La Presse Anarchiste

De Bulgarie

L’o­pi­nion
publique occi­den­tale est extrê­me­ment bla­sée et réticente
vis-à-vis des évè­ne­ments et des nou­velles qui
nous par­viennent des pays d’au-delà du « rideau de fer ».
Il n’y a que les dis­cours des diri­geants du Par­ti (quand ce n’est pas
les toi­lettes de leurs consortes) ou des révolutions
san­glantes qui puissent être dignes des colonnes la presse du
« monde libre ».

Et
il faut consta­ter avec amer­tume que les publi­ca­tions anar­chistes ne
font pas tou­jours excep­tion à cette règle. Car on
vou­drait savoir quels sont les jour­naux anar­chistes qui ont signalé
à leurs lec­teurs les deux cir­cu­laires, les deux cris d’alarme
lan­cés par nos cama­rades Bul­gares en exil. La première
cir­cu­laire est signée par « L’U­nion des Anarchistes
Bul­gares en Exil », c’est une ten­ta­tive de sou­le­ver une campagne
de pro­tes­ta­tions contre le meurtre du vieux mili­tant anar­chiste et
syn­di­ca­liste Manol VASEV en pri­son, à la veille de sa mise en
liber­té. Nos cama­rades bul­gares invitent toutes les
orga­ni­sa­tions liber­taires à envoyer des lettres de
pro­tes­ta­tions au ministre Anton YOGOV, Pré­sident du Conseil à
SOFIA, ain­si que des lettres de sym­pa­thie et d’en­cou­ra­ge­ment à
la. famille de Manol Vas­sev à HASKOVO (Bul­ga­rie).

La
seconde cir­cu­laire est signée par un « groupe
d’in­tel­lec­tuels et ouvriers bul­gares en exil ». C’est une
« pro­tes­ta­tion contre la créa­tion de camps de
concen­tra­tion pour enfants en Bul­ga­rie ». Nous en reproduisons
plus bas quelques pas­sages qui, à notre avis, se passent de
tout commentaire.

« De
nou­velles mesures dra­co­niennes viennent d’être prises par les
auto­ri­tés bul­gares. Une loi vient d’être votée
contre la « hou­li­ganch­ti­na » (voyous) et l’enfance
délin­quante. Elle s’est tra­duite par la créa­tion de
camps de concen­tra­tion pour enfants de 7 à 8 ans (qu’ils
appellent cyni­que­ment « écoles de rééducation
par le travail).

Le
pré­texte pour l’a­dop­tion de cette loi a été
l’as­sas­si­nat obs­cur et peut-être pré­vu d’un secrétaire
de Par­ti : Hara­lam­pi Zdrav­kov par deux jeune gens : Dioo Tzvet­kov – 18
ans – et Assen Mitrev, qui s’est pro­duit à SOFIA, le 21
décembre 1957 dans le tram­way n°2. Le 5/​2/​1958, les
assas­sins ont été condam­nés à la peine
capi­tale par fusillade sans avoir eu le droit de plai­der leur cause
ou faire appel. Selon la presse offi­cielle com­mu­niste, voi­ci les
causes qui sont à l’o­ri­gine des crimes de ce genre.
« L’ap­pa­ri­tion chez nous de la “hou­li­ganch­ti­na” est
essen­tiel­le­ment due à la paresse dans cer­tains milieux, à
une édu­ca­tion com­mu­niste insuf­fi­sante, à l’héritage
capi­ta­liste qui pèse sur le pré­sent et enfin à
l’in­fluence de la “culture” dite occi­den­tale avec tous ses
aspects décadents…»

«…
La “hou­li­ganch­ti­na” est l’ar­rière-garde de la bourgeoisie
bri­sée. Ce sont de mau­vaises graines venues d’autres pays et
d’autres contrées et avant tout de la “démo­cra­tie”
occi­den­tale dégé­né­rée, où la
hou­li­gant­chi­na, le gang­sté­risme et l’en­fance délinquante
ne se mani­festent que trop fréquemment.…»

«…
Il y a éga­le­ment des causes qui nous sont spécifiques :
le manque de mesures éner­giques de la part de notre société,
de nos orga­ni­sa­tions sociales, de notre milice et sur­tout le manque
d’ins­ti­tu­tions pour lut­ter d’une manière énergique
ration­nelle, sys­té­ma­tique et pen­dant long­temps contre les
agis­se­ments de jeunes gens qui se sont détour­nés de la
bonne voie…»

Après
l’ex­pli­ca­tion de ces faits, la ques­tion sui­vante se pose
inévi­ta­ble­ment : com­ment les bacilles de culture occidentale
“déca­dente et dégénérée”
ont-ils pu péné­trer quand tout le monde sait que depuis
14 ans la Bul­ga­rie reste her­mé­ti­que­ment fer­mée à
toute influence étran­gère, sauf à celle de
l’U­nion Sovié­tique et des « démocraties
populaires » ?

Pierre

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