La Presse Anarchiste

Sur l’altruisme

L’al­truisme est une ver­tu exa­gé­rée. L’É­goïsme est son contre­poids. Je me rap­pelle avoir lu dans un petit livre, dû à la plume de Barnes, il y a déjà quelques années, ces mots : « Ce n’est pas en ser­vant autrui que nous échap­pe­rons à l’i­so­le­ment, à moins que nous consi­dé­rions le tra­vail comme un nar­co­tique mental ». 

Charles Fer­gus­son, l’au­teur de La Reli­gion de la Démo­cra­tie, a éga­le­ment écrit : 

« L’al­truisme est de l’é­goïsme en recul. Le bon sens dit à l’al­truiste : Occupe-toi de tes affaires. Et ce sont des paroles justes et nettes. Le monde sera sau­vé par ceux qui l’aiment, par ceux qui s’y inté­ressent de tout cœur, qui iden­ti­fient avec son sort leur sort personnel. 

« Si nous ne nous effor­cions pas tant de nous aimer les uns les autres, nous y réus­si­rions mieux, car nous nous ren­drions plus capables d’être aimés. À la base de l’a­mour, il y a du res­pect et une sorte de crainte. Toute per­son­na­li­té « aimable » attire, par son défi et sa méfiance du monde 

« Une civi­li­sa­tion ne se fonde point sur les sen­ti­men­ta­li­tés mor­bides de l’al­truisme, mais sur l’é­qui­libre et sur la concorde de forces per­son­nelles, sur l’af­fec­tion et la cour­toi­sie d’hommes se res­pec­tant mutuel­le­ment parce qu’ils ont éprou­vé la résis­tance les uns des autres. » 

Et à la fin, Tol­stoï lui-même, avouait son dégoût des « sen­ti­men­ta­li­tés » de l’al­truisme. Et il avait por­té l’al­truisme au point où c’en était deve­nu une folie. 

Que ser­vi­rait il à un homme d’ai­mer le monde entier, s’il perd la facul­té d’ap­pré­cier sa vie individuelle ?

Léo­nard Abbott

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