La Presse Anarchiste

Considération sur l’idée de liberté

… Il est néces­saire de s’en­ten­dre sur l’ex­pres­sion lib­erté. On sait que la lib­erté ne saurait être un but, car il n’est pas de lib­erté absolue ; de même il n’est pas de vérité générale, pra­tique­ment par­lant, il n’ex­iste que des vérités par­ti­c­ulières, il n’est pas de lib­erté générale, il n’y a que des lib­ertés par­ti­c­ulières, indi­vidu­elles. Il n’est pas pos­si­ble d’échap­per à cer­taines con­tin­gences ; on ne peut être libre de ne pas respir­er, par exem­ple, de ne pas assim­i­l­er et désas­sim­i­l­er… La Lib­erté n’est qu’une abstrac­tion comme la Vérité, la Pureté, la Bon­té, l’É­gal­ité, etc. Or, une abstrac­tion ne peut être un but.

Con­sid­érée au con­traire an point de vue par­ti­c­uli­er, ces­sant d être une abstrac­tion, devenant une voie, un moyen, la lib­erté se com­prend. C’est ain­si qu’on réclame la lib­erté de penser, c’est à‑dire de pou­voir, sans entrave extérieure, exprimer par la parole ou l’écrit ses pen­sées et ce de la façon dont elles se présen­tent à l’e­sprit. C’est l’ex­pres­sion inté­grale de la pen­sée qui est alors le but pour­suivi et non la liberté.

C’est juste­ment parce qu’il n’est que des lib­ertés par­ti­c­ulières que nous pou­vons, sor­tant du domaine de l’ab­strait, nous plac­er sur un ter­rain solide et affirmer « nos besoins et nos désirs » — bien mieux que « nos droits » expres­sion abstraite et arbi­traire — refoulés, mutilés ou trav­es­tis par des autorités d’or­dres divers.

Vie intel­lectuelle, vie artis­tique, vie économique, vie sex­uelle — les indi­vid­u­al­istes récla­ment pour elles la lib­erté de se man­i­fester pleine­ment, selon les indi­vidus, en égard à la lib­erté des indi­vidus, en dehors des con­cep­tions légal­i­taires et des préjugés d’or­dre religieux ou civ­il. Ils récla­ment pour elles, riv­ières grandios­es où se déverse l’ac­tiv­ité humaine, de couler sans obsta­cles — sans que les éclus­es du « moral­itéisme » ou les bar­rages du « tra­di­tion­nal­isme » tour­mentent ou embourbent leur cours. A tout pren­dre, mieux encore les lib­ertés avec leurs impétueuses erreurs, leurs soubre­sauts nerveux, leurs « man­ques de recul » impul­sifs, — que les autorités, façades immo­biles, grilles figées der­rière lesquelles on ago­nise et on s’é­ti­ole. Entre la vie en plein air et la vie en cave, nous choi­sis­sons la vie en plein air.


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