La Presse Anarchiste

Critiques émanant du groupe « Intervention Communiste » de Grenoble

[[Ati­cle paru sans titre.]]


Suite à une série de textes émanant de cama­rades engages dans la con­struc­tion d’un mou­ve­ment autonome de tra­vailleurs révo­lu­tion­naires (et notam­ment de cama­rades de la Nièvre), le Groupe de Greno­ble « Inter­ven­tion Com­mu­niste » a été amen­er à cri­ti­quer cer­tains des points qui lui parais­saient ambigus.

Il s’ag­it pour l’essen­tiel des points suivants :
— principe d’«un regroupe­ment autonome de tra­vailleurs révolutionnaires ».
— « Per­son­ne ne vient au nom de son organ­i­sa­tion poli­tique où syn­di­cale, mais d’une manière autonome. » (point 1 de la circulaire)
— « Pas de coupure entre mil­i­tants révo­lu­tion­naires tra­vail­lant dans les syn­di­cats ou en dehors. » (point 5 de la circulaire).

Se trou­ve donc repro­duit ici de larges extraits de la réponse…

1°. Sur la question de l’autonomie prolétarienne.

a) Nous recon­nais­sons bien évidem­ment la néces­sité absolue de la lutte ouvrière par les tra­vailleurs eux-mêmes, des liaisons directes en rup­ture avec les appareils spé­cial­isés. Mais un regroupe­ment autonome de tra­vailleurs n’a de sens que s’il se situe dans le mou­ve­ment his­torique du pro­lé­tari­at dirigé con­tre le salari­at et la société marchande c’est-à-dire s’il se place sur le ter­rain de l’au­to-organ­i­sa­tion de la classe con­tre le tra­vail salarié. Toute ten­ta­tive donc de regroupe­ment même paré du label « autonome » est fausse si elle ne repose pas sur ce critère fon­da­men­tal ; cela sig­ni­fie qu’on ne fasse pas du regroupe­ment pour du regroupe­ment mais que le rap­proche­ment s’opère sur des bases claires, sans aucune équiv­oque ; sans quoi ce regroupe­ment ne sera jamais qu’un con­glomérat de plus, une nou­velle organ­i­sa­tion cryp­to-gauchiste, a voca­tion de masse et dès lors ouverte à tous les marchandages et opportunisme ;

b) Il sem­ble que vous fassiez une dis­tinc­tion pure­ment soci­ologique entre des groupes for­més par des ouvri­ers eux-mêmes et les autres groupes ou par­tis. L’au­tonomie pro­lé­tari­enne n’est pas un prob­lème de struc­tures (ici le groupe autonome, là le goupe « poli­tique »).Elle ne se cal­cule pas suiv­ant le nom­bre d’ou­vri­ers par­tic­pants ; elle dépend avant tout du con­tenu avancé par sa capac­ité à per­me­t­tre au cours de luttes l’in­stau­ra­tion de rap­ports soci­aux opposés à ceux imposés par le cap­i­tal (principe d’au­to-direc­tion des luttes, pou­voir aux AG, non dirigean­tisme, attaque con­tre le tra­vail salarié etc.);

L’au­tonomie pro­lé­tari­enne a un con­tenu poli­tique ; les groupes ouvri­ers autonomes, qu’ils soient de boites ou locaux (Action Cheminot ou Groupe d’au­tonomie ouvrière de Rome), com­posés en tout ou par­tie d’ou­vri­ers, sont pour nous la pré­fig­u­ra­tion de l’or­gan­i­sa­tion de com­bat du pro­lé­tari­at : Ils sont éminem­ment POLITIQUES.

Dès lors que peut bien vouloir sig­ni­fi­er la dis­tinc­tion que vous opérez ? et surtout ce « VENIR DE MANIERE AUTONOME » ? Cela sig­ni­fierait-il qu’on peut faire un « tra­vail autonome » dans le groupe, puis un tra­vail poli­tique, voir syn­di­cal hors de ce groupe ? Ou cela sig­ni­fierait-il comme dans le vieux mou­ve­ment ouvri­er, que vous faites votre les vieilles divi­sions : ici le poli­tique, là « l’au­tonome comme naguère le syn­diqué ». Avez vous voulu vous met­tre à l’abri d’éventuelles déviations?…

Nous affir­mons pour notre part que les groupes ouvri­ers autonomes sont ceux qui accueil­lent en leur sein ceux des tra­vailleurs les plus en pointe (même dans les péri­odes de reflux de la lutte de classe), les plus lucides les plus rad­i­cal­isés, dégagés des idéolo­gies pseu­do-révo­lu­tion­naires, syn­di­cal­istes ou réformistes, com­bat­tants pour l’ac­tion autonome de classe, pour l’in­stau­ra­tion au cours des luttes et s’é­ten­dant hors du lieu de pro­duc­tion., de rap­ports soci­aux com­mu­nistes, ils ne for­ment pas un nou­veau par­ti ou un nou­veau syn­di­cat, mais ils con­tribuent à la con­sti­tu­tion en par­ti , du pro­lé­tari­at : bref ils sont com­mu­nistes (même si ce terme sig­ni­fie pass­able­ment autre chose…) et à ce titre ils se doivent de se regrouper pour appuy­er les luttes autonomes des tra­vailleurs, démys­ti­fi­er celles qui ne sont qu’un moment néces­saire à la repro­duc­tion du cap­i­tal, dénon­cer les manœu­vres bureau­cra­tiques de ceux qui veu­lent con­serv­er le salariat !

Leur regroupe­ment doit per­me­t­tre de faire con­naitre tou­jours plus aux autres tra­vailleurs la pos­si­bil­ité qu’ils ont de se libér­er par leurs pro­pres moyens de l’esclavage salarié.

Au vu de cela des for­mules telles que « venir de manière autonome » parais­sent bien ambi­gus, car elles pour­raient se traduire par « par­tir faire du syn­di­cal­isme dans son syn­di­cat, de la « poli­tique » dans son grou­pus­cule»… ce qui, en gros, n’au­rait plus du tout rien à voir avec l’au­tonomie pro­lé­tari­enne. Com­ment expli­querez-vous cette con­tra­dic­tion ? Quels dépasse­ments y voyez-vous ?

L’ autonomie pro­lé­tari­enne ce n’est pas, de plus, l’apolo­gie de toutes grèves ; ce n’est pas tomber dans le tri­om­phal­isme ouvriériste. Elle implique la con­nais­sance de la nature des luttes actuelles. S’in­scrivent-elles dans une offen­sive con­tre le salari­at, avec appari­tion de rap­ports soci­aux nou­veaux, ou sont elles ― quoique par­fois dures ― défen­sives, c’est à dire soumis­es aux appareils du Cap­i­tal au sein du pro­lé­tari­at. Mais analyser la nature des luttes aujour­d’hui n’est-ce pas voir aus­si quel est l’é­tat du cap­i­tal­isme qui les con­di­tionne, et qui con­di­tionne, cela va de soi, l’au­tonomie pro­lé­tari­enne elle-même. 

2°. Sur la coupure entre militants travaillant dans les syndicats ou en dehors.

Ce point rejoint le précé­dent au sujet de « venir de manière autonome ». Sig­ni­fie-t-il qu’on peut être syn­di­cal­iste dans le syn­di­cat, ouvri­er autonome dans le « regroupe­ment » ? Voici ce qu’on peut en dire : l’é­tat actuel des luttes de classe fait que le mil­i­tant, pour des raisons pra­tiques, est sou­vent obligé de pass­er par un syn­di­cat pour nouer des rela­tions hors de son ate­lier ou de son bureau (à l’in­térieur de ces derniers, les liaisons se font seules puisque c’est le lieu « naturel »). Mais cela ne sig­ni­fie pas, bien au con­traire qu’un tra­vail puisse être fait au niveau de la struc­ture (UL, UD, Fédéra­tion); le faire serait alors faire du syn­di­cal­isme, et serait alors en totale con­tra­dic­tion avec le proces­sus. d’au­to-organ­i­sa­tion de la classe, avec l’au­tonomie pro­lé­tari­enne. C’est de plus ne pas avoir répon­du à la ques­tion : « le syn­di­cat est-il aujour­d’hui un moyen de trans­for­ma­tion révo­lu­tion­naire de la société, ou est il un ferme sou­tien du cap­i­tal pour la con­ser­va­tion du salariat ? »

De la réponse dépend évidem­ment la stratégie à adopter : l’en­trée ou non dans un syn­di­cat (sec­tion) n’est plus, dans notre optique, qu’une ques­tion tac­tique. (éviter d’ap­pa­raitre comme le représen­tant de telle bou­tique, d’en­tretenir des illu­sions sur le rôle du syn­di­cat, démys­ti­fi­er ce dernier est alors la tâche essen­tielle pour le mil­i­tant révolutionnaire).

Voilà pour notre part dans quel sens nous com­prenons « tra­vailler » dans un syn­di­cat, et de cette façon là, ce tra­vail bien au con­traire ne s’op­pose pas à l’au­tonomie pro­lé­tari­enne : il en est son com­plé­ment. Dans cette optique, « venir de façon autonome » n’a pas plus de sens que « pas de coupure entre mil­i­tants tra­vail­lant ou non sans un syn­di­cat ». La ques­tion reste bien : quel type de travail?…

Pas plus qu’il ne saurait y avoir de coupures entre syn­diqués/non-syn­diqués il ne saurait y en avoir pour nous entre tra­vailleurs manuels/intellectuels (cette divi­sion est avent tout le pro­duit de l’or­gan­i­sa­tion cap­i­tal­iste du tra­vail, néces­saire pour la repro­duc­tion élargie du cap­i­tal, comme moyens d’ac­croitre la divi­sion des tra­vailleurs entre eux). Quels sont alors ces « rap­ports avec les tra­vailleurs intel­lectuels » que vous envis­agez dans votre point 7.

Il ne vous reste plus qu’à éclair­er notre lanterne !

Groupe de Greno­ble « Inter­ven­tion Communiste »


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