Le même jour que deux sous-secrétaires d’État étaient démissionnés à cause de leur compromission dans le plus récent scandale financier, on discutait au Conseil municipal de Paris une interpellation sur la propreté morale de la Capitale. Il paraît en effet, à quelques copains de M. Bethléem, que Paris, qui, entre parenthèses, est en passe de devenir une ville où l’on s’ennuie, n’est pas assez propre moralement. Les gardiens de la pudeur publique nous entretiennent de journaux graveleux, de marchands d’images obscènes, de gravures ou dessins lesquels, sous prétexte d’art, sont des véhicules d’immoralité. Tandis qu’ils discourent, leurs compères, avec une impudeur plus que cynique, agiotent, escroquent, dilapident, et en mettent à gauche. « Soyez moraux » gueulent à tue-tête les dirigeants et ils espèrent qu’abasourdis les dirigés oublieront qu’hier encore ceux chargés de faire « respecter » la morale étaient à tu et à toi avec les tripoteurs les plus éhontés, bourgeoisement parlant. Or, pour parler le langage de ces hypocrites, s’il y a un danger social redoutable, c’est bien celui que présentent les maîtres de l’heure, qui s’enrichissent par n’importe quel moyen. C’est leur exemple qui provoque l’abaissement de la moralité publique, si abaissement il y a. Nous parler de cartes transparentes est se foutre de nous. Cachez ce derrière ou ce bas ventre que je ne saurais voir ni au naturel ni en peinture, clame le Tartufe contemporain et tandis que ses jérémiades nous endorment ou nous emmiellent, il fait, en douce, vendre, en Bourse, mille francs un papier noirci qui ne vaut pas cent sous ! Certes, il y a de quoi rire quand un larron, la montre du volé dans sa poche, crie « au voleur » en désignant sa victime aux badauds. Qu’on nous laisse semblablement nous dilater la rate quand nous convient à la propreté morale ceux dont les chutes du Niagara ne suffiraient pas à laver la crasse de malhonnêteté.
Qui Cé