Le
Comité fédéral jurassien a reçu du
Conseil général à Londres, la communication
suivante :
General
Council of the International Working Men’s Association.
33,
Rathbone Place, Oxford Street.
Au
Comité fédéral Jurassien.
Citoyens,
Vu
la résolution du Congrès de Bâle, fixant le siège
du prochain Congrès à Paris ;
Vu
la résolution du Conseil général, en date du 12
juillet 1870, par laquelle, en face de l’impossibilité de
tenir un Congrès à Paris, et conformément à
l’article 4 des statuts généraux, le Congrès fut
convoqué à se réunir à Mayence ;
Considérant
qu’aujourd’hui les poursuites dirigées contre
l’Internationale, tant en France qu’en Allemagne, rendent impossible
la réunion du Congrès, soit à Paris, soit à
Mayence ;
Vu
l’article 4 des statuts généraux qui confie au Conseil
général le droit, en cas d’urgence, de changer le lieu
du Congrès ;
Le
Conseil général convoque le prochain Congrès de
l’Association Internationale des travailleurs, pour le lundi 2
septembre 1872, à La Haye (Hollande).
II
Considérant
que les questions mises à l’ordre du jour pour le Congrès
qui devait se tenir à Mayence, le 5 septembre 1870, ne
correspondent plus aux besoins de l’Internationale, besoins
profondément affectés par les grands événements
historiques qui se sont accomplis depuis ;
Que
de nombreuses sections, ou fédérations, appartenant à
divers pays, ont proposé que le prochain Congrès
s’occupe avant tout de la révision des statuts et règlements
généraux ;
Que
les persécutions auxquelles l’Internationale se trouve
actuellement exposée dans presque tous les pays de l’Europe,
lui imposent de resserrer son organisation ;
Le
Conseil général, tout en se réservant la faculté
de rédiger plus tard un programme plus étendu, complété
par les propositions à faire par les sections et les
fédérations, met à l’ordre du jour, comme la
question la plus importante à discuter par le Congrès
de La Haye :
La
révision des statuts et règlements généraux.
Au nom
du Conseil général :
H.
Jung.
Secrétaire
pour la Suisse.
10
juillet 1872
– O –
En
présence de la décision du Conseil général,
qui a choisi la Haye, en Hollande, pour siège du Congrès,
le Comité fédéral jurassien s’est réuni
et a cru de son devoir d’adresser au Conseil général la
lettre suivante :
Au
Conseil général de l’Internationale, à Londres
Citoyens,
Nous
avons appris, par la voie des journaux socialistes d’abord, et
aujourd’hui par une lettre officielle du correspondant pour la
Suisse, le citoyen Jung, en date du 10 juillet, que le Conseil
général a choisi la Haye pour lieu du prochain Congrès
général.
Nous
avons à vous présenter à ce sujet une
observation très sérieuse, espérant que vous la
prendrez en considération et que vous y ferez droit.
Les
Statuts généraux, en laissant au Conseil général
le droit de changer, dans certains cas, le siège du Congrès,
n’ont certainement pas entendu dispenser par là le Conseil
général de consulter, avant de prendre une décision,
les convenances des diverses fédérations. Or l’intérêt
de chaque fédération et de l’Association entière
étant de voir le plus grand nombre possible de délégués
participer au Congrès, le bon sens indique que le lieu du
Congrès doit être autant que possible un point central,
à la portée de toutes les fédérations ou
au moins du plus grand nombre.
Or,
la Haye ne remplit pas ces conditions. C’est au contraire un point
extrêmement excentrique, et le choix de cette ville rendrait
presque impossible à une partie des fédérations
l’envoi de délégués, vu les frais énormes
qu’elles auraient à supporter.
Le
pays qui nous paraissait naturellement désigné pour
être le siège du Congrès, c’était la
Suisse, tant par sa position centrale que par la liberté
relative dont on y jouit. Nous venons donc, de la façon la
plus formelle, et assurés qu’après un nouvel examen de
la question vous ne pourrez que partager notre opinion, vous demander
de revenir sur votre décision, et de choisir pour siège
du Congrès une ville quelconque de la Suisse.
Nous
faisons appel à votre sentiment d’équité ;
il ne peut pas vouloir être dans votre intention de fermer,
d’une manière indirecte, les portes du Congrès aux
délégués de certaines fédérations ;
vous ne voudrez pas que le Congrès général, où
tant de graves questions doivent recevoir leur solution, voie son
autorité morale affaiblie par ce fait ; et vous voudrez,
au contraire, donner une preuve publique de la loyauté avec
laquelle vous acceptez le débat, en faisant d’autant plus
droit à notre réclamation, qu’elle vient d’une
fédération qui se trouve en dissidence de vues avec
vous sur plusieurs points.
Salut.
et solidarité.
Sonvillier,
15 juillet 1872
Au nom
et par ordre du Comité fédéral jurassien :
Le
secrétaire correspondant, Adhémar Schwitzguébel.
Il
est intéressant de faire remarquer que, pendant que le Comité
fédéral jurassien ne recevait notification du siège
du Congrès que le 15 juillet, la Emancipacion de
Madrid, journal de M. Lafargue, était en mesure d’annoncer
déjà dans son numéro du 29 juin, que le
Congrès aurait probablement lieu en Hollande. Et ce n’était
pas du Conseil fédéral espagnol que M. Lafargue tenait
cette nouvelle, puisqu’il ressort d’une circulaire du Conseil
espagnol que celui-ci n’a eu connaissance de la décision du
Conseil général que le 2 juillet.
Affaires
de famille !