La Presse Anarchiste

Lettre de Jules Montels

Nous rece­vons la lettre suivante :

Com­pa­gnons rédacteurs,

Le numé­ro du Bul­le­tin de la Fédé­ra­tion juras­sienne ren­dant compte du Congrès de la Haye m’a appris que le citoyen Abel Bous­quet de Béziers (Hérault) avait été mis sur la sel­lette des inqui­si­teurs de Londres et décré­té de mouchardise.

Je crois rem­plir un devoir en pro­tes­tant contre cette accu­sa­tion gra­tuite qui n’est fon­dée sur aucune preuve,et qui, à coup sûr, n’est que le pro­duit d’une ran­cune per­son­nelle et peut-être d’une diver­gence d’o­pi­nions anti-mar­xistes.

Je me per­met­trai en même temps de faire remar­quer aux poli­ti­queurs de l’In­ter­na­tio­nale que leur manière d’a­gir peu déli­cate pou­vait dans cette cir­cons­tance être sévè­re­ment qualifiée.

En effet, n’est-ce pas dési­gner aux lois ver­saillaises un citoyen fran­çais, rési­dant en France, que de pro­po­ser son expul­sion de l’Internationale ?

Le citoyen mis en cause appar­tient-il ou a‑t-il appar­te­nu à notre-association ?

Là n’est pas la ques­tion, et nous croyons que les juges suprêmes auraient mieux fait de gar­der le silence à cet égard.

Ayant connu le citoyen Bous­quet soit à Paris (pen­dant le 1er siège), soit dans l’Hé­rault, je pro­teste contre l’ac­cu­sa­tion lan­cée contre lui, accu­sa­tion toute ser­ral­lière ain­si que le prou­ve­ra la lettre ci-des­sous emprun­tée à la Répu­blique de Mont­pel­lier du 1er jan­vier 1872 :

« Dans le numé­ro du 19 décembre , l’Éman­ci­pa­tion, de Tou­louse, publie une lettre du citoyen Serraillier.

Cette lettre est une réponse au citoyen Razoua, au sujet d’une scis­sion qui se serait pro­duite dans l’Internationale.

Je n’ai pas à dis­cu­ter ici les asser­tions des citoyens Razoua et Serraillier.

Mais il est de ma digni­té d’hon­nête homme et de mon devoir de répu­bli­cain de rele­ver les insi­nua­tions mal­veillantes à mon égard, que le citoyen Ser­raillier cherche à glis­ser dans les esprits.

Je décline l’hon­neur d’être le cor­res­pon­dant de Razoua, puisque je ne lui ai jamais écrit ; je déclare for­mel­le­ment que je n’ai jamais connu Gus­tave Durand et Ver­mesch ; quant au reproche d’être le secré­taire du com­mis­saire cen­tral Béziers, l’exacte rec­ti­fi­ca­tion des faits le fera tom­ber de lui-même.

La muni­ci­pa­li­té de Béziers vou­lant s’en­tou­rer de fonc­tion­naires vrai­ment répu­bli­cains et éner­giques, m’of­frit le poste de com­mis­saire municipal.

Mon dévoue­ment bien connu à la Répu­blique démo­cra­tique et sociale, me fit pas­ser sur les incon­vé­nients que pou­vait avoir cette fonc­tion ; j’acceptai.

Une frac­tion de la démo­cra­tie vit alors avec envie cette nomination.

Elle ne put me par­don­ner cette marque de confiance et le bien que je pou­vais faire au par­ti républicain.

Cette rai­son et aus­si une assi­gna­tion en police cor­rec­tion­nelle, pour un écrit poli­tique, m’en­ga­gèrent à rési­gner mes fonc­tions ; ce que je fis. Je soup­çonne fort, etc., etc.

J’at­tends dans le jour­nal dont il est le cor­res­pon­dant, une rec­ti­fi­ca­tion de la part du citoyen Ser­raillier : s’il s’y refu­sait, je serais for­cé de voir dans cet acte une lâche­té réelle, à laquelle je m’en­gage à appli­quer la cor­rec­tion qu’elle mérite.

Salut fra­ter­nel.

Bous­quet, Abel »

Deux mots pour finir :

Si le citoyen Bous­quet a eu tort d’ac­cep­ter l’emploi qu’il a un ins­tant occu­pé, son acte est cer­tai­ne­ment atté­nué dans ce sens, que la muni­ci­pa­li­té de Béziers est essen­tiel­le­ment répu­bli­caine, com­po­sée qu’elle est de 17 ouvriers et de 10 répu­bli­cains de de diverses nuances.

Salut et solidarité.

[/​Jules Mon­tels/​]

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