La Presse Anarchiste

Le statut social

À propos du C.E.T.

On com­mence à envi­sa­ger l’administration de la chose publique comme solu­tion de la ques­tion sociale.

La divi­sion sim­pliste de l’humanité en deux caté­go­ries d’individus exploi­teurs et exploi­tés, n’a pas peu contri­bué à obs­cur­cir les termes d’un pro­blème très com­plexe. C’est le dan­ger des géné­ra­li­sa­tions ; il est ici bien visible. Comme la socié­té est tout entière construite sur l’inégalité éco­no­mique, il semble suf­fi­sant d’insuffler aux oppri­més l’esprit de révolte pour mettre à bas le régime capi­ta­liste, géné­ra­teur de toits les maux.

C’est à cette besogne que se limi­tait encore, en 1914, l’effort révo­lu­tion­naire. Non sans uti­li­té, certes, et non sans suc­cès. Mais s’il s’était tou­jours ain­si bor­né, la trans­for­ma­tion sociale qui doit abou­tir au ren­ver­se­ment total de l’ordre de choses éta­bli, et qui réa­li­se­ra enfin le règne de l’égalité éco­no­mique, cette trans­for­ma­tion eut peut-être mis des siècles à s’accomplir.

La pro­pa­gande révo­lu­tion­naire, pré­cise quand il s agit de détruire, impré­cise quand il s’agit de construire, ne montre d’ordinaire qu’un visage bien fait pour effrayer ceux qu’elle veut convaincre. Une telle pro­pa­gande peut agi­ter les couches les moins intel­li­gentes des déshé­ri­tés, ceux pré­ci­sé­ment qui seraient bien empê­chés de rebâ­tir sur des ruines, mais cette consta­ta­tion même n’est pas pour atté­nuer la ter­reur ou sim­ple­ment l’appréhension de la Révo­lu­tion chez ceux qui rai­sonnent et ne voient d’elle que sa face convul­sée par la haine.

La socié­té bour­geoise dis­pose de moyens de défense extrê­me­ment puis­sants et variés. C’est elle qui éduque. Elle détient les ins­tru­ments du pou­voir et de la répres­sion. Elle est ser­vie par une élite scien­ti­fique et intel­lec­tuelle qui rajeu­nit sans cesse ses cadres et lui four­bit inlas­sa­ble­ment des armes nou­velles. C’est enfin et sur­tout elle qui admi­nistre. Ain­si s’explique son extra­or­di­naire vita­li­té et com­ment, mal­gré les lézardes de la façade, son édi­fice en appa­rence ver­mou­lu a résis­té vic­to­rieu­se­ment jusqu’ici au pic des démolisseurs.

J’ai cher­ché à com­prendre pour­quoi l’idée révo­lu­tion­naire che­mine si len­te­ment, pour­quoi ceux qui la répandent ont la sen­sa­tion de prê­cher dans le désert quand ils croient par­ler aux hommes.

Taxer ceux-ci d’indifférence ou de stu­pi­di­té ? Sans doute, le trou­peau humain paît depuis de longs siècles les maigres prés de l’ignorance et de la ser­vi­tude. Mais par­mi la foule, il y a des nobles cœurs et des esprits inquiets qui s’interrogent sur les pos­sibles len­de­mains. Si nous ne les tou­chons pas, si nous ne les convain­quons pas, c’est que nous ne savons ni les émou­voir, ni les éclairer.

Que dis-je ? Nous abou­tis­sions par­fois à détour­ner de nous ceux qui nous appro­chaient avec confiance. Par l’outrance de nos affir­ma­tions, par le dog­ma­tisme de notre ensei­gne­ment, nous for­mions un milieu her­mé­tique. II nous arri­vait de dis­pu­ter âpre­ment sur des points de doc­trine, car nous avions fon­dé une sorte d’école, et comme si l’étiquette anar­chiste nous avait confé­ré la ver­tu d’infaillibilité, nous pré­ten­dions pos­sé­der toute la véri­té et nous acca­blions de nos sar­casmes qui l’osait cher­cher en dehors ou à côté de nos formules.

Nous n’étions pas les seuls, d’ailleurs, à pra­ti­quer cette sin­gu­lière intran­si­geance, et le tableau un peu sévère que je viens de tra­cer repro­duit avec une même fidé­li­té les mœurs des milieux socia­listes, syn­di­ca­listes et coopérateurs.

Si les réa­li­tés de ces cinq années de guerre n’avaient réus­si à mon­trer la vani­té des sys­tèmes dans l’ordre socio­lo­gique, la révo­lu­tion russe en four­ni­rait une preuve écra­sante : Que res­te­ra-t-il, que reste-t-il dès main­te­nant, du mar­xisme inté­gral dans le bol­che­visme triomphant ?

J’ai beau­coup réflé­chi à tout cela. Et voi­ci que la créa­tion du Conseil Éco­no­mique du Tra­vail vient de mar­quer une étape impor­tante sur le che­min de ces préoccupations.

Il va fal­loir rédi­ger le sta­tut social.
 

Le Droit individuel

Le droit de Robin­son sur son île déserte est illi­mi­té. Sur­vient Ven­dre­di, et la ques­tion sociale est vir­tuel­le­ment posée.

La Révo­lu­tion de 89 a pro­cla­mé les Droits de l’Homme et du Citoyen à une époque où ils étaient dure­ment contes­tés. Un siècle plus tard, ou fon­dait une ligue pour la défense de ces droits, solen­nel­le­ment énon­cés, encore méconnus.

Ce qui fait la com­pli­ca­tion des lois, c’est l’enchevêtrement inex­tri­cable d’intérêts inégaux ; c’est aus­si la dif­fi­cul­té d’imposer l’observation des règles injustes qui découlent de cette inégalité.

Je ne me pré­oc­cupe pas, pour l’instant, de la tran­si­tion, entre le désordre actuel et l’ordre futur. Je suis mon idée et vais droit à mes conclusions.

De ce côté-ci du tor­rent est la vieille socié­té. De l’autre côté, terre incon­nue. Nous cher­chons le gué, pru­dem­ment. Des explo­ra­teurs se sont noyés et der­rière eux des mul­ti­tudes étour­dies. Soyons à la fois har­di et cir­cons­pect, n’aventurons un pas qu’après avoir éprou­vé la soli­di­té du ter­rain. Dans le bouillon­ne­ment des idées quelques prin­cipes émergent, rocs sûrs où nous pou­vons poser le pied.

Tous les bâtis­seurs sont d’accord sur un point les hommes sont égaux en droits. Pre­nons ceci dans le sens abso­lu, il devient super­flu d’ajouter qu’ils ont les uns vis-à-vis des autres les mêmes obligations.

Pas­sons à l’application rigou­reuse de ce prin­cipe fon­da­men­tal que per­sonne n’oserait discuter.

Nous consta­tons que la per­son­na­li­té de l’individu revêt un triple aspect :

Il est citoyen ;

Il est producteur ; 

Il est consommateur.

La socié­té est une asso­cia­tion obli­ga­toire de tous les indi­vi­dus. L’homme n’est pas libre de vivre en dehors de la Socié­té. Il lui faut, coûte que coûte, subir la loi d’association. Et c’est cette néces­si­té qui impose le prin­cipe d’égalité abso­lue des droits entre tous les individus.

Je reven­dique donc, en tant que citoyen, des droits égaux à ceux de tous les citoyens.

Je reven­dique donc, en tant que pro­duc­teur, des droits égaux à ceux de tous les producteurs.

Je reven­dique donc, en tant que consom­ma­teur, des droits égaux à ceux de tous les consommateurs.

Par voie de consé­quence, mon apport indi­vi­duel dans la Socié­té ne peut être refu­sé par elle. De même que je ne suis pas libre de vivre en dehors d’elle, la socié­té n’est pas libre d’exister sans moi. Mon droit indi­vi­duel est incon­tes­table et le sta­tut social l’admettra sans chi­ca­ner sous la triple incar­na­tion du citoyen, du pro­duc­teur, du consom­ma­teur, ou bien il n’y aura pas de société.

De même, encore, il ne m’est pas pos­sible de reven­di­quer seule­ment les droits du citoyen, seule­ment les droits du pro­duc­teur, seule­ment les droits du consom­ma­teur, sans être, à la fois, citoyen, pro­duc­teur, consom­ma­teur. De même enfin, la socié­té ne peut pas m’accorder tels ou tels de ces droits et me refu­ser les autres, mon apport indi­vi­duel dans l’association obli­ga­toire com­por­tant obli­ga­toi­re­ment l’ensemble de ces droits.

Ceci expres­sé­ment sti­pu­lé, j’ai la facul­té d’user de mes droits de citoyen, de pro­duc­teur, de consom­ma­teur, dans la limite où je ne lése­rai pas les droits égaux aux miens des autres citoyens, des autres pro­duc­teurs, des autres consommateurs.
 

Le Droit Collectif

Quand nous son­geons aux socié­tés pri­mi­tives, nous ima­gi­nons des hommes dont l’activité est tout entière absor­bée par la satis­fac­tion des besoins immé­diats. Ils consti­tuent des groupes iso­lés, sans rela­tion entre eux, et le pénible pro­grès humain s’élabore paral­lè­le­ment en des points dif­fé­rents du globe. La loi de néces­si­té qui réunit les indi­vi­dus d’un même groupe est simple comme leurs besoins et les condi­tions maté­rielles évo­luent assez len­te­ment pour qu’elle se trans­mette par tra­di­tion. Des ves­tiges en sub­sistent dans les cou­tumes que les Codes n’ont pu déra­ci­ner, tel, en Espagne, ce curieux Tri­bu­nal des Eaux qui règle, sans appel, — et sans gen­darmes, l’usage des irri­ga­tions de la huer­ta de Valence

Mais les socié­tés modernes sont aux socié­tés pri­mi­tives ce qu’est l’homme d’aujourd’hui par rap­port à son ancêtre pré­his­to­rique. L’individu n’est qu’une cel­lule du corps social ; il a tout juste l’autonomie de la cel­lule phy­sio­lo­gique dans un orga­nisme vivant.

Ce qui va condi­tion­ner avant tout les rap­ports sociaux, c’est l’objet même de la Socié­té, c’est-à-dire l’exploitation du fonds social au pro­fit de tous les associés.

Sont du domaine collectif :

Le sol ;

Les moyens de pro­duc­tion et d’échange ;

Les ser­vices publics.

Pour les rai­sons qui obligent l’individu à vivre en socié­té, obli­ga­tion de laquelle dérive, nous l’avons dit, des droits égaux entre les indi­vi­dus, la pro­prié­té du fonds social ne peut pas être attri­buée à des indi­vi­dus en par­ti­cu­lier. Cette pro­prié­té est indi­vise parce que l’individu, en nais­sant après d’autres géné­ra­tions, ne sau­rait en reven­di­quer la moindre par­celle comme sienne exclu­si­ve­ment. Pour nous bien faire com­prendre, nous dirons que la terre a appar­te­nu au pre­mier homme, dan l’hypothèse qu’il y ait eu un pre­mier homme, ou aux pre­miers hommes appa­rus simul­ta­né­ment qui réus­sirent à y vivre et for­mèrent, sur des points dif­fé­rents, des groupes iso­lés d’abord, de plus en plus nom­breux, jusqu’à consti­tuer en s’amalgamant les natio­na­li­tés actuelles. Ces grou­pe­ments ont le droit du pre­mier occu­pant, mais ce droit n’a per­sis­té que par la sur­vi­vance du grou­pe­ment et il n’est plus pos­sible de mor­ce­ler le bien ter­restre en l’aliénant aux indi­vi­dus mor­tels qui com­posent la nation, en rai­son de leur étroite dépen­dance mutuelle dans la socié­té obli­ga­toire qu’ils forment entre eux. On dis­tingue même que l’interdépendance des groupes natio­naux inter­dit à l’un d’eux de reven­di­quer comme sa pro­prié­té exclu­sive tout ce qui, de la terre, de la mer ou des cieux, peut ser­vir de lien entre toutes les nations.

Cette indi­vi­si­bi­li­té de la pro­prié­té du fonds social est plus fla­grante encore si l’on consi­dère com­ment il a été consti­tué. Nous sommes loin du pri­mate velu qui le dut conqué­rir sur l’ours des cavernes. Pour­tant, nous ne pou­vons pas négli­ger, dans la recherche sérieuse de son ori­gine, l’effort accu­mu­lé de tant de géné­ra­tions qui l’ont fait ce qu’il est aujourd’hui. À le vou­loir dis­tri­buer entre les indi­vi­dus, com­ment éva­lue­rait-on la part qui leur revient dans les voies de com­mu­ni­ca­tions, les ser­vices publics, l’outillage, etc. ? Don­nez-moi une action de l’Obélisque et de la Joconde.

Il y a donc bien, en fait, une pro­prié­té col­lec­tive. Je dis qu’elle s’étend aux moyens de pro­duc­tion et d’échange. La mine n’est pas davan­tage aux mineurs qu’à l’actionnaire auquel ils conti­nuent à payer abu­si­ve­ment des divi­dendes parce qu’ils ne connaissent pas encore leurs droits, et qu’ils mécon­naissent les miens et ceux des autres socié­taires. La mine est pro­prié­té indi­vise entre tous les indi­vi­dus, asso­ciés obli­ga­toi­re­ment, je ne me las­se­rai pas de le sou­li­gner. Et je dirai à l’actionnaire : « Mon­trez-moi vos droits par­ti­cu­liers. N’êtes-vous point socié­taire au même titre que moi, et pré­ten­dez-vous pré­le­ver un gain sur ce char­bon que vous n’extrayez pas, qu’on ne pour­rait trans­por­ter sans les che­mins de fer et les canaux sociaux ? Vous en igno­re­riez les ver­tus et l’usage si Pro­mé­thée n’avait ravi le feu du ciel. Êtes-vous, seul, l’héritier en ligne directe de Prométhée ? »
 

Le Bilan d’un Régime

Contrai­re­ment à l’opinion répan­due par la classe bour­geoise, les révo­lu­tion­naires sont des hommes d’ordre, puisqu’ils veulent sub­sti­tuer l’administration de la chose publique au gâchis capi­ta­liste, et c’est vrai­ment abu­ser de la naï­ve­té des foules que leur mon­trer la Révo­lu­tion comme un dan­ger pour l’ordre social, alors que celui-ci ne peut être fon­dé que par elle.

Les révo­lu­tion­naires savent que cet ordre social ne sera pas le fruit mira­cu­leux d’une géné­ra­tion spon­ta­née, qu’il ne suf­fit pas de le décré­ter au nom de Karl Marx ou de Dieu le Père, on d’un Gou­ver­ne­ment quel­conque, s’intitulât-il « Dic­ta­ture du Pro­lé­ta­riat », mais qu’il faut le réa­li­ser dans les faits.

Comme la plu­part des hommes n’entendent rien aux affaires, elles ont été aban­don­nées, et elles sont encore, sans contrôle effi­cace, aux mains de quelques-uns. Si les indi­vi­dus avaient eu davan­tage conscience de leurs droits, ils n’auraient point tolé­ré qu’on y por­tât aus­si gra­ve­ment atteinte. Mal­heu­reu­se­ment, ils ont lais­sé se créer et se per­pé­tuer des habi­tudes si fâcheuses, qu’il va être dif­fi­cile de per­sua­der ceux qui en béné­fi­cient au détri­ment du corps social tout entier, qu’ils n’ont aucun titre à une situa­tion pri­vi­lé­giée, et je crains fort qu’on ne soit obli­gé de recou­rir à des mesures extrêmes pour faire entendre rai­son à cer­tains d’entre eux.

Rien ne sert de récri­mi­ner. L’essentiel est qu’on envi­sage le pro­blème sous son jour véri­table et qu’on le débar­rasse de toute consi­dé­ra­tion sen­ti­men­tale. Nous sommes sur le ter­rain des affaires, restons‑y.

Au moment où la Révo­lu­tion s’apprête à ouvrir la suc­ces­sion du Capi­ta­lisme, dres­sons rapi­de­ment le bilan du régime condamne.

Or, sa ges­tion est ter­ri­ble­ment déficitaire.

L’agriculture stagne dans les rou­tines. Les richesses du sol et du sous-sol sont mal exploi­tées ou inex­ploi­tées. L’outillage éco­no­mique du pays est démo­dé, ou insuf­fi­sant. Le ton­nage mari­time est déri­soire. Les ser­vices publics fonc­tionnent en dépit du bon sens, ils sont oné­reux aux usa­gers et néan­moins ne couvrent pas leurs frais. L’industrie usine ou manu­fac­ture sans méthode, chaque indus­triel ouvrant au petit bon­heur, pour son compte per­son­nel. Une nuée d’intermédiaires s’interpose entre le pro­duc­teur et le consom­ma­teur, et la matière pre­mière, le pro­duit natu­rel et l’objet fini sont répar­tis sans que les inté­res­sés en puissent contrô­ler le prix de revient, de sorte qu’il est loi­sible aux cour­tiers, aux indus­triels, aux com­mer­çants, d’en faus­ser le coût véri­table. Les logis sont étroits, incon­for­tables, mal­sains, chers. Pour un salaire qui ne cor­res­pond pas tou­jours à leurs besoins essen­tiels et qui leur assure rare­ment la sécu­ri­té dans leur vieillesse, les ouvriers manuels, les tech­ni­ciens, les employés, qui forment l’armée innom­brable des tra­vailleurs, four­nissent un effort exté­nuant et n’ont ni le loi­sir, ni les moyens de culti­ver leur intel­li­gence et de s’intéresser à tout ce qui, hors de l’indispensable labeur humain, consti­tue la joie de vivre pour des hommes civilisés.

Au-des­sus d’elle et comme étran­gère à la vie sociale, la bureau­cra­tie des admi­nis­tra­tions cen­tra­li­sées mul­ti­plie les rouages inutiles d’organismes qui n’ont aucun lien entre eux ou se com­battent les uns les autres ; l’esprit d’initiative y est consi­dé­ré comme une tare ; la moindre inno­va­tion s’y heurte à des obs­tacles insur­mon­tables. L’enseignement par­ci­mo­nieu­se­ment dis­pen­sé par une péda­go­gie d’un autre âge, est com­par­ti­men­té de telle façon que seuls les fils de la bour­geoi­sie en peuvent entiè­re­ment pro­fi­ter. Les finances ignorent les règles comp­tables élé­men­taires. Mal­gré l’héroïsme des sol­dats, il a fal­lu cinq ans aux chefs mili­taires pour chas­ser, au prix de quel gas­pillage de vies humaines, l’ennemi qui m’aurait jamais dû fou­ler le sol qu’ils avaient mis­sion de protéger.

Et cet état chao­tique est main­te­nu par un Par­le­ment impuis­sant à légi­fé­rer dans l’intérêt géné­ral, com­po­sé de dépu­tés sans man­dat défi­ni, dont l’activité ver­bale entre­tient l’illusion d’une vie poli­tique inexis­tante. Les gou­ver­ne­ments se suc­cèdent dans l’incompréhension des phé­no­mènes éco­no­miques aux­quels l’existence des nations reste sus­pen­due. Inaptes à pré­voir, inha­biles à déci­der, ils sont, à l’intérieur comme à l’extérieur, uni­que­ment pré­oc­cu­pés de défendre les ins­ti­tu­tions sur­an­nées du régime capi­ta­liste contre les aspi­ra­tions pro­lé­ta­riennes. Au nom de l’Ordre dont ils se pro­clament les gar­diens, ils mobi­lisent la force publique, police, armée, magis­tra­ture, chaque fois qu’ils redoutent de le voir trou­blé. Sau­veurs atti­trés du Capi­ta­lisme, ils ont par défi­ni­tion les adver­saires réso­lus de la Révo­lu­tion. Et si celle-ci doit être san­glante, on peut tenir pour cer­tain que le Gou­ver­ne­ment, quel qu’il soit, qui sera au pou­voir le jour où elle écla­te­ra, en assu­me­ra volon­tiers la res­pon­sa­bi­li­té devant l’Histoire.

Il est grand temps de mettre la mai­son, en ordre.
 
(À suivre.)
 
[/​Auguste Ber­trand./​]

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