins » juge­ront eux-mêmes.)]

L’attitude de Bakou­nine devant la science peut être pré­sen­tée, si l’on ne garde de ses lec­tures que des rémi­nis­cences par­tielles ou si l’on ne choi­sit que cer­taines pen­sées polé­miques, comme celle d’un adver­saire irré­duc­tible. Nom­breuses sont – nous en ver­rons bien­tôt quelques échan­tillons – les phrases, les décla­ra­tions caté­go­riques qui, prises iso­lé­ment, donnent au lec­teur non aver­ti cette impres­sion. On peut, dans l’ensemble de ses écrits, faire un choix de pen­sées, grâce aux­quelles cer­tains com­men­ta­teurs l’ont assi­mi­lé à un bar­bare pri­mi­tif dont la vio­lence élé­men­taire ramène l’homme au triomphe de l’instinct ou des forces incon­trô­lées de la nature humaine.

Défense de la science

Dans l’intéressante pré­face à l’édition fran­çaise de la « Confes­sion » de Bakou­nine, le doc­teur Fritz Brup­ba­cher a repro­duit quelques phrases qui, iso­lé­ment prises, ont une allure d’aphorismes et donnent au lec­teur non pré­ve­nu l’impression d’une condam­na­tion for­melle de la science. Le but n’est pas mal­hon­nête. En pleine réac­tion contre la ten­dance de la socié­té moderne à rem­pla­cer l’initiative de l’homme par la domi­na­tion d’une poi­gnée de tech­no­crates et de savants, le doc­teur Brup­ba­cher affirme que si Bakou­nine n’est plus actuel, il le rede­vien­dra quand l’humanité aura réagi contre cette domi­na­tion. Et dans l’intention de défendre les indi­vi­dus, il pré­sente celui dont il écrit la bio­gra­phie de telle façon que, pour peu que l’on soit déjà influen­cé par les défor­ma­tions si répan­dues, on achève de se convaincre que Bakou­nine n’était qu’un bar­bare enne­mi de la civi­li­sa­tion et qu’il allait tout de même, beau­coup trop loin. Sur­tout parce qu’après la cita­tion de ces phrases iso­lées, le bio­graphe insiste beau­coup sur le côté des­truc­teur de la pen­sée de l’homme qu’il admire ; tra­ver­sant une période néo-nihi­liste devant la méca­ni­sa­tion et l’étatisation de la socié­té, il était très heu­reux de trou­ver chez lui quelques pen­sées concor­dant avec les siennes.

Mais ces quelques pen­sées éparses ne sont pas la pen­sée de Bakou­nine sur la science, car un scien­tiste pour­rait, en uti­li­sant le même pro­cé­dé, jus­ti­fier appa­rem­ment, en le citant, sa croyance en la nou­velle idole. « Sei­gneur, gar­dez-moi de mes amis, mes enne­mis, je m’en charge », disait Vol­taire. Bakou­nine res­sus­ci­té pour­rait le dire aus­si. Trop sou­vent ses admi­ra­teurs l’ont aus­si mal connu et inter­pré­té que ses adver­saires, et lui ont fait plus de mal.

Tout ce qui pré­cède et tout ce qui sui­vra dans ce livre prouve qu’il n’était pas enne­mi de la science ; qu’au contraire, il s’en ins­pi­rait, s’appuyait sur elle pour fon­der ses idées, les jus­ti­fier, en assu­rer le triomphe. La science, a‑t-il écrit, est « l’expérience accu­mu­lée des siècles », ou « l’expérience accu­mu­lée, coor­don­née et réflé­chie ». Et qui, à moins d’être un méta­phy­si­cien, un croyant tra­di­tio­na­liste d’un style nou­veau, ou sim­ple­ment un char­la­tan, pour­rait mépri­ser, dans une œuvre socio­lo­gique sérieuse, cette expé­rience col­lec­tive accu­mu­lée, cette connais­sance sériée, clas­si­fiée des faits sans laquelle toute affir­ma­tion sur d’aussi graves pro­blèmes n’est qu’irresponsabilité ?

Bakou­nine aimait la science, et il a rêvé pour elle le plus haut but intel­lec­tuel qui soit :

« Recon­naître tous les élé­ments réels ou corps simples dont les com­bi­nai­sons diverses consti­tuent tous les corps com­po­sés orga­niques et inor­ga­niques qui rem­plissent l’univers ; recons­ti­tuer, par la pen­sée et dans la pen­sée, à l’aide de toutes les pro­prié­tés ou actions inhé­rentes à cha­cun, et en n’admettant jamais aucune théo­rie qui ne soit sin­cè­re­ment véri­fiée et confir­mée par l’observation et par l’expérimentation les plus rigou­reuses ; recons­ti­tuer, dis-je, ou recons­truire men­ta­le­ment tout l’univers avec l’infinie diver­si­té de ses déve­lop­pe­ments astro­no­miques, géo­lo­giques, bio­lo­giques et sociaux, tel est le but idéal et suprême de la science, un but qu’aucun homme ni aucune géné­ra­tion ne réa­li­se­ront sans doute jamais, mais qui, res­tant néan­moins l’objet d’une ten­dance irré­sis­tible de l’esprit humain, imprime à la science, consi­dé­rée dans sa plus haute expres­sion, une sorte de carac­tère reli­gieux, nul­le­ment mys­tique ni sur­na­tu­rel, un carac­tère tout à fait réa­liste et ration­nel, mais exer­çant en même temps sur ceux qui sont capables de la res­sen­tir, toute l’action exal­tante des aspi­ra­tions infi­nies. » [[« Consi­dé­ra­tions philosophiques ».]]

Cette « action exal­tante des aspi­ra­tions infi­nies », par le seul fait de l’exprimer si magni­fi­que­ment, il l’éprouvait lui-même quand il pou­vait se plon­ger dans l’étude de l’astronomie et de la phy­sique, et nous sommes convain­cu que s’il n’avait pas dû, pous­sé par sa conscience et par son cœur, s’occuper de la vie sociale des hommes, il aurait, après avoir tra­ver­sé dans sa jeu­nesse la phi­lo­so­phie spé­cu­la­tive, don­né avec joie toutes ses facul­tés intel­lec­tuelles, toute sa vie et toute son âme à la recherche scientifique.

Mais si grand que soit son amour pour la science, il n’ignore pas que l’homme, fait infime et minus­cule dans l’immensité de l’espace et dans l’éternité du temps, ne pour­ra pro­ba­ble­ment jamais embras­ser toute la vie, ses causes, ses mani­fes­ta­tions, ses buts :

« La ques­tion est de savoir ce qui est logique dans la nature aus­si bien que dans l’histoire. Ce n’est pas aus­si facile à déter­mi­ner qu’on peut le pen­ser de prime abord. Car, pour le savoir en per­fec­tion, de manière à ne jamais se trom­per, il fau­drait avoir la connais­sance de toutes les causes, influences, actions et réac­tions qui déter­minent la nature d’une chose et d’un fait, sans en excep­ter une seule, fût-elle la plus éloi­gnée et la plus faible. Et quelle est la phi­lo­so­phie ou la science qui pour­ra se flat­ter de pou­voir jamais les embras­ser toutes et de les épui­ser dans son ana­lyse ? Il fau­drait être bien pauvre d’esprit, bien peu conscient de l’infinie richesse du monde réel pour pré­tendre y atteindre. » [[« Fédé­ra­lisme, Socia­lisme et Antithéologisme. »]]

Ces limites impo­sées à l’homme par sa propre nature, il s’en occu­pe­ra en diverses occa­sions, dans un style et dans un esprit qui par­fois touchent au sublime. Mais immé­dia­te­ment après, il réfute ceux qui seraient ten­tés de déduire de cette impuis­sance de l’homme à tout savoir, la faillite ou l’inutilité de ses connais­sances ou de son étude des faits :

« Faut-il pour cela dou­ter de la science ? Faut-il, parce qu’elle ne nous donne que ce qu’elle peut nous don­ner la reje­ter ? Ce serait une autre folie, et bien plus funeste encore que la pre­mière. Per­dez la science, et faute de lumière vous retour­ne­rez à l’état de gorilles, nos ancêtres, et force vous sera de refaire pen­dant encore quelque mille ans, tout le che­min que l’humanité à dû par­cou­rir à tra­vers les fan­tas­ma­go­riques lueurs de la reli­gion et de la méta­phy­sique, pour arri­ver, de nou­veau à la lumière impar­faite, il est vrai, mais du moins très cer­taine que nous pos­sé­dons aujourd’hui. » [[Ibid.]]

Ce « très cer­taine » peut don­ner lieu à des contes­ta­tions. Bakou­nine, comme toutes les intel­li­gences qui sui­vaient alors le déve­lop­pe­ment des sciences, avait une foi trop grande dans ce que décou­vraient et pro­cla­maient les savants. Depuis, cer­taines affir­ma­tions ont été bat­tues en brèche. Men­del et De Wries ont réfu­té une par­tie du dar­wi­nisme ; Kro­pot­kine aus­si, à un autre point de vue ; la géné­tique nie le trans­for­misme ; Ein­stein a rec­ti­fié New­ton, et des théo­ries bio­lo­giques nou­velles naissent encore. Il n’empêche que l’investigation métho­dique et conscien­cieuse, expé­ri­men­tale et ration­nelle des faits, pro­gresse ; si elle rec­ti­fie cer­taines erreurs, elle découvre sans cesse des véri­tés nou­velles. La théo­rie micro­bienne n’a pas failli, la psy­cho­lo­gie expé­ri­men­tale s’est déve­lop­pée ; nul ne peut nier l’avance extra­or­di­naire – peut-être trop cer­taine, hélas – de la phy­sique et de la chi­mie, qui per­mettent de péné­trer les secrets de la vie et de la modi­fier, de son­der l’immensité, de cap­ter dans l’espace les ondes élec­tro­ma­gné­tiques que l’homme uti­lise pour son bien-être et sa culture, d’isoler et de dés­in­té­grer l’atome.

C’est tou­jours du sens géné­ral des affir­ma­tions qu’il faut tenir compte chez les pen­seurs comme Bakou­nine, qui, du reste, a su rec­ti­fier ce qui était rectifiable :

« Les hypo­thèses de la science ration­nelle se dis­tinguent de celles de la méta­phy­sique en ce sens que cette der­nière, dédui­sant les siennes comme les consé­quences logiques d’un sys­tème abso­lu, pré­tend for­cer la nature à les accep­ter ; tan­dis que les hypo­thèses de la science ration­nelle, issues non d’un sys­tème trans­cen­dant, mais d’une syn­thèse qui n’est jamais elle-même que le résu­mé ou l’expression géné­rale d’une quan­ti­té de faits démon­trés par l’expérience, ne peuvent jamais avoir ce carac­tère impé­ra­tif et obli­ga­toire, étant au contraire tou­jours pré­sen­tées de manière à ce qu’on puisse les reti­rer aus­si­tôt qu’elles se trouvent démen­ties par de nou­velles expé­riences. » [[Ibid.]]

Science et Sociologie

Ne pou­voir décou­vrir en toutes choses la véri­té défi­ni­tive n’empêche cepen­dant pas d’utiliser les connais­sances acquises aus­si sérieu­se­ment que pos­sible, et qui, grou­pées en vastes ensembles dont les par­ties se rat­tachent entre elles par des carac­té­ris­tiques com­munes, consti­tuent les dif­fé­rentes sciences, le savoir humain. Ce savoir et ces sciences ont été coor­don­nés par Auguste Comte en un sys­tème géné­ral, le « posi­ti­visme », dont la socio­lo­gie est le cou­ron­ne­ment. À plu­sieurs reprises, Bakou­nine s’en déclare enthou­siaste par­ti­san. Il en approuve la méthode, qui consiste à s’élever « des mathé­ma­tiques pures à la méca­nique, à l’astronomie ; puis à la phy­sique, à la chi­mie, à la géo­lo­gie et à la bio­lo­gie (y com­pre­nant la clas­si­fi­ca­tion, l’anatomie et la phy­sio­lo­gie com­pa­rée des plantes d’abord, puis du règne ani­mal), et en finit par la socio­lo­gie qui embrasse toute l’humaine his­toire en tant que déve­lop­pe­ment de l’état humain col­lec­tif et indi­vi­duel dans la vie poli­tique, éco­no­mique, sociale, reli­gieuse, artis­tique et scien­ti­fique. » [[Ibid.]]

La socio­lo­gie est donc une science. Bakou­nine ne l’invente pas, mais il le répète et à ses enne­mis et à ses cama­rades, à ceux qu’il faut convaincre ou qui sont convain­cus, pour ame­ner les pre­miers à l’étude des faits et leur mon­trer la véri­té et la néces­si­té de prendre posi­tion d’après cette véri­té, pour empê­cher les seconds de com­mettre des erreurs tac­tiques ou de se perdre dans la phra­séo­lo­gie ou l’abstraction stérile.

« L’histoire et la sta­tis­tique nous prouvent que le corps social, comme tout autre corps natu­rel, obéit dans ses évo­lu­tions et trans­mu­ta­tions à des lois géné­rales, et qui paraissent tout aus­si néces­saires que celles du monde phy­sique. Déga­ger ces lois des évé­ne­ments pas­sés et de la masse des faits pré­sents, tel doit être l’objet de cette science. En dehors de l’immense inté­rêt qu’elle pré­sente déjà à l’esprit, elle nous pro­met dans l’avenir une grande uti­li­té pra­tique ; car de même que nous ne pou­vons domi­ner la nature et la trans­for­mer selon nos besoins pro­gres­sifs que grâce à la connais­sance que nous avons acquise de ses lois, nous ne pour­rons réa­li­ser notre liber­té et notre pros­pé­ri­té dans le milieu social qu’en tenant compte des lois natu­relles et per­ma­nentes qui les gou­vernent. » [[« Pro­tes­ta­tion de l’Alliance ».]]

Puisque la socio­lo­gie est une science, le socia­lisme, qui prend sa source en elle, a par consé­quent une base scien­ti­fique. Il ne se sépare pas ni ne peut se sépa­rer de « la science nou­velle, la science posi­tive fon­dée sur l’analyse expé­ri­men­tale et sur la coor­di­na­tion ration­nelle des faits et qui, don­nant la main au socia­lisme et se pro­cla­mant avec lui maté­ria­liste et athée, doit révo­lu­tion­ner le monde ». [[« Eta­tis­mo y Anarquia ».]]

L’instinct de révolte, le sen­ti­ment de la jus­tice, les caté­go­ries du rai­son­ne­ment ne suf­fisent donc pas pour fon­der le socialisme,

Mal­gré sa haute estime de Prou­dhon, mal­gré tout ce qu’il lui doit, Bakou­nine n’hésite pas à pro­cla­mer la méthode prou­dho­nienne infé­rieure à celle de Marx, et la cri­tique impi­toyable de ce der­nier en grande par­tie jus­ti­fiée, parce que « Prou­dhon, mal­gré tous ses efforts pour se pla­cer sur le ter­rain des faits, est demeu­ré idéa­liste et métaphysicien ». 

Aus­si recom­mande-t-il tou­jours la méthode scien­ti­fique qu’il s’est lui-même effor­cé d’appliquer quand les évé­ne­ments n’ont pas inter­rom­pu ses études en le pous­sant à l’action révo­lu­tion­naire. Celui qui le voit agir, des mon­tagnes de Suisse, sur la Suisse elle-même, sur l’Italie, l’Espagne, la France, la Bel­gique, la Rus­sie, est frap­pé par la coor­di­na­tion et l’intégration de ses idées. Ses lettres, ses confé­rences, ses conver­sa­tions, ses écrits four­nissent des prin­cipes essen­tiels, des conseils pra­tiques. En même temps il orga­nise, par les socié­tés secrètes, ou semi-secrètes, et les asso­cia­tions ouvrières publiques, les élé­ments pra­tiques du com­bat social et les bases de la socié­té nou­velle. Il est à la fois pen­seur, lut­teur, orga­ni­sa­teur, et s’efforce à ce que les mili­tants, intel­lec­tuels et ouvriers, le soient éga­le­ment. Car dans le com­bat pour le pro­grès humain, l’action sans pen­sée n’est que vaine agi­ta­tion, la pen­sée sans action est lettre morte, et toutes deux ne mènent à rien sans orga­ni­sa­tion. Or l’organisation elle-même est une science, et la trans­for­ma­tion de l’organisation sociale exige de solides connais­sances générales.

Pour qu’ils triomphent dans leur lutte révo­lu­tion­naire, Bakou­nine recom­mande aux tra­vailleurs d’employer cette arme de la science qui doit com­plé­ter la soli­da­ri­té, « non la science bour­geoise, fal­si­fiée, méta­phy­sique, juri­dique, poli­tique, éco­no­mique, pédan­tesque et doc­tri­naire, qu’on enseigne dans les uni­ver­si­tés, mais la vraie science humaine, fon­dée sur la connais­sance posi­tive des faits his­to­riques et sociaux, et n’acceptant d’autre ins­pi­ra­tion que la rai­son, le bon sens. Savoir c’est pou­voir ». [[Lettre à « l’Égalité ».]] Il conseille au monde ouvrier de s’instruire, « de s’emparer de cette arme si puis­sante de la science sans laquelle il pour­rait bien faire des révo­lu­tions, mais ne serait jamais en état d’établir, sur les ruines des pri­vi­lèges bour­geois, cette éga­li­té, cette jus­tice et cette liber­té qui consti­tuent le fond même de toutes ses aspi­ra­tions poli­tiques et sociales ». [[« L’empire knou­to-ger­ma­nique et la Révo­lu­tion sociale ».]]

La science ne doit donc pas seule­ment être un moyen d’émancipation intel­lec­tuelle et morale, qui libère les masses des croyances reli­gieuses et de la tutelle des églises, du res­pect de l’autorité et de la croyance au gou­ver­ne­ment. Elle sera aus­si un auxi­liaire pré­cieux, et qui, par les connais­sances qu’elle sup­pose, dont en somme elle est consti­tuée, ren­dra, grâce à leur niveau intel­lec­tuel, à leur capa­ci­té d’organisation, et à l’utilisation des tech­niques, les tra­vailleurs aptes à orga­ni­ser la socié­té par eux-mêmes.

Par­ve­nus à ce point, les bien­faits de la science aug­mentent. Elle devient la garan­tie de la liber­té. Quand les lois natu­relles de la socié­té, qui sont les normes d’activité, les moda­li­tés inhé­rentes à toute vie col­lec­tive, « auront été recon­nues d’abord par la science, et que de la science, au moyen d’un large sys­tème d’éducation et d’instruction popu­laires, elles auront pas­sé dans la conscience de tous, la ques­tion de la liber­té sera par­fai­te­ment réso­lue. Les auto­ri­taires les plus récal­ci­trants doivent recon­naître qu’alors il n’y aura plus besoin d’organisation [[Bakou­nine repousse ici l’organisation « poli­tique », non l’organisation en soi. C’est pour­quoi l’adjectif « poli­tiques » est ici mis au plu­riel. Ce que cer­tains com­men­ta­teurs ont feint de mécon­naître.]], ni de direc­tion, ni de légis­la­tion poli­tiques, trois choses qui, soit qu’elles émanent de la volon­té du sou­ve­rain, soit qu’elles résultent du vote d’un par­le­ment élu par le suf­frage uni­ver­sel, et alors même qu’elles seraient conformes au sys­tème des lois natu­relles – ce qui n’a jamais eu lieu et ne pour­ra jamais avoir lieu –, sont tou­jours éga­le­ment funestes et contraires à la liber­té des masses, parce qu’elles leur imposent un sys­tème de lois exté­rieures, et par consé­quent des­po­tiques. » [[« Les Endormeurs ».]]

Dans le domaine social et révo­lu­tion­naire, le rôle de la science est donc décisif.

(À suivre)

[/​Gaston Leval/​]

La Presse Anarchiste