La Presse Anarchiste

Violence, Révolution, Organisation

Si l’on a pu dire, très judi­cieu­se­ment, que d’un choix clair dépen­dait une pro­pa­gande cohé­rent, nous pen­sons éga­le­ment que, pour être logique jusqu’au bout : d’une doc­trine claire dépend une forme d’organisation.

Dans cette optique la « vio­lence » est un de ces phé­no­mènes qui, pour avoir rete­nu l’attention de beau­coup de nos pen­seurs, n’en reste pas moins assez mal défi­ni et qui, pour cette rai­son, laisse au cœur même de notre doc­trine comme une zone intou­chable. Que ceci s’oppose à la clar­té com­plète de notre vision ne fait aucun doute, et, par suite, nous vou­lons y voir pré­ci­sé­ment une des causes, par­mi bien d’autres, qui nour­rit la pré­ten­due contra­dic­tion antre l’idée d’organisation et la défi­ni­tion même de l’AN-ARCHIE.

Nous vou­drions ici, sans pré­tendre épui­ser le sujet, tout au moins en sou­li­gner l’importance fon­da­men­tale et en déga­ger quelques élé­ments à un débat de plus en plus néces­saire à notre mouvement.

Il fut un temps où une ques­tion telle que : « la vio­lence est-elle com­pa­tible avec notre éthique ? », ne se posait pas. L’Anarchisme était une fina­li­té vers laquelle on ne pou­vait s’orienter qu’en affir­mant révo­lu­tion­naire dans l’action directe et spon­ta­née. Il allait de soi que cette action, se heur­tant à des struc­tures plus nettes et rigides qu’aujourd’hui, engen­drait de la vio­lence ; vio­lence dans l’attaque, vio­lence dans la réac­tion et vio­lence encore dans la riposte.

Devant ces attaques, le plus sou­vent dis­per­sées, mais dont on ne peut nier qu’elles par­vinrent à arra­cher la meilleure part de ce que l’on appelle « les conquêtes sociales » – et éga­le­ment à la suite du pro­grès tech­nique – le monde conser­va­teur et réac­tion­naire adop­ta une nou­velle forme, plus floue, moins sai­sis­sable et moins concrète, contre laquelle il sem­bla que les coups concrets ne pou­vaient plus rien.

C’est alors que, d’une part, se pro­pa­gèrent les tech­niques issues du mar­xisme, l’idée d’organisation révo­lu­tion­naire for­te­ment struc­tu­rée autour d’un noyau appe­lé « par­ti» ; d’autre part, devant une cer­taine impuis­sance de l’action, consé­cu­tive à la mor­pho­lo­gie sociale, l’idée selon laquelle la vio­lence était non seule­ment inef­fi­cace mais néfaste. Se déve­lop­pèrent alors les théo­ries de la non-vio­lence issues du chris­tia­nisme et de la pen­sée de Gand­hi (« anarchistes-chrétiens »).

Depuis qua­rante ans envi­ron, notre pen­sée sur ce plan n’a pas avan­cé d’un pouce et l’anarchisme reste scin­dé entre ces deux ten­dances générales.

Sans doute des idées, des évé­ne­ments, des cir­cons­tances his­to­riques ten­dirent-ils à don­ner rai­son à l’une ou à l’autre de ces concep­tions. Il y eut, pour la pre­mière, la Révo­lu­tion d’Octobre. Pour la seconde, les hor­reurs de cette der­nière, celles de deux guerres, l’embourgeoisement du pro­lé­ta­riat, les poli­tiques réfor­mistes, l’économie pater­na­liste (le cré­dit), les pro­pa­gandes axées sur une pré­ten­due tolé­rance-clé du la démo­cra­tie et de la laï­ci­té, les formes syn­di­cales « pari­taires », tout ce qui en somme contri­bua à déve­lop­per le prin­cipe hau­te­ment rai­son­nable de la reven­di­ca­tion paci­fique de « la poire cou­pée en deux ». (Et la poire cou­pée en deux en 1’occurrence fut le prolétariat!!).

Donc, d’un côte, la convic­tion sans cesse moins par­ta­gée que seule l’action paye et que la vio­lence qu’elle engendre n’est qu’un phé­no­mène second, pro­por­tion­nel et inhé­rent a l’obstacle ; de l’autre côté, la convic­tion de plus on plus par­ta­gée que TOUT PEU À PEU POURRA ÊTRE CHANGÉ comme si c’était désor­mais dans l’ordre des choses et que l’intelligence humaine, se déve­lop­pant on ne sait pas par quel miracle, y pour­voi­rait sans cesse. Dans ce der­nier état d’esprit, « la vio­lence » devint peu à peu syno­nyme de crime, de contraire à 1a raison.

Et sans doute, à tout miser sur une rai­son qui serait la chose la mieux par­ta­gée du monde, peut-on conce­voir comme pos­sible l’avènement à date réglée d’une socié­té fina­le­ment nou­velle en ce sens que ses struc­tures seraient peu à peu adap­tées à la vie. On sait que cette uto­pie est deve­nue une croyance dans beau­coup de milieux dits socia­listes ou ratio­na­listes. Comme si, répé­tons-le, la Rai­son – qui implique une bonne dose d’intelligence, laquelle réclame quand même un cer­tain nombre d’aliments pour fonc­tion­ner – par une déci­sion magique, deve­nait la chose la mieux répan­due du monde ; comme si elle-même ne pou­vait pas se per­ver­tir, comme si enfin, son déve­lop­pe­ment ne dépen­dait pas étroi­te­ment des pos­si­bi­li­tés qu’on lui donne, à savoir : un milieu social qui est pré­ci­sé­ment celui que cette pré­ten­due spon­ta­née et uni­ver­selle rai­son met­trait en place.

Il y a là, il nous semble, une fameuse char­rue avant le bœuf, qu’aucun trac­teur même télé­com­man­dé ne sau­rait rem­pla­cer. Le rôle de la Rai­son est ailleurs, comme nous le ver­rons plus loin.

Tout cela a consi­dé­ra­ble­ment épais­si l ’idée de vio­lence au cours de l’histoire.

Or le pro­blème de la vio­lence est un faux pro­blème anar­chiste. Par les quelques consi­dé­ra­tions qui pré­cèdent on peut se rendre compte que poser un pro­blème « vio­lence » revient pra­ti­que­ment à poser un choix entre les thèses RÉFORMISTES et les thèses RÉVOLUTIONNAIRES. Comme ce choix est fon­da­men­tal pour l’anarchiste, qui­conque peut conclure que toute dis­cus­sion sur ce pro­blème tend à four­nir des jus­ti­fi­ca­tions secondes ou sup­plé­men­taires, comme on vou­dra, à ce choix essentiel.

Nous vou­drions tou­te­fois aller jusqu’au bout dans le cadre de notre titre.

D’abord

Qu’est-ce que la Révolution ?

On l’a dit sou­vent, la révo­lu­tion est un acte d’accouchement ; ce qui laisse entendre que la socié­té en place est grosse de cette néces­si­té au moment où elle tend à explo­ser. Elle explose : C’est l’insurrection, c’est-à-dire une révolte géné­ra­li­sée, la forme aigüe d’un mécon­ten­te­ment qui peut être poli­tique, éco­no­mique ou éthique. Ce n’est pas la révolution.

La révo­lu­tion s’inscrit dans les faits par un bou­le­ver­se­ment maxi­mal DE TOUTES les struc­tures. Elle exige (nous nous en sommes expli­qués dans le numé­ro sur « la Gauche » ) pour cela qu’ on la recon­naisse comme « néces­si­té globale ».

Mais il est bien évident que cette recon­nais­sance ne sera jamais le fait d’une majo­ri­té abso­lue ou proche.

Il est éga­le­ment évident qu’on ne com­mande pas une révolution.

La révo­lu­tion comme nous l’entendons est une néces­si­té latente, qui vise à créer une orga­ni­sa­tion telle des choses qu’elle per­met­tra de satis­faire d’abord tous les besoins fon­da­men­taux de la vie, puis de com­bler et de renou­ve­ler à la mesure de son ima­gi­na­tion toutes les aspi­ra­tions de l’homme.

Elle est donc essen­tiel­le­ment axée sur un monde créa­teur et doit pour cela répondre à l’un des grands prin­cipes de la nature, com­men­cer par détruire. En l’occurrence, détruire ce qui s’oppose le mieux à ce que d’aucuns ont appe­lé la « volon­té de puis­sance », ce que cer­tains tra­duisent par « prin­cipe d’autorité ».

Il semble que ce soit un para­doxe : requon­qué­rir la puis­sance et la vio­lence pour détruire le prin­cipe même qui engendre cette vio­lence, qui heurte le plus l’aspect éthique de l’anarchisme.

Qu’est-ce donc qui exige cette nécessité paradoxale ?

Il nous semble que ce soit tout sim­ple­ment la pres­sion sans cesse plus insup­por­table de la réa­li­té figée, cor­se­tée, laquelle crée des conflits et donne nais­sance à la révolte, cet « acte-réflexe », qui dresse tout être vivant contre la contrainte impo­sée et en géné­ral contre tout ce qui est contraire à son épanouissement.

C’est une réac­tion défen­sive, natu­relle qui, chez l’homme doué d’une pen­sée, lui per­met simul­ta­né­ment de se défendre, de détruire ce qui lui nuit et fina­le­ment d’organiser un milieu plus acceptable.

L’ACTION DIRECTE que nous avons tou­jours pré­co­ni­sée n’a d’ailleurs pas d’autre méca­nisme que cet enchaî­ne­ment qui va de la « RÉVOLTE SAUVAGE » issue de l’instinct, selon l’heureuse expres­sion de R. Fugler [[« Formes et ten­dances de l’anarchisme » (étude parue dans la Monde Liber­taire.)]], à la mise en place intel­li­gente de ce nou­veau milieu. Rien ne situe mieux, à notre avis, le rôle de la rai­son, que ce relais qu’elle assure à l’instinct, pour fina­le­ment clore le mou­ve­ment en une syn­thèse permanente.

Ce méca­nisme, qui res­pecte à la fois les éner­gies les plus infimes de l’être humain et sa facul­té de rai­son­ner, nous paraît jus­ti­fier entiè­re­ment cette expres­sion motrice de RÉVOLUTION PERMANENTE qu’on a assi­gné à la socié­té « ouverte » dont nous devons jeter les bases par la des­truc­tion des vieilles structures.

Dans son cha­pitre II, inti­tu­lé « L’ANARCHIE LIBERTÉ SAUVAGE », R. Fugler note :

« La révolte indi­vi­duelle et col­lec­tive n’est que la pous­sée libé­ra­trice d’une vie neuve qui fait écla­ter une cara­pace trop étroite » (…)

«(…) Et comme toute exis­tence a son mou­ve­ment propre, toute ten­ta­tive exté­rieure de la dévier ou la répri­mer appa­raît comme une fon­da­men­tale vio­lence faite à sa liber­té » (…)

C’est nous qui sou­li­gnons car cela est gros d’importance ; à savoir que cette vio­lence qui répugne à tout homme sain lui est IMPOSÉE. Cette conclu­sion n’est d’ailleurs pas neuve. Dans sa bro­chure inti­tu­lée « LA VINDICTE APPELÉE JUSTICE », écrite en 1901, P. Kro­pot­kine étu­diant le phé­no­mène « jus­tice » met­tait l’accent sur les « assas­si­nats légaux » que consti­tuent les exé­cu­tions conformes aux lois qui ne sont, à de rares excep­tions près dues à l’action des oppri­més, que l’expression de vieilles. cou­tumes des­ti­nées à assu­rer l’existence des socié­tés de classes et de privilèges.

Ben­ja­min Péret, répon­dant à une enquête pro­tes­ta­taire lan­cée en 1952 par les cahiers « Le Soleil Noir » contre la peine de mort et les tor­tures disait entre autre :

«(…) il va sans dire que toute coer­ci­tion, quel que forme qu’elle emprunte, outrage l’homme dans sa digni­té même et celui qui l’exerce n’est pas moins atteint par cet outrage que celui qui la subit, quoique de façon différente. (…)

La coer­ci­tion exer­cée par une poi­gnée d’hommes contre l’immense majo­ri­té de la popu­la­tion résulte de la struc­ture même de la socié­té où cette qua­si tota­li­té est dépouillée de tout par quelques-uns à leur béné­fice exclu­sif. Toutes les autres formes de coer­ci­tion, et par­mi elles celles qu’exercent direc­te­ment la police et la jus­tice, dérivent de cette pre­mière coer­ci­tion éco­no­mique. Il est donc impos­sible de les sup­pri­mer si l’on ne détruit pas d’abord l’état de choses qui les a provoquées (…)»

Ain­si – et nous pour­rions citer bien d’autres textes – il est une chose cer­taine : c’est la forme même de la socié­té qui engendre la vio­lence qui FAIT vio­lence, et cette vio­lence-là est ignoble parce qu’elle est l’expression de l’injustice, d’une injus­tice vou­lue et pré­mé­di­tée, pré­ser­vée et codi­fiée : « Nul n’est cen­sé igno­rer la loi ».

La vio­lence est deve­nue une ins­ti­tu­tion. Et certes nous connais­sons des doc­trines telle celle du chris­tia­nisme qui, face à cet ordre, enseigne l’agenouillement, voire la rep­ta­tion. Une doc­trine qui choi­sit le coup de pied au cul en tant que chose délec­table – et qui en rede­mande – et le plus sûr moyen pour gagner un monde meilleur, consa­cré Para­dis. De telle sorte qu’en fin de compte si l’on suit bien cette idée, la coer­ci­tion devient sacrée et doit être bénie, sans bron­cher. Qu’il y ait des ama­teurs pour une coer­ci­tion sem­blable… pas­sons ! mais que des « anar­chistes » l’admettent incons­ciem­ment comme essence supé­rieure de leur huma­nisme, voi­là qui devient insupportable !

On recherche par­fois bien loin les causes du ramol­lis­se­ment de l’anarchisme. Or par­mi les recherches qui ont été faites sur ce thème nous ne trou­vons nulle part que l’une des prin­ci­pales causes pour­rait bien être l’insidieuse infil­tra­tion du chris­tia­nisme par­mi nous et dont l’amorce remon­trait à ces pré­ten­dus « anarchistes-chrétiens ».

L’anarchisme se meurt par excès d’intellectualisme, d’un intel­lec­tua­lisme qui se veut tel­le­ment ana­ly­tique qu’il vient se perdre dans l’effarante com­plexi­té des choses d’une part, et par excès de syn­thèse, celle-ci s’élaborant dans un monde d’idées en avance sur le temps. De là il est aisé de com­prendre la faci­li­té qu’il y a à prendre ses dési­rs pour des réa­li­tés. L’un de ceux-ci, nous l’avons déjà dit, est d’admettre le monde comme doué de sa pleine rai­son : c’est-à-dire que la néces­si­té révo­lu­tion­naire parais­sant évi­dente pour tous, et comme par miracle, le pri­vi­lé­gié va aban­don­ner ses pri­vi­lèges, le patron ses pro­fits, le chré­tien sa volon­té de conquête, le poli­ti­cien son désir de gloire, et cha­cun le sens de la pro­prié­té et de l’autorité. Qu’il suf­fit en somme de mon­trer dès main­te­nant le sens le plus large d’une tolé­rance uni­ver­selle, COMME SI la socié­té libre que nous vou­lons était en place.

Et pour­tant il n’est pas un anar­chiste qui ne se rende compte qu’il n’y a encore rien de fait. Lamen­ta­tions et réflexions désa­bu­sées sont mon­naie cou­rante dans nos assem­blées où le seul sti­mu­lant reste encore de se gar­ga­ri­ser du bon temps d’autrefois. D’autrefois, notons-le bien, où pré­ci­sé­ment seule l’action était effec­ti­ve­ment payante.

Certes, les condi­tions ont chan­gé et cette action doit emprun­ter d’autres che­mins. C’est donc une affaire de méthode et qui dit méthode, dit orga­ni­sa­tion. Mais de grâce que l’on en finisse avec cer­taines réti­cences mal pla­cées et que l’on ne répugne plus à mettre les points sur les « i ».

Notre temps exige autre chose que la fon­da­tion d’écoles de yoga. On ne peut se conten­ter de connaître les délices de vic­toires spi­ri­tuelles ou cor­po­relles. Tel est pour­tant le but sinon l’essentiel de la pen­sée d’un cer­tain type d’anarchisme qui se rend ain­si la tâche vrai­ment facile ! On ne peut se conten­ter de connaître, arri­vé à un cer­tain déve­lop­pe­ment de la pen­sée, ce qui est vrai, ce qui est bon, tan­dis que conti­nuent les tue­ries tant spi­ri­tuelles pré­ci­sé­ment, que cor­po­relles. Ce sont des faits qu’on n’élude pas à force de jongleries.

Et que l’on com­prenne ! Il ne s’agit pas dans ce qui pré­cède d’en prendre au mot la condam­na­tion de ce que nous consi­dé­rons conne une forme d’auto-éducation (le yoga), d’auto-discipline et de méthode ration­nelle pour par­ve­nir à une mai­trise de soi. Mais une fois de plus il s’agit de res­ti­tuer le véri­table pro­blème. En 1’occurrence celui de l’Homme conscient qui se libère et libère ; de l’Homme-rebelle ; de l’Homme tout court, qui ne se laisse pas réduire aux sub­ter­fuges du temps et des circonstances.

Cette liber­té spé­ci­fique de l’être humain ne peut être celle qui se pros­terne ou émigre dans quelque « au-delà » que ce soit mais celle qui décide d’engager la lutte et l’engage sur tous les fronts y com­pris dans cette « jungle » que cha­cun découvre en soi. Et même cette lutte intime engendre la vio­lence sous peine, à ne pas vou­loir l’employer, de se consen­tir toutes sortes de bonnes rai­sons de ne pas agir.

Que l’on en convienne éga­le­ment, cela exige une cer­taine ascèse qui reste à défi­nir, cela sup­pose que nous ne pou­vons com­prendre dans ce type humain qu’une frac­tion des masses, cela laisse entendre ce qu’à défaut d’autre mot on est obli­gé d’appeler une petite élite, c’est-à-dire un petit nombre d’individus capable de résis­ter à l’automatisme, qui sache tenir en échec le déploie­ment de la force brute et qu’aucune supé­rio­ri­té maté­rielle ne fera renon­cer à agir en hommes.

Enfin que l’on veuille bien y réflé­chir – beau­coup d’expériences nous y invitent : l’exécution de ce « pro­gramme » demeure l’affaire d’une résis­tance et d’un com­bat qui n’ont nul­le­ment besoin d’être menés à visage découvert.

Ain­si pour­rait-on embras­ser ce pro­blème qui, se posant dès que l’homme refuse et se révolte, doit trou­ver sa réponse en en pas­sant néces­sai­re­ment par des luttes dont la vio­lence qui en résulte est impo­sée et qui doit avoir son terme dans une cer­taine forme d’organisation.

IL Y A UNE VIOLENCE DU RÉVOLUTIONNAIRE QUI EST RIPOSTE à une agres­sion per­ma­nente, laquelle est la véri­table vio­lence parce qu’elle porte le masque du dogme, de la loi et d’une pré­ten­due néces­si­té sociale qui se nomme encore contrainte et coercition.

Ces deux vio­lences ont des rap­ports évi­dents : « La vio­lence révo­lu­tion­naire est direc­te­ment pro­por­tion­nelle au degré d’autoritarisme d’un État consi­dé­ré et, inver­se­ment pro­por­tion­nelle au degré de libé­ra­lisme de celui-ci » (Fayolle)

Le réflexe-révolte trans­for­mé en riposte révo­lu­tion­naire est avant tout force de rup­ture et acte chirurgical.

Les ter­reurs les plus san­glantes ont tou­jours été le fait des réac­tions. À ce degré fixé, doit-on craindre la vio­lence pour soi-même ou pour les autres ?

Il ne peut y avoir d’autres choix : com­battre le régime ou s’y inté­grer, s’organiser pour ce com­bat ou se lais­ser dis­soudre. Pré­tendre le com­battre avec les moyens qu’il « laisse » à la dis­po­si­tion des opprimes, c’est s’intégrer dans son sys­tème et amor­cer non pas son pour­ris­se­ment mais le notre. On ne peut jouer le jeu du régime à abattre, ni sa guerre.

Pour en reve­nir à la vio­lence elle demeure un faux pro­blème anar­chiste et ceci doit per­mettre de déga­ger par­mi nous ceux qui sont res­tés révolutionnaires.

Il faut admettre une bonne fois, même s’il est sou­hai­table que ceci se passe un peu autre­ment (et cela dépend des degrés de conscience et de capa­ci­tés d’auto-organisation des masses ce qui nous ren­voie à notre rôle d’éducateurs) que la révo­lu­tion SERA VIOLENTE et que pra­ti­que­ment cela SERA UNE NÉCESSITÉ.

Il y a un gand­hisme digé­rée Par l’occident qu’il faut dénon­cer. Comme il y a, à coup sûr, arri­vé para­doxa­le­ment par le canal de la rai­son, une ten­dance issue du chris­tia­nisme qui per­siste à détruire notre éner­gie, comme il y a éga­le­ment à détruire cette idée d’une rai­son triom­phante et déjà en place, laquelle pro­clame que la néces­si­té révo­lu­tion­naire s’imposant dans les choses « il suf­fit d’un beau matin et d’une décision ».

De telles ingé­nui­tés laissent rêveurs. Nous y vou­lons sim­ple­ment voir le fruit d’un long tra­vail dés­in­té­gra­teur semé au gré de cir­cons­tances décou­ra­geantes par ceux-là mêmes que l’anarchisme pré­tend combattre.

Que toute la « gauche » s’y soit lais­sée prendre, c’est du moins une conclu­sion qui a l’avantage d’être recou­pée par ailleurs et dont la confir­ma­tion se renou­velle chaque fois que l’on constate l’évident, l’effarent glis­se­ment à droite de toutes les orga­ni­sa­tions de gauche depuis 50 ans.

Encore une fois, contre une telle perte de sub­stance, il faut savoir choi­sir. Et ce choix, s’il est hors du Pou­voir, exige une fore. d’organisation entiè­re­ment nou­velle, exige une vision claire des nécessités.

Ces pro­pos vio­lents sur la VIOLENCE vou­draient contri­buer à cette recherche.

Jacques

La Presse Anarchiste