C’est
le nôtre.
Car
dans la progressive descente où, des paroles de grandeur à
la bouche, la nation qui enfanta les droits de l’homme, chaque jour
davantage renie son âme, l’avènement du racisme en
« métropole », tel qu’on l’a vu se déchaîner
cet automne en plein Paris lors des ratonnades policières,
marque une nouvelle, une sinistre étape.
Et
si nul aujourd’hui n’ose certes plus reprendre à son
compte l’inepte slogan qui proclamait : l’Algérie c’est
la France, les progrès du mal, pour peu que rien ne les
arrête, obligeront quelque jour à constater que la
France c’est l’Algérie.
A
d’autres, assurément, de rechercher dans le concret les
moyens de barrer la route — si faire encore se peut — à
l’avilissement définitif. Notre rôle à nous —
mais il ne nous paraît pas inutile — ne peut être que
de contribuer à ce que les esprits prennent amèrement
conscience de la sanglante sottise où non seulement des
furieux voudraient nous précipiter, mais, pire encore, pour
laquelle ils se flattent de trouver en tant d’entre nous des
complices. D’où notre tentative, par les deux premiers
textes de ce cahier, complétés d’autre part de
quelques trop rares documents groupés dans le « Carnet »,
de dénoncer à notre tour l’infamie des haines de
race, dont tant de bons esprits s’étaient naïvement
imaginé que l’écœurante orgie de crimes où le
nazisme se vautra suffisait à démontrer pour toujours
l’ignominieuse insanité.
Puissions-nous,
si modeste que soit nécessairement notre effort, aider ainsi à
ce que nos infortunés « semblables » trouvent enfin
le courage de se faire horreur.
Témoins