Paul Valet : « Les points sur les i » (Julliard)
Il est peu de poésies plus discrètement à vif que la poésie de Valet. À cet égard elle fait penser à celle de Le Maguet. Toutes deux sont nourries de la peine des hommes. Seulement, la poésie de Valet refuse le chant, – on a presque envie de dire qu’elle se refuse. Ce n’est pas sans grandeur. Une parole comme intérieure au silence ; et à l’angoisse. Ce n’est pas non plus sans danger. Un danger que Valet accepte, qu’il cherche, même. Soit, – mais les quelques poèmes que « Témoins » a publiés de lui il y a deux ans et que l’on retrouve dans le volume, ce péril, du fait d’être seulement quelques-uns, ils y faisaient moins songer que n’y oblige, m’a‑t-il paru, cet assez volumineux recueil. Et puis (ici, trop de souvenirs de lectures, peut-être, me rendent injuste, ravivés, je l’avoue, par le titre, à mon sens, plutôt malheureux du livre), la délicatesse mise à part (et elle est grande), il y a dans l’« approche » de notre monde par Valet quelque affinité avec les meilleures tentatives du premier après-guerre en Allemagne. Ce n’est assurément pas par hasard que Valet mettait récemment, en tête de quelques poèmes publiés par « les Lettres nouvelles », des lignes de Brecht (« Sur l’air des ténèbres »). Aucune objection à cela, – sauf la personne (politique-apolitique) de Brecht. Malgré le proverbe, l’histoire, parfois, se recommence. Espérons que par la suite Valet nous démontrera tout à fait que ce recommencement (partiel) est aussi un commencement.
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