Réalisée
par Ladislas Gara, cette anthologie fort bien présentée,
et qui s’étend du XIIe siècle à nos jours, met
à notre portée la longue tradition créatrice
d’un des peuples assurément les plus doués pour
l’expression lyrique. Toute une équipe de poètes de
langue française a établi les versions ici rassemblées,
qui laissent souvent le regret qu’aucune n’ait été
demandée à André Prudhommeaux, dont les lecteurs
de notre cahier spécial sur la Hongrie n’auront certainement
pas oublié la maîtrise. Cela dit sans contester
l’honnêteté de la plupart des traductions de cette
Anthologie, à certaines desquelles on ne peut guère
reprocher (spécialement à celles [de] Jean Pousselot)
que leur excessive virtuosité. Reprocher est d’ailleurs trop
dire. Dans une étude terminale sur les problèmes de la
traduction de la poésie hongroise, Ladislas Gara cite le texte
original de quatre vers de Janos Arany, considérés par
nombre de poètes hongrois comme « les quatre plus beaux
vers de la poésie magyare ». C’est fort probablement
vrai. Mais aucune des quelque dix versions que l’on nous en donne
ensuite ne suggérerait par elle-même l’impression de
cette insigne excellence. Tant il est inévitable que la poésie
se refuse presque toujours à être authentiquement
traduite. Il n’en reste pas moins que l’ensemble du volume
constitue une somme propre à nous donner une idée,
approximative certes mais fraternelle, du don d’appréhension
du réel et du rêve qui fut et demeure le privilège
d’un peuple toujours magnifiquement indomptable.