Je relis Gobineau et De l’Inégalité des Races, j’extrais les lignes qui suivent « …Sans doute nos États, à nous, sont plus compliqués, satisfont à plus de besoins. Mais lorsque je regarde le sauvage errant, sombre et sale, farouche, désœuvré, traînant paresseusement ses pas, et le bâton pointu qui lui sert de lance, sur un sol sans culture. Que je le contemple, suivi de sa femme, unie à lui par un hymen dont la violence férocement inepte a constitué toute la cérémonie. Quand je vois cette femme portant son enfant qu’elle va tuer elle-même s’il tombe malade ou seulement l’ennuie ; que tout à coup, la faim se faisant sentir, ce misérable groupe, à la recherche d’un gibier quelconque, s’arrête charmé devant une demeure d’intelligentes fourmis, donne du pied dans l’édifice, ravit et en dévore les oeufs, puis, le repas fait, se retire, tristement dans le creux d’un rocher, je me demande si les insectes qui viennent de périr n’ont pas été plus favorablement doués que la famille du destructeur, etc., etc… » Et je réplique : Non, nos États ne satisfont pas à plus de nos besoins, mais les compliquent singulièrement, arbitrairement et artificiellement. Et lorsque je vois le « civilisé » germanique, anglo-saxon ou autre, errant, brillamment revêtu d’un bel uniforme, s’élancer, précédé par des engins blindés de vingt ou trente tonnes, sur un sol que d’innombrables générations, par leurs peines, leurs travaux et leurs souffrances, ont rendu apte à la culture. Et quand je les contemple défilant derrière les étendards bariolés symbolisant le plus haut degré de ce qu’ils appellent « civilisation »… les Patries. Et quand je réfléchis, que sur leur chemin, tout en violant des gamines de douze ans et des femmes de soixante, ils détruisent, grâce à leur matériel infernal (sans avoir pour excuse d’être tenaillés par la faim), tout ce que l’intelligence humaine avait imaginé et créé pour s’abriter et se soustraire aux intempéries, sans compter les centaines de milliers d’existences humaines. Puis, quand je les vois, leur œuvre démoniaque achevée, se retirer pour fêter leur triomphe dans de gigantesques beuveries… Je me demande : où donc se trouve la différence ?
Ned Nige