Maxime Girieud
Bien peu
de temps après son ami Lucien Jacques, dont il avait encore pu
tenter d’évoquer le souvenir ici même l’été
dernier, dans notre numéro de juin, Maxime Girieud, le 11
novembre, entrait dans le grand repos. La mort ne l’aura pas
surpris : il était âgé de quatre-vingts ans, et
toutes ces dernières années une santé
faiblissante, à laquelle, sans se plaindre, il faisait
parfois allusion, l’avait préparé à la suprême
échéance. C’est une amitié précieuse
qui nous est ainsi ravie, la compréhensive attention d’une
constante présence d’esprit. Délibérément
à l’écart d’un monde absurde — le nôtre —
il maintenait, de par la vertu d’une pensée toute en
finesse, la haute tradition de nos écrivains les plus rares,
les « moralistes» ; mais non sans en accompagner la
lucidité de bonne compagnie de l’écho sous-jacent
d’une sensibilité toujours en éveil, grâce à
laquelle sa prose était en même temps parole d’un
poète. C’est rarement qu’il daignait écrire, plus
rarement encore publier. Les lecteurs de Témoins qui
ont eu le privilège de découvrir ici quelques pages de
lui, et ceux des Cahiers de l’artisan, où il
collabora plus d’une fois, n’en auront aimé que davantage
la pertinente mesure de ses propos et maximes. Et nous sommes encore
quelques-uns à savoir de quel apport insigne il avait enrichi
l’un des plus beaux Cahiers du Contadour (mai 1938,
V), intitulé « Sauve qui peut », qui pour notre
émerveillement s’ouvre par ses « Feuillets épars
d’un journal intermittent », où l’on trouve, pour le
dire dans les termes si justes d’une lettre récente de
Claude Le Maguet, « au milieu d’excellentes choses dans le
genre de celles qui nous l’ont fait connaître, un récit
intitulé « Sur les routes de la mer », se rapportant
à sa campagne dans l’armée d’Orient pendant la
première des deux grandes guerres, qui est tout à fait
beau, magnifique de sensibilité et d’intelligence ; ce que,
pour moi, il a écrit de mieux. »
J. P.
S.
Giovanna Berneri
15 mars 1962 : Un
télégramme de Louis Mercier m’annonce à
l’instant le décès, survenu hier mercredi 14 mars, de
notre amie Jeanne Berneri, veuve de Camille Berneri lâchement
assassiné par les staliniens pendant la guerre d’Espagne, et
qui publiait en Italie la revue Volontà. En attendant
d’évoquer dans notre prochain numéro cette grande
figure, nous tenons à dire à sa fille et à tous
les siens combien nous prenons part à leur deuil.