La Presse Anarchiste

Protestion du Conseil Fédéral anglais

On lit dans l’Inter­na­tio­nale, de Bruxelles (numé­ro du 27 octobre) :

« Nous publions plus loin une lettre du secré­taire du Conseil fédé­ral anglais. Nous en recom­man­dons la lec­ture atten­tive à ceux qui auraient pu gar­der encore au fond du cœur quelque sym­pa­thie inavouée pour l’ex-Conseil géné­ral de Londres, et à ceux qui auraient conser­vé le moindre doute sur les actes de ce Conseil auto­ri­taire qui devait, en expi­rant, don­ner au monde des tra­vailleurs le pénible spec­tacle de la mys­ti­fi­ca­tion de La Haye. Cette lettre de Londres se ter­mine effec­ti­ve­ment par l’ex­pres­sion de cet espoir, que les sec­tions anglaises, débar­ras­sées main­te­nant de ce pou­voir qui les oppri­mait au lieu de les secon­der, vont se mettre acti­ve­ment à la besogne, et impri­me­ront plus faci­le­ment au mou­ve­ment social l’é­lan irré­sis­tible para­ly­sé naguère encore par le Conseil géné­ral. On trou­ve­ra aus­si dans cette lettre des nou­velles du tra­vail en Angle­terre. Les relieurs de Londres et les ouvriers du bas­sin de Liver­pool pré­viennent leurs frères de Bel­gique, qu’ils viennent de se mettre en grève pour sou­te­nir leurs droits. Ils espèrent que pas un seul ouvrier ne vou­dra venir de l’é­tran­ger pour accep­ter le tra­vail qu’ils ont aban­don­né, et les empê­cher de triom­pher dans une lutte où ils ont le bon droit pour eux. Nous sommes cer­tains que cet espoir ne sera pas déçu.

Voi­ci la lettre dont parle l’In­ter­na­tio­nale :

[/​Londres, 21 octobre 1872./]

Chers citoyens,

J’ai l’a­van­tage de vous infor­mer que le Conseil fédé­ral anglais a pris la réso­lu­tion de cor­res­pondre direc­te­ment avec toutes les Fédé­ra­tions de l’As­so­cia­tion, et d’é­chan­ger ses jour­naux avec les leurs. En consé­quence, je vous enver­rai direc­te­ment l’Inter­na­tio­nal Herald, et je serai heu­reux de rece­voir en échange quel­que­fois des lettres de vous, et de coopé­rer avec vous, et de quelque manière que ce soit, à l’a­van­ce­ment de la cause pour laquelle nous tra­vaillons. Il rece­vra éga­le­ment avec plai­sir les nou­velles de vos luttes contre le capi­tal, et vous com­mu­ni­que­ra de temps à autre l’é­tat de nos affaires en Grande-Bre­tagne. Nous avons en ce moment dif­fé­rentes grèves en train. Les ébé­nistes en blanc de Londres sont en grève, parce que les patrons ont affi­ché des pla­cards annon­çant qu’ils n’emploieraient pas de tra­de’s unio­nistes. La lutte pro­met d’être rude ; les patrons s’ef­forcent de faire venir des ouvriers alle­mands. Les ouvriers de M. Zahn­dorf, relieur, Bridges street, Covent Gar­den, à Londres, se sont éga­le­ment mis en grève, ce patron ayant embau­ché des ouvriers du conti­nent à 16 Shil­lings (20 francs) par semaine, tan­dis que le mon­tant régu­lier des salaires est de 30 à 32 shil­lings (37 fr. 50 à 40 fr.). Les gré­vistes ne s’op­posent pas à ce que l’on donne à ceux-ci le même salaire qu’à eux-mêmes. Ils savent fort bien en effet qu’en lais­sant faire les patrons, les ouvriers anglais ne tar­de­raient pas à voir leur paie tom­ber au même niveau que celle des étran­gers occu­pés avec eux. Les gré­vistes nous ont adres­sé un appel. Si donc vous aviez connais­sance de demandes d’ou­vriers relieurs en Bel­gique, veuillez expli­quer à ceux-ci le véri­table état des choses.

Je viens de rece­voir une lettre de notre sec­tion de Liver­pool, qui nous annonce la grève des ouvriers du bas­sin, par suite d’une affiche qui leur ordon­nait de faire remise de leurs cartes de membres des tra­de’s-unions. Ils ont donc quit­té le tra­vail au nombre de 4000. Dans cette cir­cons­tance aus­si, les patrons ont mena­cé de faire venir des ouvriers belges. Faites ce que vous pour­rez pour empê­cher qu’un seul homme ne parte. Sou­ve­nez-vous du noble exemple que vous avez don­né vous-mêmes lors de la grève des méca­ni­ciens de New­castle : car la classe labo­rieuse a les yeux sur l’In­ter­na­tio­nale en ce moment. Si les ouvriers de Liver­pool réus­sissent, plu­sieurs mil­liers d’ou­vriers vien­dront dans nos rangs. Faites en cette cir­cons­tance tout ce qu’il sera pos­sible pour nous seconder.

Main­te­nant que le Conseil géné­ral n’est plus ici, je puis affir­mer que nous allons faire plus de pro­grès que n’en aurions pu faire s’il était res­té près de nous. L’au­to­ri­té que le Conseil géné­ral avait concen­trée entre ses mains d’une manière si fatale avait para­ly­sé le mou­ve­ment en Angle­terre. Main­te­nant, nos fers sont bri­sés, et j’es­père qu’a­vant le pro­chain Congrès le mou­ve­ment anglais sera digne d’être cité à la tête de l’ar­mée du travail.

Salu­ta­tions bien fra­ter­nelles à tous les com­pa­gnons, et tou­jours avec vous pour la cause du travail.

[/​John Hales,

Secré­taire cor­res­pon­dant du Conseil fédé­ral anglais

26, Baro­ness Road, Colum­bia Mar­ket, Lon­don. E. C./]

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