La Presse Anarchiste

En cette nuit…

Ô l’a­troce mais si belle nuit
Que, seul, j’ai pas­sée aujourd’hui.
Dans l’ombre, le temps s’enfuit
Comme un Homme char­gé de crimes
Et pour­sui­vi par le remords…
Tic, tac, tic, tac, mon réveil s’escrime
Et semble, en de fou­gueux efforts,
Mar­te­ler, de plus en plus fort,
Le silence qui gravite.
Et tic et tac, et vite et vite,
À tra­vers l’im­meuble où tout dort.
Mes per­siennes étroi­te­ment closes
Me pro­tègent contre les choses
Et les mau­vais bruits du dehors ;
Très len­te­ment, mon cœur s’élève
Et je retiens jalou­se­ment mon rêve…
Il m’ap­pa­raît. exquis, et me frôle
Me baise sur la bouche et sur l’épaule ;
Je l’en­tends mar­cher, et j’en­tends des cris,
Il saute, léger comme un esprit,
Se pro­mène, à l’aise, comme chez lui,
Ayant chas­sé, d’un sou­rire, l’ennui
Qui pesait, autre­fois, sur mon âme ;
Sous les traits déli­cats d’une Femme,
Il porte en lui toute la gamme
Diverse et cha­toyante des couleurs ;
Le miel de sa per­ruque blonde
Et le blond des épis se confondent
En auréole d’or, par­mi des fleurs.
Mais l’aube, déjà, se profile
Et s’in­si­nue en mon logis ;
Et je songe, plus assagi,
Que là-bas, par delà la ville,
Il est un rêve tout pareil,
Plein de Lumière et de Soleil,
Venu t’i­non­der de bien-être,
Et qui s’en va, par la fenêtre.
En lais­sant dans ton coeur joyeux
La saveur d’un jour merveilleux.
Après cette nuit d’insomnie
Où vivait ta grâce infinie,
J’ai pris, avec émotion
Mon rêve et ton illusion,
Et vers toi, je les ai jetés,
Grou­pés en gerbe de caresses,
Pour que fleu­rissent nos tendresses
Au soleil des réalités.

Clo­vys

La Presse Anarchiste