La grande et puissante « Union des Mineurs » d’Angleterre s’est péniblement mise en mouvement, comme un lourd mastodonte elle a dressé ses « membres » ankylosés.
Anéantis, épuisés par les longs et pénibles efforts séculaires qu’ils accomplissaient dans les entrailles de notre planète pour extraire le charbon qui mettait en mouvement de nombreuses machines, productrices de vie et de mort ; les mineurs ont quitté les profondeurs souterraines pour remonter au grand jour ? Montrer à leurs maîtres qu’ils étaient capables … de faire la bombe et crever de faim, fut pour ce prolétariat intelligent l’affaire d’un instant.
Je pensais que fatigués d’entretenir, de nourrir dans l’oisiveté, le luxe et l’orgie les actionnaires des mines, ils voulaient enfin que le résultat de leurs efforts allât servir aux besoins d’autres travailleurs, comme eux, qui leur procureraient en échange les objets nécessaires à leur existence. Qu’ils voulaient se libérer de leurs parasites sociaux vivant de leur activité et provoquant la misère au foyer, comme l’ankylostome attaché aux muqueuses de l’intestin du mineur provoque en suçant le sang des capillaires, la misère physiologique et la mort.
Du reste à la lumière des faits aucune industrie de peut montrer d’une façon aussi péremptoire — puisque ne nécessitant aucune manipulation intermédiaire — les criminelles prétentions des propriétaires de mines. En effet : est-ce le résultat de leur intelligence, de leur effort, de leurs capitaux, de leur travail, le charbon ? L’intervention d’un propriétaire fainéant est-elle indispensable à son existence ? Le charbon est le résultat des forces naturelles en perpétuel mouvement, la conséquence d’une longue évolution géologique ; et il appert donc que la prétention du droit propriété sur ce produit devrait être considéré comme la suite d’une aberration mentale dont on devrait se garer.
Je supposais que les mineurs d’Angleterre et d’ailleurs forts de ce raisonnement, allaient en déduction logique et dans un geste violent, mais nécessaire, écraser comme une punaise cette horde d’hobereaux prétentieux de la finance, ainsi que leurs faméliques adulateurs et leur valetaille. Que pourrait la bourgeoisie, force subjective, contre les travailleurs, force réelle et positive ? Rien. Mais voilà, les mineurs habitués au noir, aux ténèbres ne purent regarder en face la lumière ; les choses, les effets et les causes leur apparurent comme obscures et mystérieuses. Comme le soleil voilé de la brume d’hiver la vérité leur apparut. Ils établirent des revendications ? !
Un million d’hommes par l’arrêt de leur travail ont immobilisé la vie sociale d’un pays, jeté le trouble dans nombre d’industries et imposé le repos à d’autres travailleurs.
La peur s’empara des hautes sphères politiques et financières. Pourquoi ? pour établir le « minimum de salaire ». C’est-à-dire la reconnaissance à une catégorie d’individus de prendre la production du mineur, de la payer une certaine somme et de lui revendre ensuite une partie de cette production plus cher que la totalité qu’on lui paya.
Ah ! oui, le prolétariat est une force d’Hercule. Mais comme Hercule lorsqu’il fut revêtu de la tunique de Nessus, il fut impuissant.
La tunique de Nessus pour le prolétariat — c’est le respect des choses établies qui le voue à l’impuissance et à l’effort stérile.
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