La Presse Anarchiste

Ilote

Il se forge des lois comme on forge des chaînes,
aucun joug n’est trop lourd pour son dos complaisant.
Oubliant de pen­ser il se dit bien-pensant.
Son corps est un robot, son chant une rengaine.

Ilote béné­vole et pri­son­nier docile
Son culte va vers ceux qui murent l’horizon.
Il a l’or pour idole, un bou­let pour blason,
Son esprit est désert et son cœur est servile.

Les sites incon­nus n’en­chantent pas ses yeux.
Sa vie et ses espoirs sont lour­de­ment aptères,
Par des sen­tiers bat­tus il arpente la terre,
L’é­cran des vani­tés lui dérobe les cieux.

Le dieu qu’il a créé est à sa pâle image,
Ceux qu’il appelle « grands » sont toi­sés d’a­près lui.
Son amour codi­fié nau­frage dans l’ennui.
Hur­ler avec les loups c’est là tout son courage.

La foule est son armure et c’est elle qu’il aime.
Loin des trou­peaux humains, il s’en­lise, éperdu,
Car, au fond de son moi n’é­tant point descendu
Il n’est plus que néant, pla­cé face à lui-même.

H. Stre­bel

La Presse Anarchiste