La Presse Anarchiste

La situation sociale en France

Notre inté­rêt semble plus por­ter sur l’Es­pagne que sur la France, alors qu’en fait nous y cher­chons des réponses aux pro­blèmes qui se posent ici. Mais, il est cer­tain que nous man­quons de recul par rap­port au quo­ti­dien et c’est pour­quoi nous allons com­men­cer une sorte de réflexion sur la situa­tion sociale depuis fin 1977 pour ten­ter de tra­cer des lignes de force et nous orien­ter en consé­quence, et dans les pro­chains numé­ros nous pas­se­rons en revue les mois écoulés.

Pour cette pre­mière ébauche, nous nous sommes ser­vis de Front Liber­taire, mais nous comp­tons, par la suite, uti­li­ser toute la presse, pour sérier les articles décri­vant la situa­tion sociale ou des conflits professionnels.

La pre­mière consta­ta­tion est qu’il y a eu une union « divine » entre la gauche et la droite pour geler les conflits, non seule­ment jus­qu’aux élec­tions mais après, et pra­ti­que­ment jus­qu’à main­te­nant où des débrayages chez Renault ont lieu. On peut même ajou­ter que plus qu’un gel et un frein, la gauche a même répri­mé les tra­vailleurs trop reven­di­ca­tifs témoin la CFDT, expul­sant fin sep­tembre 77 une par­tie de la sec­tion tri-PTT de Lyon gare, puis le 9 jan­vier 78 l’ex­pul­sion des 1 200 adhé­rents CFDT de la BNP for­mant 40% des membres du syn­di­cat de banque pari­sien CFDT.

Deuxième consta­ta­tion, il y a eu ― et il y a ― une foule de petits conflits de longue durée dans des petites boîtes, mais aus­si à Gene­ral Motors, Miche­lin Cler­mont, qui ont été cloi­son­nés, désa­mor­cés par les syn­di­cats. La presse bour­geoise a de plus par­lé des pro­blèmes du tex­tile, de l’a­cier et la concur­rence des bas-prix du Japon, de l’Es­pagne, etc.

Troi­sième consta­ta­tion, il y a de fait un front unique entre le patro­nat de gauche et de droite, et les syn­di­cats pour sacri­fier les tra­vailleurs « sur l’au­tel des inté­rêts supé­rieurs de la nation ».

Qua­trième et der­nière consta­ta­tion : l’at­ti­tude des cama­rades est par­ti­cu­liè­re­ment floue vis-à-vis des syn­di­cats. Front Liber­taire en est un exemple valable pour tous les anar­chistes : en février 78 (n° 78, p. 7) un article des tra­vailleurs de Saint-Nazaire pro­pose à l’oc­ca­sion de la grève d’un jour de l’EDF une série de sug­ges­tions pra­tiques : grève consis­tant à assu­rer la gra­tui­té des ser­vices pour les usa­gers, demande de salaire éga­li­taire, etc. « C’est la riposte que peuvent pro­po­ser et mettre en appli­ca­tion les orga­ni­sa­tions syn­di­cales si elles sont soli­daires de l’ac­tion menée par les tra­vailleurs de l’EDF… »

À côté de cela, en avril 78 (n° 89, p. 4) on lit entre autres, sous la signa­ture d’au­to­nomes de Peu­geot Sochaux des appré­cia­tions sur les syn­di­cats, comme « de la CFDT à la CGT en pas­sant par les gau­chos, c’est la même merde ; plus il y a des clas­si­fi­ca­tions, plus il y a des mécon­tents et plus ça sert la rai­son d’être des syn­di­cats, d’une part, et d’autre part la direc­tion. Les syn­di­cats ne sont que l’une des com­po­santes du sys­tème mer­dique que l’on appelle « démocratie ». »

On voit que les anti-syn­di­cats se réunissent et se coor­donnent : col­lec­tifs des expul­sés CFDT de la BNP sur Paris, col­lec­tif PTT. Cette ten­dance, si elle conti­nue, peut ame­ner à une remise en cause pro­fonde des syn­di­cats dans la pra­tique des travailleurs.

Il reste qu’un débat est néces­saire sur le syn­di­ca­lisme : le débor­der pour le détruire, comme rouage du capi­ta­lisme, tou­jours et par­tout ou bien lui redon­ner une orien­ta­tion révo­lu­tion­naire qu’il aurait perdue (!!).

M.Z.

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