[(
Voici
la lettre de M. Ivan Anissimov, à laquelle Silone a répondu
par celle que nous publions en tête du présent cahier :
)]
Monsieur
Silone,
J’ai
reçu votre longue lettre, et me suis d’abord demandé
si vous ne vous étiez pas trompé d’adresse : des
exercices littéraires de ce genre sont transmis chaque jour
par la radio Europe libre et autres stations semblables. Puis,
j’en suis arrivé à cette conclusion que vous avez
tout simplement perdu la tête et la capacité de parler
un autre langage. A Zurich, où a eu lieu notre dialogue, vous
vous comportiez différemment.
Je
dois vous dire, Monsieur Silone, que votre lettre, irritée et
faussant intentionnellement les faits et les perspectives, âprement
hostile au socialisme et au marxisme, montre avec évidence que
les buts que vous poursuivez sont les plus réactionnaires et
que les grandes transformations sociales qui se produisent dans la
vie de l’humanité contemporaine ne vous inspirent que haine
et dégoût. Le titre de « révolutionnaire
indépendant » et de « socialiste »
ne peut s’appliquer que de façon caricaturale à tout
ce que vous écrivez. Votre lettre vous démasque
entièrement.
J’avoue
ne m’être pas fait, à Zurich, de grandes illusions sur
le caractère de votre « révolution
indépendante ». Mais votre lettre, dans laquelle
une indécente désinvolture s’allie à une
nervosité fébrile (évidemment provoquée
par le fait que la carte hongroise de la contre-révolution,
dont vous aussi aviez espéré qu’elle gagnerait, a
perdu), cette lettre révèle votre personnalité
sous le jour le plus réel, et le portrait qui s’en dégage
— il faut le dire — est tout autre que beau.
Monsieur
Silone, vous passez les limites permises en vous permettant de parler
de mon pays sur un ton aussi irrespectueux — en osant calomnier
l’organisation socialiste soviétique, qui s’appuie sur la
volonté d’un peuple de deux cent millions
d’habitants.
Vous
passez les limites, Monsieur Silone, en voulant donner des leçons
aux représentants de la littérature soviétique.
Vous
savez vous-même qu’après une lettre comme celle que
vous vous êtes permis d’envoyer à mon adresse, le
dialogue entre nous n’est plus possible. Votre lettre démontre
que c’est vous qui ne voulez pas, et même craignez la
continuation de ce dialogue, sachant que, malgré les furieuses
attaques de la réaction le monde socialiste devient toujours
plus fort et que la nouvelle vague de calomnies antisoviétiques
et anticommunistes, au déferlement de laquelle vous prenez une
part si chaleureuse, retombe déjà et s’effondrera
tout à fait. La vérité la remplace.
C’est
pourquoi vous vous énervez tellement, Monsieur Silone ;
c’est pourquoi l’inconvenance et les insultes ne quittent pas
votre plume.
Moscou,
le 3 avril 1957.
Ivan
Anissimov