affectueux, aimant, fidèle,
qui évoluerait dans ton ombre,
et n’en demanderait pas davantage,
sans se questionner, s’interroger, se tourmenter, se préoccuper
concernant le pourquoi et le comment de ce qui est.
Je ne te quitterais pas,
je te suivrais là où tu irais,
tu serais pour moi comme une sorte de dieu et personne ne me paraîtrait
au-dessus de toi ou supérieur à toi.
Je mettrais toute ma confiance en toi
je n’imaginerais pas que tu puisses me faire de mal
ou me causer une peine quelconque ;
je viendrais me blottir sur tes genoux, tout contre toi,
et ma vie s’écoulerait ainsi, humble et sans complications,
sans qu’aucun nuage ne s’élève sur mon horizon.
Tu prendrais soin de moi, tu me protégerais
et, ne sachant comment de témoigner autrement ma reconnaissance,
je te resterais attaché comme le fer retenu par l’aimant.
Ta demeure serait la mienne
et peu m’importerait que ce soit une chaumière ou un palais,
pourvu que tu sois bonne pour moi ;
peu m’importerait comment tu serai vêtue,
comme une campagnarde ou comme une dame de la ville.
Ma petite cervelle, ma pauvre petite intelligence d’animal,
s’efforcerait de te comprendre, toi mon dieu,
je n’y arriverais pas toujours, je le sais,
mais la bonne volonté ne me manquerait pas.
J’essaierais de lire dans tes yeux, dans tes gestes, dans tes paroles,
ce que tu pourrais bien avoir à me dire
et je finirais par en saisir le sens, j’en suis sûr.
Souvent je m’endormirais, couché sur ton lit,
enseveli sous ton édredon,
et tu occuperais la première place dans mes rêves.
Quelquefois nous jouerions ensemble et il n’y aurait pas pour moi de bonheur
comparable à celui-là,
et je prendrais bien garde de ne pas t’égratigner, même légèrement,
car il n’y aurait rien que je redouterais autant
que de te sentir irritée contre moi.
Je sais bien que rien ne me ferait davantage souffrir
que de te voir partager tes caresses
avec un autre de mes frères en animalité,
mais la nature nous a fait ainsi, nous autres,
et si à l’être humain que nous adorons telle une divinité,
nous nous donnons tout entiers,
nous comprenons mal qu’il ne nous rende pas la pareille !
Mais en revanche je te serais si dévoué !
Je t’aimerais donc avec mon instinct de petit animal,
et ma faible intelligence m’incite à penser
que nous finirions par très bien nous entendre,
grâce à ta compréhensivité suréminente.
Je voudrais être un tout petit animal
affectueux, aimant, dévoué, fidèle,
qui vivrait dans ton ombre,
pour lequel tu serais comme une sorte de dieu
et qui n’en demanderait pas davantage.
E. Armand (12 décembre 1943, poème pour l’amie)