La Presse Anarchiste

Lettres d’ailleurs

[(Comme il fut décidé précédem­ment, nous réser­vons, dans chaque numéro de la Revue Anar­chiste, quelques pages pour les nou­velles qui nous parvi­en­nent des pays étrangers.

Aujour­d’hui, un mot promet­teur d’Es­pagne et une let­tre de Pologne.)]

D’Espagne

«…Ma let­tre arriverait trop tard pour pass­er dans le troisième numéro. Soyez sûrs que pour le qua­trième je vous enver­rai tout ce qu’il faut. Je ferai mieux que de col­la­bor­er : j’an­non­cerai l’ex­is­tence de votre revue dans la presse espag­nole et por­tu­gaise et je don­nerai des comptes-ren­dus bib­li­ographiques et vous chercherai des souscrip­teurs en Espagne et en Amérique latine.

J’écris à nos amis de Por­tu­gal, dans le même sens…»
A.G.

De Pologne

Les événe­ments en Pologne présen­tent actuelle­ment un intérêt con­sid­érable. Depuis la révo­lu­tion russe, date de son indépen­dance offi­cielle, ce « jeune » pays, d’une assez vaste éten­due, a accom­pli une rapi­de « évo­lu­tion » — poli­tique, économique et sociale. Sa sit­u­a­tion géo­graphique, ses richess­es agri­coles et minières, son développe­ment indus­triel assez avancé, lui promet­tent quelque « avenir ».

Poli­tique­ment, c’est une sorte de dic­tature fas­ciste, avec le fameux Pil­sud­s­ki, qui s’est établie dans le pays. Elle se main­tient, non sans dif­fi­culté, grâce au désor­dre d’après-guerre, à la vio­lence mil­i­taire, à l’orgueil nation­al, aux aspi­ra­tions des agrariens et des cap­i­tal­istes, au désar­roi pro­fond des class­es laborieuses.

Économique­ment, la Pologne est pau­vre, arriérée. Pour l’in­stant, elle se trou­ve en pleine dépen­dance des cap­i­taux étrangers, des autres pays, voisins et loin­tains. Son essor économique devra, cepen­dant, s’ac­centuer prochainement.

Au point de vue social, la sit­u­a­tion des class­es laborieuses y est lam­en­ta­ble. Écrasées sous le dou­ble fardeau poli­tique et économique, exploitées hon­teuse­ment, les mass­es tra­vailleuses sont d’au­tant plus mal­heureuses, que dans leurs pro­pres rangs, une désor­gan­i­sa­tion com­plète est la règle. Épuisés par un tra­vail exces­sif, igno­rants, tirail­lés par plusieurs par­tis poli­tiques, mal­hon­nêtes et mer­can­tiles, les ouvri­ers polon­ais, les paysans mis­éreux ne peu­vent même pas penser, pour l’in­stant, à une lutte effi­cace. Cette sit­u­a­tion mis­érable com­porte, toute­fois, un élé­ment avan­tageux. Un dégoût pro­fond des par­tis et de l’ac­tion poli­tiques s’empare de plus en plus de ces mass­es. Leur intérêt les pousse de plus en plus vers les méth­odes et les idées syn­di­cal­istes-révo­lu­tion­naires et anar­chistes. Le ter­rain pour la pro­pa­gande lib­er­taire est prêt. On n’at­tend que les semeurs qui, hélas ! tar­dent à venir. Le prochain avenir nous dira si cette ten­dance du pro­lé­tari­at polon­ais vers une organ­i­sa­tion indépen­dante, vir­ile et unie, s’ac­centuera et pren­dra racine défini­tive­ment. En tout cas, c’est de ce côté que vien­dra le salut.

A.


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