Dans
l’avant-propos de ce cahier uniquement composé de textes, la
plupart poétiques suscités par le drame algérien,
on peut lire : «… le travail collectif qui caractérise
l’A. P. nous a permis de rassembler un grand nombre de
jeunes poètes français de diverses tendances. Car tel
était bien notre but : donner un éventail le plus large
possible des diverses attitudes des jeunes poètes français
face à la guerre d’Algérie… S’il n’appartient
pas à l’A. P. d’opter pour telle ou telle solution,
il nous est indispensable de redire notre opposition absolue à
cette guerre et à ces horreurs… Parce que nous ne pouvons
pas accepter la mise à mort d’un peuple, parce que nous ne
pouvons pas accepter la mise au pas du nôtre, parce que nous ne
pouvons pas accepter la dégradation de la personne humaine,
parce que la poésie l’exige. »
Que
la poésie non seulement l’exige, mais qu’elle puisse
également être digne de cette mission, c’est ce que
prouve, entre autres, l’un des plus beaux textes rassemblés
dans ce numéro, et que, sans nous laisser arrêter, nous
non plus, par la tendance probable de son auteur, nous nous faisons
un devoir de citer.
Le
voici :
Celui dont l’âme fut donnée
Celui qui donne au bien son âme
Que pourrait-il craindre en ce monde
Le vent peut éteindre la flamme
La cendre se mêler au vent
Il peut mourir dès à présent
Que pourrait-il craindre en ce monde
Il a vécu il a mangé
Le pain rayonnant des journées
Il a vécu en souriant
Que pourrait-il craindre en ce monde
Il peut vieillir et ressembler
A la poussière du sentier
Il peut mourir en combattant
Il peut mourir assassiné
Que pourrait-il craindre en ce monde
André Liberati