Dans le silence froid de la nuit, et la lampe
Arrondit au plafond une faible clarté.
Et j’entends la clarté qui tremble… O nuit été,
Sur les jardins en fleurs, j’ai poussé la fenêtre,
Et tes parfums trop forts ont glacé tout mon être
Ta fraîcheur ne peut rien sur mon front enflammé
Depuis la fin du jour, j’attends mon bien-aimé.
Belle nuit, tu ne fus jamais plus sensuelle ;
La volupté descend de tes obscures ailes.
O nuit, je veux ma part de tendresse et d’amour
Sois la bonne complice, et quand naîtra le jour,
En t’enfuyant devant l’aurore épanouie,
Tu verras le plaisir sur nos lèvres unies.
Suspendue aux sapins, la lune dans l’azur
S’arrondit et se gonfle d’or, comme un fruit mûr.
Dans cette attente vaine où mon être s’épuise,
Que je voudrais chasser loin de moi la hantise
De tous les mots d’amour, profonds, impérieux,
Que tu disais un soir à mon cœur sérieux.
Loin de toi, j’aurais dû me remettre à l’étude ;
Mais tu restes présent en cette solitude ;
La plume a lentement glissé de mes doigts las :
Je pleure maintenant… Pourquoi ne viens-tu pas,
Quand, de tout son effort, mon amour te réclame,
Sécher sous tes baisers les larmes de mon âme ?
Pourquoi perdre ce soir ? Si vite fuit le temps :
N’attends pas pour cueillir les fleurs de mon printemps !
Mais tu ne m’entends pas ! La lampe confidente
Peu a peu s’anémie, et l’obscurité lente
Verse en moi la douceur du bienfaisant sommeil.
Ah ! ne rouvrir les yeux qu’au lever du soleil,
N’avoir pas cette nuit des cauchemars sans nombre
Où je m’éveillerais croyant aimer ton ombre.
Ne plus penser à rien, dans le calme absolu,
Et t’oublier un peu, puisque tu l’as voulu !
S.