En mai
1961, parut « Les Abonnés absents », troisième
volume de la série « Mémoire d’aujourd’hui »
(« Paris, le …», « Suite parisienne », tomes 1
et 2) où Nicole Vedrès recueille, depuis 1958,
les chroniques qu’elle donne au « Mercure de France »,
chaque mois. On sait qu’elle a succédé un peu, dans
cette chère vieille revue, à Paul Léautaud,
qu’elle rappelle d’ailleurs par un sens inné de la
chronique, art très difficile du bavardage intelligent et
agréable. Un tel genre littéraire exige de l’esprit,
de la culture, de l’imagination, de la curiosité, du goût
et de la tendresse, que possède avec excellence Nicole Vedrès
et dont la moindre de ses chroniques offre un étonnant
échantillon.
Il faut
lire, par exemple, dans les admirables « Lettre au Yéti »,
« La Baleine des Invalides » où l’auteur avec une
pétillante et incisive malice, nous présente, nous
autres Français, à l’abominable homme des neiges, en
visite officielle dans notre pays, lire aussi « Le Vœu de
Bathilde », chronique curieusement historique puisqu’elle
passe en revue les reines de France statufiées au jardin du
Luxembourg. Ce dernier texte fait penser aux meilleures pages
d’Anatole France, ainsi qu’aux très belles lettres de
Marcel Arland, dans « Je vous écris…» que Jean
Paul Samson a vanté ici même.
Ces
quinze chroniques montrent à quel point Nicole Vedrès
jouit de cet inimitable don de rêver « à des faits,
des idées, des écrits du passé et même d’à
présent… Figures, pensées, grandes ou petites
vérités, dont le monde peu à peu se déprend,
puis se désintéresse, fâché quelles aient
voulu s’adonner à l’absence pour, simplement, demeurer ce
qu’elles sont ». Don qui, de Montaigne à Mauriac a
supérieurement circulé dans notre littérature.
Il est certain que Nicole Vedrès mérite d’être
lue et ses chroniques méditées, la première pour
ses qualités, les secondes pour leurs vérités.
Georges
Belle