Des compagnons, âmes ardentes,
Sont pour nous lignes ascendantes
Où nous nous sentons attirés.
Tout : statues, emblèmes, mirages,
Est tombé sous leurs lourds bâtons ;
Fiers comme eux, nous les imitons :
Nous sommes des briseurs d’images !
Les dieux ont croulé devant nous ;
Les rois qui sont de même essence
Ne trouvent plus qui les encense
Et veuille plier les genoux.
Vous, rois, vous, prophètes, vous mages,
Vous soutenez une entité ;
Nous, nous voulons la liberté :
Nous sommes des briseurs d’images !
Autorité, lois et pouvoirs,
Dont nous portons les lourdes chaînes
Craignez pour les luttes prochaines :
Vous serez brisés sans espoir.
Vous nous venez des anciens âges
Et continuez leurs exploits
Quand nous ne voulons plus de lois…
Nous sommes des briseurs d’images !
Patrie et Famille ! Des mots
Qu’ont inventés les égoïstes.
Que nous ont dorés les sophistes
Et dont se sont épris les sots.
Nous leur laissons les avantages
D’une double maternité ;
Nous, nous aimons l’Humanité :
Nous sommes des briseurs d’images.
Le premier voleur qui l’osa
A dit : C’est à moi cette terre !
Sous cette forme autoritaire
Jusques à nous on en usa,
Comme si terre, ondes et plages
N’appartenaient pas à chacun ;
Nous ne les voulons pour aucun :
Nous sommes des briseurs d’images !
Quand, sous un pénible labeur,
L’individu courbe l’échine
Et que doucement s’achemine
Vers la fortune, l’exploiteur,
La honte couvre nos visages,
Non pour le maître et l’enrichi,
Mais pour l’ouvrier avachi :
Nous sommes des briseurs d’images !
Nous méprisons tous préjugés,
Nous vivons libres dans un monde
Où partout le vil et l’immonde
Jusqu’au pinacle sont juchés ;
Dans les innombrables rouages
Où languit la société
Nous recherchons la vérité :
Nous sommes des briseurs d’images !
Auguste Percheron