La Presse Anarchiste

À l’amie inconnue

Que peut bien m’im­por­ter ton nom,
ton pré­nom, incon­nue amie ?
 — Ger­trude, Irma, Louise ou Manon,
Wan­da, Mar­ga­ret ou Julie ?

Que m’im­porte ton origine,
Inde. Japon ou Ibérie,
Suède. Égypte. Ita­lie ou Chine ?
Il suf­fit… Je t’at­tends, amie.

As-tu vu le jour dans la plaine,
Sur la cime ou dans la forêt ?
 — Es-tu fille des marjolaines,
de l’é­glan­tier ou du genêt ?

Petite, moyenne ou très grande,
forte, menue ou élancée ?
N’im­porte : ce que j’appréhende
et redoute, ma bien aimée,

Toi que j’at­tends sans te connaître,
c’est de ne point t’ai­mer assez ;
ce sou­ci tour­mente mon être.
 — Que bien­tôt, il soit effacé !

Que me fait de ta chevelure
la teinte : fauve, ébène ou d’or ;
ton port, tes gestes, ton allure ?
Peu m’im­porte, te dis-je encor.

Hors conven­tions, sans dieu ni maître
nous irons la main dans la main,
nous tenant à l’é­cart des traîtres,
sui­vant tout droit notre chemin.

J. Ven­trillon

La Presse Anarchiste