L’étude de la nature a pris au cours de ces derniers siècles, une importance considérable et les idées sur le système du monde ont subi des modifications radicales. Il importe pour nous de voir quelle a été la place des idées libertaires et des théories anarchistes dans le mouvement des idées. Cette question a été mise à jour par Kropotkine surtout dans la Science moderne et l’Anarchie et d’une façon plus brève mais très complète et d’une grande clarté dans l’Anarchie, sa philosophie, son idéal. Il note bien entendu que les idées anarchistes tirent leur valeur de ce qu’elles ne sont pas les règles codifiées issues du cerveau d’un intellectuel dogmatiste, mais qu’elles sont constamment vivantes et changeantes comme les idées de la masse où elles ont pris naissance, de cette masse qu’elles tendent à animer de plus en plus. Et nous pouvons constater que les progrès accomplis dans les sciences de la nature, les nouvelles tendances révolutionnaires qui se sont manifestées vis-à-vis des anciens dogmes ont marché de pair avec les gains réalisés dans l’ordre social par les idées d’émancipation de l’individu des contraintes millénaires. Nous avons pu assister dans tous les ordres de faits à une révolte énergique des individus réclamant leur droit à une existence autonome, à vivre leur vie, à réaliser leurs tendances au point de vue intellectuel, au point de vue physique, au point de vue sentimental. Cet effort a abouti dans les sciences naturelles à la déconfiture totale des anciennes explications religieuses ou philosophiques, qui reviennent à peu près au même, à savoir : rendre compte d’un phénomène dont la cause est inconnue par des mots auxquels on donne la valeur de cette cause : Dieu, Âme, Vie et depuis Progrès, Évolution. Tout ce verbalisme a été reconnu insuffisant et spiritualisme, animisme, finalisme et vitalisme ont été réduit à leur véritable valeur, valeur nulle quant à une explication quelconque de ce que nous voyons autour de nous. Et en même temps que la faillite des vieux systèmes sur les questions de dogme, leur faillite morale s’est montré totale et irrémédiable. L’individu a enfin refusé de se plier plus longtemps à une restriction constante de ses désirs, restriction nuisible issue de la croyance aux forces occultes que rien ne justifiait plus… Il semble donc qu’il n’y ait pas eu simple corrélation entre les sciences naturelles et l’anarchie ; elles ont fait plus que de progresser suivant deux routes parallèles, elles se sont prêtées sans cesse un mutuel appui et tout progrès de l’une a hâté l’évolution de l’autre. Les savants ont procédé dans leurs critiques des dogmes périmés dans un esprit anarchiste, esprit de révolté contre la va leur absolue des théories religieuses.
Cela a abouti à une révision de toutes les anciennes valeurs et à leur rejet pur et simple. Un immense effort d’unification entrepris par Lavoisier s’est poursuivi au cours de tout le
« L’invention ne peut être accomplie que par des êtres humains libres, aux larges horizons, doués d’une imagination que n’enchaîne pas l’habitude d’un même labeur toujours identique à lui-même… L’invention est toujours le produit d’un cerveau amoureux du changement et en révolte contre ce qui est. Tout cela revient à dire que le cerveau de l’inventeur est juste le contraire des cerveaux produits par la spécialisation et la division du travail.
« En conséquence nous devons cultiver chez nous et chez autrui l’esprit de Révolte sous ses modalités les plus diverses. » (Georges Bolm.)
Et tout cc petit ouvrage n’est qu’un long hommage rendu aux services innombrables que les tendances libertaires out rendu à la Biologie.
D’autre part, dans son œuvre de destruction la science nous apporte, à nous, anarchistes, de précieux arguments. Et enfin, en étudiant les besoins de l’individu humain, les meilleures conditions de vie et de développement, les sciences naturelles nous fournissent une série de renseignements qu’il ne sera pas inutile de connaitre au moment ou nous pourrons, enfin libres, reprendre dans nos mains la reconstruction sociale sur, les ruines désinfectées de l’autorité détruite.
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J’ai tenu à poser ces considérations générales avant d’aborder des problèmes plus particuliers. Je n’ai pu faire qu’un exposé des tendances actuelles de la recherche scientifique sans pouvoir apporter, faute de place, la série de faits, nécessaire pour étayer ces thèmes. Je compte le faire au cours des exposés qui suivront. Les camarades qui voudront faire des objections n’auront qu’à m’écrire : A. Reymond, 9, rue Drouin, Nancy. Je tâcherai d’en tirer profil et je leur en serai reconnaissant. — A. R.