La Presse Anarchiste

Au Vieux Colombier

Le Paque­bot Tena­ci­ty, par Charles Vil­drac, est un stea­mer au nom iro­ni­que­ment sym­bo­lique, qui doit empor­ter cieux ouvriers pari­siens, res­ca­pés de la guerre, vers les mirages agri­coles du Cana­da. C’est Bas­tien, l’homme des réso­lu­tions, qui a entraî­né l’indécis Ségard, son copain du front. Mais un acci­dent de chau­dières retarde le départ du bateau, et les deux pion­niers sont obli­gés de séjour­ner plu­sieurs semaines dans le petit hôtel accueillant où ils s’attablèrent en arri­vant au port d’embarquement. Comme Thé­rèse, la ser­vante, est gen­tille, pen­dant que Ségard se borne à l’aimer timi­de­ment de toute son âme sen­ti­men­tale et tendre, Bas­tien, qui sait par­ler aux filles, séduit celle-ci sans peine, et le jour même où le Tena­ci­ty répa­ré va reprendre la mer, il plaque, tou­jours réso­lu­ment, sont ami et l’avenir cana­dien, et file à l’anglaise avec la blonde Thé­rèse. Ségard s’embarquera seul, empor­tant l’amère dés­illu­sion de son amour incom­pris et le regret tar­dif de n’avoir point osé.

C’est une jolie his­toire, racon­tée en trois actes char­mants, si natu­rel­le­ment et si fine­ment dia­lo­gués que l’intérêt, par­fois très vif, ne s’en dément pas un ins­tant. Un poi­vrot rai­son­neur et sen­ten­cieux dose à pro­pos le sou­rire par­mi cette œuvre un peu désa­bu­sée. M. André Bac­qué joue ce rôle périlleux avec un rare talent d’observation. D’ailleurs, toute la pièce est bien interprétée.
 
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Le Car­rosse du Saint-Sacre­ment, de Pros­per Méri­mée, est une façon de petit chef‑d’œuvre par­fu­mé de pré­cio­si­té, remar­qua­ble­ment illus­tré par Mme Valen­tine Tes­sier et M. Jacques Copeau.

Au total, une soi­rée d’un agré­ment déli­cat, qui ne sera pas une soi­rée per­due pour les amis du Vieux-Colombier.
 
[/​Auguste Ber­trand./​]

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