La Presse Anarchiste

Centenaire de la Conquête de l’Algérie (1830 – 1930)

[[Voir la Revue Anar­chiste no4.]]

Histoire rectifiée

En mars 1930, les fêtes du Cen­te­naire se dérou­le­ront nor­ma­le­ment ; les Congrès tiennent leurs assises, les Chambres de Com­merce se dépensent et se réjouissent, les confé­rences se suc­cèdent en Algé­rie, à Paris, à Mar­seille, etc., etc. ; délé­gués, audi­teurs congra­tulent, exhortent et se grisent du men­songe offi­ciel répan­du à la cadence d’une crue enva­his­sante ; car il s’a­git bien d’un délit fla­grant d’es­cro­que­rie historique.

Mais, avant d’en­tre­prendre la démons­tra­tion, notons en pas­sant que la presse algé­rienne, si ser­vile qu’elle soit, mani­feste son mécontentement.

Elle n’est point satis­faite, il y a net­te­ment carence des tou­ristes, et tous ceux, « jour­na­listes, com­mer­çants », qui s’i­ma­gi­naient voir défer­ler une marée de gogos, sont pro­fon­dé­ment déçus.

De ce point de vue, il se confirme en effet que le Cen­te­naire est un four ; aus­si la presse libre, accuse net­te­ment le Com­mis­sa­riat géné­ral d’a­voir failli à sa tâche.

Ce n’est point notre avis, car tous ceux qui ont sui­vi l’é­la­bo­ra­tion du pro­gramme, éta­bli par le gou­ver­ne­ment, savent très bien que l’ob­jec­tif pour­sui­vi n’é­tait pas la recherche de vastes cara­vanes tou­ris­tiques à qui l’on aurait mon­tré les jar­dins, les sites, les ruines de Beni Ounif, Fignig, Dje­mi­la, Souk-Ahras, etc.

Ce n’é­tait là qu’un plan acces­soire, un décor, mais l’es­sen­tiel était tout autre. La com­mé­mo­ra­tion est net­te­ment. poli­tique, et comme la poli­tique de la Troi­sième Répu­blique n’est que l’exé­cu­tion des volon­tés éco­no­miques et finan­cières, il est nor­mal et logique que les fêtes du Cen­te­naire illus­trent ces deux points : la puis­sance poli­tique, la réus­site de l’é­co­no­mie nord-africaine.

Sur ces deux plans, les inté­res­sés ont satis­fac­tion. La poli­tique s’af­firme puis­sante en Algé­rie, et les magnats du com­merce sont aux anges.

Le reste n’é­tant que par sur­croît, qu’il réus­sisse ou non, est secon­daire et les impré­ca­tions de la presse dite libre portent à faux, n’ayant pas vu ou vou­lu voir les visées offi­cielles qui sont nor­ma­le­ment poursuivies.

Cette digres­sion a son impor­tance dans le cha­pitre de l’his­toire, car les liens qui unissent la poli­tique de 1930 à celle d’il y a cent ans, ont la même identité.

En effet, c’est un truisme de répé­ter que l’his­toire offi­cielle est une inter­pré­ta­tion par­tielle et uni­la­té­rale, sans véri­table valeur historique.

Cha­cun peut savoir que le trai­té de Ver­sailles accuse l’Al­le­magne d’une res­pon­sa­bi­li­té unique dans la guerre 1914 – 1918 ; pour­tant de nom­breux docu­ments sont venus prou­ver que les res­pon­sables sont dans tous les États et la France prin­ci­pa­le­ment, avec Del­cas­sé et Poincaré.

De même, beau­coup de citoyens fran­çais croient encore que la guerre de 1870 fut décla­rée par l’Al­le­magne, alors que les archives font la preuve que ce fut Napo­léon III qui, en fait, décla­ra la guerre.

Pour la conquête de l’Al­gé­rie, en 1830, les erreurs recueillies par l’o­pi­nion publique, sont encore plus mani­festes et atteignent toutes les classes sociales.

Les citoyens, mode­lés par l’é­cole pri­maire, acceptent et répètent que l’ex­pé­di­tion d’Al­ger eut pour motif une ques­tion d’hon­neur, le Consul de France à Alger, M. Deval, ayant été ver­ge­té avec le manche d’un chasse-mouches par le bey Hussein.

Les couches supé­rieures, façon­nées par les cours d’his­toire secon­daires, savent en plus que notre Consul était en mis­sion, au sujet d’une dette des 7 mil­lions due au bey et recon­nue par un trai­té en 1801 et dont le Consul che­va­le­resque refu­sait d’en­tendre parler.

Ils peuvent savoir encore que la régence d’Al­ger était sous la domi­na­tion turque et que les Arabes du lit­to­ral étaient des pillards et des cor­saires por­tant dom­mages et dépré­da­tions à la marine et au com­merce fran­çais, pous­sant l’au­dace jus­qu’à faire des incur­sions sur les côtes de Pro­vence et du Languedoc.

Ain­si, dans l’hy­po­thèse la plus favo­rable, l’en­sei­gne­ment his­to­rique don­né aux Fran­çais pré­sente l’ex­pé­di­tion de 1830 comme une réponse faite au Dey ayant insul­té le pavillon fleur­de­li­sé et une entre­prise de salu­bri­té, visant à la des­truc­tion des nids de pira­te­rie par­tant de Tri­po­li jus­qu’à Sali sur l’Atlantique.

Aujourd’­hui encore, pen­dant les fêtes du Cen­te­naire, ce sont les thèmes repris dans les congrès, les dis­cours, les confé­rences tant à la colo­nie qu’à la métro­pole, et par­tant de ces pos­tu­lats, l’ex­pé­di­tion se motive devant l’o­pi­nion publique et la conquête se pré­sente comme une vic­toire de la civi­li­sa­tion sur la bar­ba­rie et les his­to­rio­graphes abondent en décla­ma­tions pathé­tiques : nos inten­tions étaient pures, nos buts dés­in­té­res­sés et quand le 5 mai 1853, Napo­léon III lan­çait son mani­feste à la popu­la­tion musul­mane, il disait effron­té­ment : « Nous sommes venus affran­chir ce peuple d’une oppres­sion séculaire. »

De même, en 1903, le Pré­sident de la Répu­blique Lou­bet, en visite offi­cielle, décla­rait : « Nous appor­tons la force et non la tyran­nie, la civi­li­sa­tion et non la haine. »

En 1922, Mil­le­rand, Pré­sident de la Répu­blique, répon­dant à une requête de l’É­mir Kha­led, don­nait des conseils de pru­dence : « La France vous apporte la civi­li­sa­tion, mais il est dans votre inté­rêt de ne pas aller trop vite. »

C’est un thème géné­ral, sur cette thèse his­to­rique, que, les lau­da­teurs chantent sur le mode majeur : « La Conquête de l’Algérie ».

Mais la véri­té est toute autre, et les pos­tu­lats radi­ca­le­ment faux, il s’en­suit logi­que­ment que la « musique civi­li­sa­trice » devra se taire.

Venons aux faits :

Que sait-on de l’Al­gé­rie avant 1830 ?… Peu de choses, l’his­toire est avare ; d’une manière géné­rale, on sait que la régence d’Al­ger éten­dait son ter­ri­toire de la Tuni­sie au Maroc.

Depuis trois cents ans, les Turcs étaient en prin­cipe les maîtres de la régence ; en pra­tique le Dey d’Al­ger, pré­fet des Turcs, était le véri­table sou­ve­rain, payant rede­vance à la Tur­quie qui ne mani­fes­tait guère sa domi­na­tion que par ses exi­gences financières.

Par contre, le Dey et ses créa­tures, tyrans dévo­ra­teurs, pesaient lour­de­ment sur le peuple arabe qui ne for­mait pas une uni­té poli­tique, mais était lié par une croyance reli­gieuse com­mune, la « foi en Mahomet ».

La régence, en la per­sonne du Dey, était donc res­pon­sable, si res­pon­sa­bi­li­té il y a, de l’in­ci­dent avec notre Consul et le peuple était abso­lu­ment en dehors de la que­relle d’argent qui oppo­sait la France endet­tée an Dey réclamant.

Mais, au fait, l’hon­neur si cha­touilleux en 1830, avait-il vrai­ment ses raisons ?

Les contem­po­rains ne le jugeaient pas ain­si, cet épi­sode bel­li­queux ne fut guère consi­dé­ré que comme le pré­lude d’un vau­de­ville ; la rup­ture avec la régence n’é­tait pas une affaire excep­tion­nelle, l’his­toire enre­gistre de mul­tiples dis­cordes et rup­tures entre le Dey et le gou­ver­ne­ment fran­çais. Charles-Quint et Louis XIV avaient déjà envoyé des escadres, bom­bar­der la capi­tale des Bar­ba­resques, et chose curieuse, M. Paul Mas­son qui mit à jour les archives des Affaires étran­gères, recon­naît que le bom­bar­de­ment d’Al­ger en 1683 par Duquesne avait por­té un tort consi­dé­rable au com­merce fian­çais éta­bli dans les États de Bar­ba­rie, car il y avait déjà des com­mer­çants fixés là-bas à cette date, si bien qu’en 1827 l’in­ci­dent sem­blait devoir suivre son cours habituel.

Petite démons­tra­tion mili­taire de la France, puis dans les palabres le Dey ferait des excuses, offri­rait des pré­sents ; on fixe­rait une indem­ni­té et on conclu­rait un nou­veau trai­té d’amitié.

Un pre­mier point est acquis. Le fait n’é­tait pas nou­veau, il était sans grande impor­tante ; la presse de l’é­poque est ins­truc­tive à cet égard, car nom­breux furent ceux qui s’op­po­sèrent à l’ex­pé­di­tion en 1830.

En second lieu, les Bar­ba­resques étaient-ils vrai­ment ces pirates et ces sau­vages dont il fal­lait se débar­ras­ser ou tout au moins réduire à l’im­puis­sance de nuire ?

Oubliant volon­tai­re­ment les « Sur­couf de Saint-Malo », ouvrons à ce sujet les archives de la Chambre de Com­merce de Mar­seille dont le rôle fut des plus impor­tants dans cette histoire.

Nous appre­nons que dès la seconde moi­tié du quin­zième siècle, sous Fran­çois Ier, la France, avec Soli­man, pré­pa­ra l’é­ta­blis­se­ment des conces­sions d’A­frique et depuis cette date jus­qu’à la conquête, ces éta­blis­se­ments gérés par des com­mer­çants mar­seillais firent flot­ter en terres bar­ba­resques le dra­peau français.

Des preuves, en voici :

Dès 1561 – 1580, à côté des éta­blis­se­ments comme la Com­pa­gnie du Corail, celle des Bas­tions de France, et diverses Com­pa­gnies d’A­frique, de nom­breux négo­ciants rele­vants de la Chambre de Com­merce de Mar­seille, s’é­ta­blirent pour leur compte dans les prin­ci­pales villes d’A­frique du Nord : Alger, Tunis, Tripoli.

En 1564, un Consu­lat de France fut créé à Alger ; en 1577, à Tunis.

À Oran, la Corte Chi­ca du dix-sep­tième siècle était au temps des Maures un lieu de délices célé­bré par les poètes, et en 1830, les Fran­çais trou­vèrent là-bas une bour­gade de 3 à 4.000 habi­tants, presque tous Espagnols.

Extra­or­di­naire pays de Bar­bares ?… où les étran­gers vivent près des autoch­tones, font du com­merce, ont des rap­ports d’af­faires, pos­sèdent des éta­blis­se­ments et des pro­prié­tés, donc la Chambre de Com­merce de Mar­seille était si fière, étant la prin­ci­pale intéressée.

Les deux causes invo­quées par les his­to­riens à gages perdent toute leur valeur et ne sub­sistent que comme « pré­textes » voi­lant des buts moins avouables, rare­ment avoués, mais pour­tant recon­nus par des auteurs divers, éloi­gnés du grand public. (Gabriel Esquei : La Prise d’Al­ger, par exemple.)

L’ex­pé­di­tion eut deux adver­saires de marque : l’An­gle­terre et la presse libé­rale ; mais elle eut sur­tout un par­ti­san : le com­merce et l’in­dus­trie nais­sante, qui sur­ent mener à bien leurs desseins.

La situa­tion géné­rale était favo­rable, en 1830. Les guerres de l’Em­pire avaient épui­sé la France, et les autres nations la tenaient pour une puis­sance de deuxième rang ; elle avait besoin de rega­gner son prestige.

L’An­gle­terre était aux prises avec des dif­fi­cul­tés inté­rieures ; l’Au­triche avait des démê­lés avec l’I­ta­lie. À l’in­té­rieur, la presse libé­rale s’a­gi­tait, la puis­sance mili­taire avait des exi­gences, les offi­ciers de Napo­léon vivaient encore, et Charles X ne les avait pas tous casés ; ils étaient tur­bu­lents, pous­saient à la guerre pour avoir de l’a­van­ce­ment, et n’a­vaient de chance que dans une aven­ture extérieure.

D’autre part, c’é­tait un excellent déri­va­tif à l’a­gi­ta­tion des esprits. C’est dans ces condi­tions que l’o­pé­ra­tion fut déci­dée, et l’An­gle­terre fut pla­cée devant le fait accompli.

Le prince Sixte de Bour­bon, des­cen­dant de Charles X, dans son livre La der­nière Conquête du Roi, rap­pelle com­ment le baron d’Haus­sez reçut les repré­sen­ta­tions de l’am­bas­sa­deur d’An­gle­terre : « Je vous ai déjà dit que je ne vou­lais pas trai­ter l’af­faire diplo­ma­ti­que­ment ; la France se moque de l’Angleterre. »

L’Au­triche visait la Ser­bie et la Bos­nie ; elle espé­rait le démem­bre­ment de la Tur­quie, ce qui faci­li­te­rait ses des­seins de conquête ; il y eut un mar­ché entre les deux gou­ver­ne­ments complices.

L’Au­triche lais­sait faire ; la France pas­sait la main. Et, comme la Rus­sie convoi­tait Constan­ti­nople, elle sou­hai­tait la défaite de la Turquie.

Devant ces faits, l’im­mense empire otto­man, en pleine décom­po­si­tion, pro­tes­ta pour la forme, mais lais­sa faire les autres nations aus­si, et, grâce à ces cir­cons­tances heu­reuses, la pre­mière par­tie de la conquête se fit sans trop d’inconvénients.

À l’in­té­rieur. il y avait grande urgence, et quand Vil­lèle s’op­po­sa à toute action guer­rière, le ministre de la guerre Cler­mont-Ton­nerre répon­dit : « Il ne faut pas lais­ser échap­per l’oc­ca­sion de don­ner quelque chose qui occupe ce peuple, car il faut le détour­ner de la fer­men­ta­tion politique. »

D’ailleurs, l’af­faire enga­gée, le maré­chal Bugeaud, duc d’Is­ly, écri­vait à Thiers, le 5 août 1836 : « Envoyez-moi tous les prê­cheurs d’é­ga­li­té, et je reste en Algé­rie pour les faire tuer. »

Rai­sons exté­rieures et inté­rieures sont bien loin des chan­sons « droit, jus­tice, civilisation ».

Le minis­tère Poli­gnac ne se sou­ciait guère de tous ces bal­lons déma­go­giques lâchés par l’his­toire et recueillis par la Troi­sième République.

D’ailleurs, le plan mili­taire exé­cu­té par la monar­chie avait été conçu et rédi­gé par le com­man­dant Bou­tin, sous l’Em­pire, et l’empereur bot­té se moquait bien de la civi­li­sa­tion, lui qui cher­chait la for­tune et la gloire.

S’il nous faut des pré­ci­sions pour ter­ras­ser le men­songe his­to­rique, il nous suf­fit de pui­ser dans les archives de la Chambre de Com­merce de Mar­seille. Nous y trou­vons en effet que, dès le sei­zième siècle, les com­mer­çants mar­seillais, repré­sen­tés par leur vieille Chambre de Com­merce, s’en­ten­dirent pour faire de la « colonisation ».

Le com­merce de Mar­seille deman­dait qu’on en finît avec le régime des deys ; aus­si il prê­ta un concours des plus actifs à la pré­pa­ra­tion de l’expédition.

Mais comme, peu de jours après la prise d’Al­ger par le maré­chal de Bour­mont, Charles X per­dait son trône, une grande inquié­tude s’empara du com­merce et de la finance, qui jouaient leur carte sur la colonisation.

Qu’al­lait faire la Monar­chie de Juillet ?

Diverses hypo­thèses étaient agitées.
Entente avec le Dey, éta­blis­se­ment d’un gou­ver­ne­ment arabe, remise de la régence à la Tur­quie, à Méhé­met-Ali ou à l’Ordre de Malte, par­tage avec les autres puissances.

L’af­faire traî­nait et on n’o­sait conclure. Le gou­ver­ne­ment igno­rait à peu près tout de cette vaste région, et seuls les com­mer­çants savaient ce qu’on pou­vait tirer de ce riche pays.

Aus­si, un nou­veau par­ti récla­mant ardem­ment la colo­ni­sa­tion se for­ma à Mar­seille, et, comme l’ex­pé­di­tion n’é­tait pas popu­laire, le par­ti jeune et ardent de la colo­ni­sa­tion mena une cam­pagne vigou­reuse. Des colons, des com­mer­çants nou­veaux allèrent s’é­ta­blir à la Régence, et, le 7 décembre 1830, ils obte­naient du géné­ral en chef la déci­sion por­tant créa­tion de la Chambre de Com­merce d’Al­ger, sœur cadette de celle de Marseille.

Elles prirent toutes deux en mains les inté­rêts de la colo­ni­sa­tion. Dès le mois d’oc­tobre 1831, elles réclament au Pré­sident du Conseil une prompte colo­ni­sa­tion de toute la Régence, dans l’in­té­rêt « du com­merce, de l’a­gri­cul­ture, de la marine et de l’industrie ».

Alors que des dépu­tés célèbres, Dupin, Pas­sy, etc., demandent l’é­va­cua­tion, le Comi­té de la Colo­ni­sa­tion agit vigou­reu­se­ment près du gouvernement.

En, août 1833, une com­mis­sion d’en­quête, pré­si­dée par le géné­ral Bon­net, est arrê­tée au pas­sage à Mar­seille ; la Chambre de Com­merce lui remet ses mémoires, fait valoir ses desi­de­ra­ta ; trente-neuf com­mer­çants expriment leurs craintes, ils font sen­tir le dan­ger qu’il y a pour le com­merce si on aban­donne cette conquête, ou même si on la réduit à une occu­pa­tion mili­taire des grandes villes. Ils font res­sor­tir les avan­tages qu’il y a pour le com­merce et l’in­dus­trie à conser­ver et à colo­ni­ser ce beau pays. Les Chambres de Com­merce de Mar­seille et d’Al­ger appuient cette péti­tion du par­ti de la colo­ni­sa­tion adres­sée au gou­ver­ne­ment. Elles adressent, une cir­cu­laire aux trente-six Chambres de Com­merce de France, leur deman­dant de sou­te­nir leur manière de voir. Toutes répondent favo­ra­ble­ment et épaulent leurs consœurs, qui se trouvent être plus direc­te­ment inté­res­sées à ce que la colo­ni­sa­tion se réa­lise intégralement. 

C’est sous ces influences que la conquête fut élar­gie et la colo­ni­sa­tion poursuivie.

Tous ces aveux cyniques éclairent d’un jour cru les mobiles véri­tables de la conquête de l’A­frique du Nord.

Il est inutile d’in­sis­ter. L’His­toire rec­ti­fiée est nette ; elle est la preuve que le men­songe est manié par nos maîtres et que l’É­tat, en for­mant des citoyens, les empoi­sonne sui­vant ses intérêts.

À côté des don­nées éco­no­miques qui confirment la logique du maté­ria­lisme his­to­rique, il en est d’autres qui lui échappent.

Les fac­teurs poli­tiques, sociaux, éco­no­miques, ont joué cha­cun leur rôle, mais jamais, à aucun moment, il ne fut ques­tion d’« huma­ni­té », de « civilisation » !

Des inté­rêts, et c’est tout ce que démontre l’His­toire rectifiée.

[/​Élie Ango­nin

(23 mars 1930)/]

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