La Presse Anarchiste

Une lettre d’Italie

Un ami ita­lien qui a récem­ment beau­coup voya­gé en Espagne nous écrit :

« … j’ai trou­vé (en Espagne) une situa­tion des plus inté­res­santes pour un Ita­lien. Le régime va se décom­po­sant, et alors que, chez nous, le fas­cisme repré­sen­tait une sorte d’exaspération éta­tiste hégé­lienne, en Espagne l’unité du pays se brise au pro­fit de struc­tures par­ti­cu­lières. L’une de ces struc­tures est l’Église, une autre l’armée, une autre encore, moins forte d’ailleurs parce qu’économiquement en mau­vaise pos­ture, la bureaucratie.

Hier, Fran­co don­nait à entendre aux Espa­gnols qu’un pays latin et médi­ter­ra­néen avait besoin d’une dic­ta­ture pour se moder­ni­ser et mar­cher dans le sens du pro­grès. Il men­tait en attri­buant au fas­cisme ita­lien des mérites qu’il n’a jamais eus, vu que l’industrialisation de l’Italie eut lieu dans la seconde moi­tié du siècle der­nier grâce à l’initiative d’une bour­geoi­sie euro­péi­sante. Aus­si, à l’heure actuelle, Fran­co ne veut-il à aucun prix que les Espa­gnols se rendent compte qu’en dépit de la guerre, qu’en dépit aus­si du gas­pillage rela­tif des richesses, l’Italie reste, com­pa­rée à l’Espagne, un pays moderne, capable de nou­veaux pro­grès. Et il ne veut pas davan­tage qu’on sache que, mal­gré tout, la démo­cra­tie, en Ita­lie, a recons­truit le pays avec une rapi­di­té dont n’eût été capable aucune dictature…

La véri­té est que l’Italie et l’Espagne sont des pays on ne peut plus dif­fé­rents. Nous avons reçu notre marque défi­ni­tive de l’humanisme ; la leur pro­cède du concile de Trente. »

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