La Presse Anarchiste

Les douze points du Capital espagnol et international

[(Ce com­mu­ni­qué confi­den­tiel de la sec­tion patro­nale du « Syn­di­cat » offi­ciel de la Métal­lur­gie de la pro­vince de Bar­ce­lone, que nous repro­dui­sons ci-après, est un exemple de la réac­tion patro­nale face à la pres­sion de la classe ouvrière espa­gnole qui réor­ga­nise son com­bat et qui, après tant d’an­nées de souf­frances, de nou­veau jette ses ponts d’es­poir vers un ave­nir meilleur.

Ce texte n’in­té­resse pas que les tra­vailleurs d’Es­pagne, il concerne l’in­ter­na­tio­nale ouvrière qui subit l’ex­ploi­ta­tion des mêmes patrons. Les masques peuvent être dif­fé­rents, mais dans leurs com­mu­ni­qués « confi­den­tiels », dans leurs réunions « syn­di­cales », ils tiennent les mêmes rai­son­ne­ments, le même langage.

Au moment où des sec­teurs impor­tants du patro­nat fran­çais mul­ti­plient les contacts avec leurs col­lègues espa­gnols, concluant des accords indus­triels et finan­ciers, il est indis­pen­sable que les tra­vailleurs de langue fran­çaise soient infor­més de la réa­li­té de la « libération ».

Mais face à ces rai­son­ne­ments, à ces pro­jets de répres­sion, la classe ouvrière peut être vic­to­rieuse si elle ne cesse de déve­lop­per et de for­mu­ler par une pra­tique tou­jours plus effi­cace son sens de la soli­da­ri­té, de l’ef­fi­ca­ci­té, sa conscience et son action de classe, son pro­jet d’é­man­ci­pa­tion intégrale.)]

Gamete Tecnico-economico sidero-metalurgico

Sin­di­ca­to Pro­vin­cial del metal

1. – Les entre­prises se sentent le devoir de convaincre notre gou­ver­ne­ment d’a­gir avec la plus grande éner­gie afin d’é­vi­ter, en dehors des entre­prises, le déve­lop­pe­ment de conflits poli­tiques qui, une fois ins­tal­lés au sein même des entre­prises, s’y camouflent sous la forme de conflits du tra­vail avec beau­coup d’habileté.

Le déni­gre­ment des faits réels ne pou­vant en aucun cas mas­quer le véri­table fond du pro­blème, essaie de conso­li­der des situa­tions sala­riales conflic­tuelles en abu­sant de la tolé­rance de l’au­to­ri­té, per­met­tant de fausses acti­vi­tés « démocratiques ».

La sécu­ri­té et la sta­bi­li­té de notre régime n’ont aucune rai­son de craindre des orga­ni­sa­tions uni­que­ment appuyées par des inté­rêts inter­na­tio­naux aux mau­vaises inten­tions connues.

L’en­tre­prise ne peut agir avec une grande éner­gie en son sein et encore moins a l’ex­té­rieur contre ces orga­ni­sa­tions subversives.

2. – L’au­to­ri­té devrait agir ins­tan­ta­né­ment et net­te­ment, en dehors de l’en­tre­prise, contre les indi­vi­dus, les « com­man­dos » et les groupes acti­vistes qui, sans cesse, sont en train de faire naître des situa­tions conflictuelles.

L’ac­tion de l’au­to­ri­té au sein des entre­prises ne devrait se réa­li­ser qu’en cas de situa­tion d’é­mer­gence, qui sont les consé­quences d’une impré­voyance ou de cir­cons­tances excep­tion­nelles qui doivent être tran­chées afin d’é­vi­ter un plus grand mal.

3. – Les entre­prises ne connaissent pas tou­jours les acti­vistes, mais elles peuvent four­nir des pistes et des infor­ma­tions afin que l’au­to­ri­té puisse agir et mener des enquêtes sur les acti­vi­tés de ces acti­vistes en dehors de l’en­tre­prise. Actuel­le­ment, cela n’est pas mené avec une éner­gie suf­fi­sante pour évi­ter ce qui pour­rait l’être.

L’en­tre­prise ne dis­pose pas de moyens pour mener ces enquêtes, et là n’est pas sa mission.

4. – Les jurés d’en­tre­prise doivent être dûment pro­té­gés et pos­sé­der assez d’au­to­ri­té pour être le véri­table ins­tru­ment du dia­logue avec la direc­tion de l’en­tre­prise. Les jurés ne devraient pas être mon­tés contre les entre­prises par le vice-secré­ta­riat, l’A­mé­na­ge­ment social ou les asses­seurs socio­syn­di­caux qui, par­fois, orientent mal­adroi­te­ment les jurés vers une posi­tion déma­go­gique qui ne par­vient pas à satis­faire les acti­vistes et qui crée, en revanche, une situa­tion de confu­sion­nisme entre les jurés-repré­sen­tants et la direc­tion de l’en­tre­prise, ce qui se tra­duit en perte de pres­tige pour tous deux, et dont pro­fitent les groupes sub­ver­sifs pour atteindre leur objectif.

5. – L’ex­pé­rience qui res­sort de la déci­sion des Magis­tra­tures du tra­vail est le déve­lop­pe­ment de nou­veaux et de plus amples conflits qui dété­riorent la situa­tion, les entre­prises devant modi­fier des déci­sions ren­dues néces­saires pour éta­blir l’ordre et la discipline.

6. – Les ren­vois jus­ti­fiés, encore plus dans les cas qui nous inté­ressent ici, devraient tou­jours être effec­tués SANS INDEMNISATION, vu que le contraire serait de créer un pro­fes­sion­na­lisme du conflit social et de l’indemnisation.

7. – En ce qui concerne les pro­chaines élec­tions syn­di­cales, il est néces­saire de prendre toutes les pré­cau­tions utiles pour évi­ter que, à l’a­bri d’une fausse démo­cra­tie, les groupes de pres­sion acti­vistes ne puissent s’emparer d’une pré­ten­due repré­sen­ta­ti­vi­té, tant dans l’or­ga­ni­sa­tion syn­di­cale qu’au sein même des entreprises.

8. – Le Social et l’É­co­no­mique sont infailli­ble­ment liés. La pros­pé­ri­té du pays se mesure à celle de ses entre­prises. Le scep­ti­cisme le plus abso­lu a enva­hi actuel­le­ment le milieu de la direc­tion de l’en­tre­prise, qui doit employer la plu­part de son acti­vi­té à la solu­tion de situa­tions conflic­tuelles, délais­sant ain­si sa mis­sion fon­da­men­tale qui est la créa­tion de richesses.

9. – Il est indis­pen­sable de mettre au point un sys­tème pour que les entre­prises n’en­gagent pas du per­son­nel ayant des anté­cé­dents conflic­tuels et pro­fes­sion­na­li­sés dans ce genre d’activité.

10. – La situa­tion pré­sente de réces­sion avec infla­tion n’est pas une ambiance favo­rable pour trou­ver l’é­qui­libre éco­no­mique de l’en­tre­prise néces­saire à l’ob­ten­tion de béné­fices per­met­tant le déve­lop­pe­ment, l’in­ves­tis­se­ment et l’au­to­fi­nan­ce­ment. Dans cette situa­tion de scep­ti­cisme, tant dans le domaine social que dans le domaine éco­no­mique, on peut dif­fi­ci­le­ment prendre soin des pro­blèmes sociaux, d’une part, et fis­caux, d’autre part, qui sont chaque fors plus exigeants.

11. – Les mesures éco­no­miques prises par le gou­ver­ne­ment pour le relan­ce­ment ne résou­dront pas le pro­blème de l’en­tre­prise avec la rapi­di­té exi­gée par les cir­cons­tances. Le pro­blème a atteint une trop grande pro­fon­deur pour pou­voir cor­res­pondre à une mesure net­te­ment timide.

La meilleure mesure de relan­ce­ment est la confiance.

L’am­biance mal­saine ne se dis­sipe pas.

12. – Une action poli­tique et éco­no­mique plus com­ba­tive, qui garan­tisse le libre exer­cice de l’en­tre­prise, l’en­tière tran­quilli­té socio-éco­no­mique et le sain espoir dans l’a­ve­nir du pays, dans la sta­bi­li­té et avec éner­gie, est de la plus haute nécessité.

Bar­ce­lone, le 4 février 1971.

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