La Presse Anarchiste

Bibliographie

Le Pro­blème de l’Ha­bi­ta­tion des Tra­vailleurs, pat P. Dara­go [[Une bro­chure, 0 fr.75 à « l’A­ve­nir Social », à Épone (S.-et‑O.)]]. L’au­teur vou­drait que des habi­ta­tions pra­tiques, saines et confor­tables soient construites pour les tra­vailleurs. Pour réa­li­ser ce désir tout à fait jus­ti­fié, il pro­pose un pro­jet de loi qui per­met­trait d’emprunter les fonds sur les capi­taux dépo­sés aux caisses d’é­pargne, sur les fonds de réserve des socié­tés ano­nymes, des socié­tés de secours mutuels et de retraites, etc., y com­pris les béné­fices annuels des indus­triels et commerçants.

L’au­teur demande de 3 à 5 pièces pour chaque loge­ment, sans comp­ter la cui­sine et les water-clo­sets ; avec, pour l’en­semble de la mai­son, une buan­de­rie et une salle de bain, en cas d’im­pos­si­bi­li­té pour chaque loge­ment d’a­voir sa propre salle de bain. Les loyers ne devraient pas dépas­ser 5 % du capi­tal engagé. 

Le pro­jet de M. Dorage n’est que rai­son­nable. Rien ne s’op­po­se­rait à sa réa­li­sa­tion si Muni­ci­pa­li­tés et Pou­voirs Publics avaient sérieu­se­ment en vue de faire quelque chose pour amé­lio­rer le sort de ceux dont ils tirent leur substance.

Mais voi­là ! Veulent-ils réel­le­ment faire quelque chose pour ceux des­quels ils ne devraient être que les exé­cu­teurs des ordres. Les exé­cu­teurs, oui, mais pas dans le sens que je l’entends.

Pour jus­ti­fier la néces­si­té d’é­ta­blir des mai­sons saines, M. Dara­gon nous parle de la sale­té des locaux où, dans les grandes villes, les ouvriers sont logés. Sans doute, ce tableau qu’il nous donne comme géné­ral est un peu char­gé. Il y a, fort heu­reu­se­ment, des atté­nua­tions. Ce qui était vrai il, y a cin­quante ans, n’est plus tout à fait exact aujourd’­hui. Que l’hy­giène, la pro­pre­té, la com­mo­di­té ne soient pas tou­jours ni consul­tées ni res­pec­tées pour l’é­rec­tion des habi­ta­tions ouvrières, ce n’est que trop vrai. Mais pour com­bien de mai­sons bour­geoises, si l’ap­pa­rence exté­rieure est plus décente, le confort et l’hy­giène ne sont pas mieux res­pec­tés. Pro­prié­taires et archi­tectes n’ont en vue, dans leur plan, que de tirer le plus de pro­fit de l’es­pace dont ils dis­posent Ça n’est pas une justification.

Quant à la sale­té, ce n’est pas tou­jours la faute du propriétaire.

Je me rap­pelle avoir visi­té des amis ouvriers ins­tal­lés dans des mai­sons nou­vel­le­ment construites, où on avait essayé de rendre le loge­ment plus décent. Quoique livré depuis peu aux loca­taires, le désordre et la sale­té s’y mon­traient déjà d’une façon abo­mi­nable. Par suite de la négli­gence des loca­taires, cela ne fai­sait aucun doute.

Des murs éraillés, des sale­tés un peu par­tout, des choses bri­sées étaient les moindres des dom­mages. Où les cabi­nets étaient com­muns, de larges vir­gules — à moins que ce ne fussent des apos­trophes — s’é­ta­laient sur les murs, illus­trant la cochon­ne­rie de ceux qui, pré­voyant la crise du papier, pre­naient leurs doigts pour une serviette.

Ce lais­ser-aller, du reste, n’est pas par­ti­cu­lier aux ouvriers. En voya­geant dans des hôtels dont les habi­tués n’é­taient cer­tai­ne­ment pas des puro­tains, fré­quem­ment la cuvette des cabi­nets n’a­vait pas été bas­cu­lée par le sali­gaud qui s’en était ser­vi le dernier.

Dans le Midi prin­ci­pa­le­ment, à côté de luxueuses vil­las, il n’est pas rare de voir s’a­mon­ce­ler des tas d’or­dures et toutes sortes de déchets. Évi­dem­ment, ce n’est pas le patron loca­taire de la vil­la qui vide les ordures, mais il faut croire que la sale­té ne le gêne pas, puis­qu’il laisse ses lar­bins salir, et par­fois empes­ter les abords de sa demeure.

C’est que, en France, on a besoin d’ap­prendre la pro­pre­té. On aura beau four­nir des loge­ments propres aux loca­taires, ils ne tar­de­ront pas à riva­li­ser avec des étables à cochons, si ceux qui les habitent n’ont pas appris que la sale­té est une tare impar­don­nable cher tout être sain.

À défaut de la famille, il fau­drait que l’é­cole incul­quât aux enfants l’a­mour de la pro­pre­té du corps et de l’en­vi­ron­ne­ment, non pas théo­ri­que­ment, mais pratiquement.

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M. Dau­dé-Ban­cel, à l’oc­ca­sion de La Recons­ti­tu­tion des Cités détruites [[Un bro­chure, 1 franc, chez l’au­teur, 29 bou­le­vard Bour­don.]], pour­suit le même thème que M. Dara­go. Il ne dif­fère que sur les moyens de le réa­li­ser. Pour lui, ça serait de natio­na­li­ser la terre. 

L’É­tat pro­prié­taire — puisque dans l’ordre poli­tique exis­tant l’É­tat c’est la Nation — une amé­lio­ra­tion sur M. Vau­tour ? Avec la bureau­cra­tie auto­ri­taire, tatillonne, mes­quine qui nous gou­ver­né, il est per­mis d’en douter.

Au fait, pour­quoi attendre des auto­ri­tés des réa­li­sa­tions dont elle ne se pré­oc­cupe pas le moins du monde ? Seul, l’in­di­vi­du ne peut rien. Asso­cié, il peut accom­plir des pro­diges. Pour­quoi ne pas ten­ter un effort de ce côté ?

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Pro­tec­tion ou Libre-échange est une autre bro­chure du même auteur, où il démontre com­ment le « pro­tec­tion­nisme » est un fac­teur de la vie chère [[0 fr.30 chez l’auteur.]]

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Le Sta­tut Indi­gène en Algé­rie [[Bro­chure, 0 fr. 50, à la Ligue des Droits de l’Homme, 10, rue de l’U­ni­ver­si­té.]], rédi­gé par la sec­tion ora­naise de la Ligue des Droits de l’Homme, demande qu’une par­tie des indi­gènes soient, au moins, mis en pos­ses­sion de droits appar­te­nant à tout citoyen français.

Après trois quarts de siècle d’oc­cu­pa­tion, les Arabes sont encore trai­tés en bétail conquis ! Mal­gré tout le scan­dale que, sous l’empire, occa­sion­nèrent les exac­tions des bureaux arabes, ce sont encore eux qui gouvernent.

Don­ner aux indi­gènes les droits de citoyen fran­çais, ce ne serait pas un cadeau d’une muni­fi­cence exa­gé­rée. Mais je sup­pose que ça vau­drait tout de même mieux que le régime de l’arbitraire.

Puisque la main-mise sur le pays existe, puisque l’in­jus­tice com­mise ne pour­rait se répa­rer qu’en com­met­tant de nou­velles injus­tices et en sus­ci­tant de nou­velles catas­trophes, il ne serait que juste que les habi­tants des pays conquis soient au moins trai­tés comme des citoyens de la natio­na­li­té qui leur fut imposée.

J. Grave

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